Découverte de Wolffia globosa (Roxb.) Hartog & Plas (Araceae) dans l’Hérault (France), espèce nouvelle pour la France

Title

Record of Wolffia globosa (Roxb.) Hartog & Plas (Araceae) in Hérault department, a new species for France

Résumé

Dans le sud de la France, autour du lac du Salagou (Hérault), l’observation de trois populations de Wolffia globosa (Roxb.) Hartog & Plas (Araceae), petite lentille d’origine paléotropicale, constitue une première en France. Cette découverte porte à trois le nombre d’espèces de ce genre présentes en France. Nous synthétisons ici les données disponibles concernant la description de W. globosa et ses différences avec les espèces proches (via une clé pour les quatre espèces du genre Wolffia présentes en Europe), son écologie, son utilisation et ses voies d’introduction.

Abstract

In the south of France, around the Salagou lake (Hérault), the observation of three populations of Wolffia globosa (Roxb.) Hartog & Plas (Araceae), a small duckweed of paleotropical origin, is the first record of this species in France. This discovery brings the number of Wolffia present in France to three. Here we summarise the available data concerning the description of W. globosa and its differences with related species (via a key for the four species of the genus Wolffia present in Europe), its ecology, its use and its pathways of introduction.

1. Découverte d’une lentille inconnue …

Lors d’une prospection botanique autour du lac du Salagou le 04/10/2020, l’une d’entre nous (F.N.) découvre un bassin d’épuration en grande partie couvert par Lemna gibba L., accompagnée d’une minuscule lentille du genre Wolffia (photo 1). Cette découverte suscite l’intérêt de l’Association mycologique et botanique de l’Hérault et des Hauts-Cantons (AMBHHC) qui organise sa sortie hebdomadaire du 15/10/2020 pour aller observer ces lentilles. Lors de cette sortie, deux autres bassins d’épuration sont découverts avec la même association d’espèces.

Figure 1a. Bassin d’épuration à Lemna gibba et Wolffia globosa (voile du Lemnion minoris) sur la commune de Clermont-l’Hérault, le 28 octobre 2020.
Figure 1b. Bassin d’épuration à Lemna gibba et Wolffia globosa (voile du Lemnion minoris) sur la commune du Puech, le 17 février 2021.

La seule espèce du genre Wolffia présente dans l’Hérault était à ce jour Wolffia arrhiza (L.) Horkel ex Wimm. Cependant la lentille du Salagou n’avait ni la forme caractéristique de W. arrhiza, qui a la face supérieure aplatie, ni sa couleur vert foncé. Nous avons alors pensé à W. columbiana H. Karst., espèce exotique qui venait d’être découverte dans la métropole lilloise (Lecron, 2021) et dont la face supérieure verte transparente et plus ou moins arrondie correspondait bien à notre lentille. Pour confirmer cette piste, nous avons réalisé un montage au microscope. Avec au maximum 4-5(6) stomates par fronde, nous avons pu définitivement écarter W. arrhiza qui possède généralement 10 à 100 stomates par fronde (Flora of North America Editorial Committee, 1993 ; Armstrong, 2017). Cependant la taille de nos lentilles variait beaucoup, d’environ 0,5 à plus de 1 mm, notamment en prenant en compte l’ensemble de la lentille, fronde mère et fronde fille accolée. En ne mesurant que le corps de la fronde mère, la taille ne dépassait cependant jamais 0,8 mm, ce qui suggérait alors plutôt l’espèce W. globosa (Roxb.) Hartog & Plas. Un envoi d’échantillons à Ulf Schmitz (Université de Düsseldorf), spécialiste du genre en Allemagne, permit de confirmer cette dernière hypothèse.

2. Le genre Wolffia en Europe et en France

Le genre Wolffia appartient à la famille des Lemnaceae (Bog et al., 2020) parfois considérée au rang de sous-famille (Lemnoideae) incluse au sein des Araceae (Angiosperm Phylogeny Group III, 2009), position suivie ici et par Flora Gallica (Tison & de Foucault, 2014). Le genre est dédié à Johann Friedrich Wolff (1778-1806), un médecin, botaniste et entomologiste allemand qui a rédigé et illustré une thèse sur les Lemnaceae (Wolff, 1801). On compte au total onze espèces de Wolffia (Armstrong, 2017 ; Bog et al., 2020). Le genre est présent presque partout dans le monde (sauf dans les régions arctiques et antarctiques) et il comprend les plus petits Spermatophytes connus au monde (Armstrong, 2017).

En France et en Europe, seul Wolffia arrhiza (L.) Horkel ex Wimm. est indigène. Elle est largement répartie dans les régions tempérées, subtropicales et tropicales d’Europe, d’Afrique, d’Asie occidentale et de l’est du Brésil, régions caractérisées par des hivers relativement doux et sans été excessivement chaud (Euro+Med, 2006-2020 ; Bog et al., 2020). En France, elle est présente essentiellement sur la façade ouest du pays, depuis le Nord jusqu’à l’Aquitaine, ainsi que dans le bassin de la Loire, la vallée de la Saône, dans les régions d’étangs (Brenne, Bresse, Dombes) et elle devient plus localisée en région méditerranéenne, où elle n’est présente qu’en Camargue et au nord de Montpellier (carte 1).

Carte 1. Carte de distribution des trois Wolffia présentes en France (source pour W. arrhiza : GBIF.org (12 February 2021, avec nos corrections) GBIF Occurrence Download https://doi.org/10.15468/dl.v2r5gm).

Au cours de la dernière décennie, trois nouvelles espèces de Wolffia ont été recensées en Europe.

  • globosa a été découverte en 2010 en Bulgarie (Kirjakov & Velichkova, 2013). Elle a ensuite été détectée en Allemagne, d’abord en Moyenne-Franconie (Bavière) en 2018 (Beigel, 2020), puis en 2020 dans la vallée de l’Elbe en Saxe-Anhalt (Franck et al., 2020).
  • Entretemps, la présence de columbiana H. Karst., espèce américaine (présente dans toute l’Amérique mais plus particulièrement fréquente dans la partie est de l’Amérique du Nord, du Canada au Mexique), a été mise à jour en Allemagne et aux Pays-Bas lors de la vérification de stations de W. arrhiza (Schmitz et al., 2014). Elle a ensuite été découverte en Belgique (Hendrickx & Verloove, 2019) et en Italie (Ardenghi et al., 2017).
  • Enfin, australiana (Benth.) Hartog & Plas, originaire d’Océanie (Australie, Nouvelle-Zélande), n’a été trouvée à ce jour qu’aux Pays-Bas (Achterkamp & Soes, 2014).

La France était restée à l’écart de ces découvertes jusqu’à ce que W. columbiana soit signalée dans la métropole lilloise (Lecron, 2021). La découverte de W. globosa dans l’Hérault porte donc à trois le nombre d’espèces de Wolffia présentes en France (carte 1).

3. Portrait de Wolffia globosa

3.1. Description et identification de W. globosa

W. globosa appartient à la sous-section Wolffia (Landolt, 1986). La clé et la description qui suivent combinent les informations données par Landolt (1986), Flora of North America Editorial Committe (2013), Armstrong (2017) et Bog et al. (2020).

Clé d’identification des Wolffia présents en Europe

Pour une clé complète du genre Wolffia, nous renvoyons le lecteur à la publication de Bog et al. (2020) qui propose une clé mise à jour pour l’ensemble des Lemnaceae et des onze espèces de Wolffia. Vu le nombre récent de découvertes de nouvelles espèces de Wolffia en Europe, il n’est en effet jamais exclu que d’autres espèces soient découvertes ces prochaines années. Nous proposons ici une clé pour les quatre taxons déjà présents en Europe.

1 – Fronde 1,3-2,5 fois aussi longue que large, 1,5-3,0 fois aussi profonde que large, la plus grande largeur étant à la surface de l’eau (presque aucun bord translucide visible du haut) ; stigmate avec cellules pigmentaires …………………………………………………………………………………………………………………………………………………. W. australiana

1’ – Fronde 1,0-1,7 fois aussi longue que large, 0,75-1,5 fois aussi profonde que large, la plus grande largeur étant sous la surface de l’eau (au moins latéralement un bord translucide visible d’en haut) ; stigmate sans cellules pigmentaires ………………………………………………………………………………………………………………………………………………  2

2 – Fronde à surface supérieure vert foncé, non transparente, brillante à la surface, nettement aplatie ; apex légèrement pointu ; stomates généralement (10)30-100 ……………………………………………..W. arrhiza

2’- Fronde à surface supérieure verte transparente, non brillante, plus ou moins arrondie ; apex légèrement pointu ou arrondi ; stomates 1-10(35) ………………………………………………………………………………………………………………… 3

3 – Corps de la plante (i.e. fronde mère) de 0,8-1,2 mm de long et > 0,6 mm de large, presque sphérique (1,0 à 1,3 fois aussi long que large), la plus grande partie de la surface supérieure est clairement arrondie, la zone supérieure la plus haute est plate …………………………………………………… W. columbiana

3′ – Corps de la plante (i.e. fronde mère) de 0,4-0,8 mm de long et généralement < 0,6 mm de large, plus long que large (ovoïde-cylindrique) (1,3-1,7(2) fois aussi long que large), surface supérieure à peine arrondie (aplatie sur le dessus), bord translucide distinct à l’extrémité …………………………….  W. globosa

Figure 2a. W. globosa en compagnie de Lemna gibba in situ.
Figure 2b. W. globosa avec fronde mère et fronde fille bien visible sur fond de papier millimétré.

Wolffia globosa (Roxb.) Hartog & Plas (Blumea 18 : 367, 1970 ; basionyme : Lemna globosa Roxb., Fl. Ind. ed. 1832, 3 : 565, 1832) possède une fronde de forme ovoïde ou ellipsoïde-cylindrique (plus longue que large), verte transparente sur toute sa surface (N.B. : certaines populations peuvent inclure des individus avec une surface dorsale d’un vert plus foncé), convexe sur la face supérieure avec la partie centrale supérieure aplatie, avec la plus grande largeur nettement sous la surface de l’eau (i.e. seule la partie centrale de la surface dorsale est au-dessus de l’eau). Les dimensions de la fronde (i.e. de la fronde mère sans la fronde fille) est 0,4-0,8(0,9) mm de long, et de 0,3-0,5 mm de large, ce qui en fait la plus petite de toutes les plantes à fleurs connues ! La fronde est 1,3-1,7(2) fois aussi longue que large et 1-1,5 fois aussi profonde que large. Le nombre de stomates varie de 8 à 25 (plus rarement jusqu’à 35 stomates), ils sont difficiles à observer, plutôt pâles et d’un vert quelque peu transparent en surface. La fronde ne possède ni veines ni cellules pigmentaires épidermiques brunes. 2n = 30, 60.

Figure 3a. W. globosa en compagnie de Lemna gibba in situ.
Figure 3b. W. globosa en compagnie de Lemna gibba sur tige sèche.

3.2. Quelques aspects de la biologie et du cycle de vie de W. globosa

Les lentilles d’eau sont particulièrement intéressantes sur le plan de l’évolution, car ce sont les plus petits Angiospermes du monde. Les lentilles d’eau, telles que Wolffia globosa, ne sont pas simplement des versions miniatures d’Angiospermes plus grands ; la réduction de la taille du corps de la plante s’accompagne d’une forte modification structurelle qui résulte de l’alternance, de la simplification ou de la perte de nombreuses caractéristiques morphologiques et anatomiques (Piotrowska & Bajguz, 2012). Par conséquent, Wolffia globosa n’a ni feuilles ni tige, et manque même de racines ! La plante entière, appelée fronde, produit occasionnellement des fleurs et rarement des graines. La fleur, quand elle est présente, se trouve dans une cavité sur la surface dorsale et (contrairement à d’autres lentilles) n’est pas enfermée par une spathe chez W. globosa. En Amérique du Nord, la floraison est considérée comme un évènement très rare, qui a lieu en fin de printemps et en automne. En Europe, aucune fleur n’a encore été observée sur W. globosa (Frank et al., 2020). Comme beaucoup d’espèces de lentille d’eau, W. globosa se multiplie principalement par propagation végétative, par la formation de frondes filles à partir d’une poche à l’extrémité de la fronde (Gaigher & Short, 1986). La fronde nouvellement formée reste attachée à la fronde mère pendant la phase initiale de croissance et les plantes semblent donc se composer de deux frondes (visibles sur les photos 2 et 3a). La multiplication végétative est très rapide, en particulier chez certains clones de W. globosa, chez qui le temps de doublement peut se réaliser en seulement 29,8 heures, ce qui correspond au taux de croissance le plus rapide des espèces de Wolffia testées (Sree et al., 2015). Pendant l’hiver, il se constitue des formes de repos (turions) qui tombent au fond des étangs en attendant le retour des conditions favorables.

3.3. Aire de répartition et réponse au climat

L’aire de répartition naturelle de W. globosa comprend les régions tempérées chaudes, subtropicales et tropicales de l’Asie orientale et méridionale et du sud et de l’est de l’Afrique avec des hivers doux (Bog et al., 2020). Elle est très commune en Inde, au Népal, au Sri Lanka, en Chine et au Japon où elle est souvent confondue avec d’autres espèces. Elle a été introduite en Amérique du Nord (Californie, Floride) et, plus récemment, en Europe (Allemagne, Bulgarie, France).

Pour une espèce d’origine paléotropicale, on peut s’interroger sur son devenir en climat tempéré. Selon Landolt (1986), W. globosa a besoin d’au moins deux cents jours avec une température minimale de 10 °C. Cela est à mettre en regard des besoins de W. arrhiza et de W. columbiana, qui ne nécessitent que cent quarante jours, et des espèces de Lemna d’Europe centrale qui s’accomodent de cinquante jours. En ce qui concerne la résistance au froid, W. globosa est plus sensible que les deux autres espèces de Wolffia présentes en France. Selon Landolt (1994), W. globosa tolère +1 °C comme température moyenne la plus basse des trois mois les plus froids. Ces conditions sont largement réunies en région méditerranéenne française. Par ailleurs, l’espèce semble avoir passé plusieurs hivers en climat continental en Allemagne, même s’il faut noter que les derniers hivers ont été relativement plus cléments (Frank et al., 2020). Beigel (2020) note par exemple que des frondes de W. globosa avaient survécu sous une couche de glace durant un épisode de froid en janvier 2019. Nous avons de même pu continuer à observer la plante en décembre 2020 et en février 2021 après plusieurs périodes de gelée. Bien qu’en densité moins importante et sans frondes filles à cette période, de nombreuses frondes étaient toujours présentes au sein du tapis de Lemna gibba (photo 4).

Figure 4a. Aspect du Lemnion minoris avec Lemna gibba et Wolffia globosa, en fin d’hiver (17 février 2021).
Figure 4b. Aspect du Lemnion minoris avec Lemna gibba et Wolffia globosa, en fin d’hiver (17 février 2021).

3.4. Écologie

Dans Flora of North America (1993), W. globosa est décrit comme occupant les eaux calmes, mésotrophes à eutrophes, de 0 à 600 m d’altitude. En Bulgarie, W. globosa a été trouvé dans un petit étang en compagnie de Lemna gibba et L. minuta Kunth. En Bavière, Beigel (2020) indique que, dans les étangs occupés par W. globosa, aucune végétation à feuilles flottantes n’était présente, mais uniquement d’autres espèces de lentilles d’eau : Spirodela polyrhiza (L.) Schleid., Lemna minor L. et L. turionifera Landolt. De même, dans la deuxième station découverte en Saxe-Anhalt, W. globosa a été détectée au sein d’un « tapis » dense avec Azolla filiculoides Lam., Lemna minor, Spirodela polyrhiza et Wolffia columbiana sur des eaux calmes (Frank et al., 2020). Les populations observées autour du Salagou partagent la même écologie, avec la co-occurrence d’une seule autre lentille, Lemna gibba. Les populations héraultaises et celles observées par Beigel (2020), toutes situées dans des bassins d’épuration, correspondent probablement à des eaux très eutrophes. On peut donc conclure des diverses observations réalisées en Europe que W. globosa s’intègre aux voiles flottants des eaux méso-eutrophes à hypertrophes relevant du Lemnion minoris Tüxen ex O. Bolòs & Masclans 1955.

3.5. Voies d’introduction

Comment une petite lentille d’eau du Sud-Est asiatique a-t-elle pu arriver en Europe ? Il est connu que les oiseaux d’eau jouent un rôle dans la dispersion des plantes aquatiques (Reynolds et al., 2015). Cette dispersion se fait soit lorsque des plantes sont piégées dans le plumage ou sur les pattes des oiseaux (exozoochorie), soit lorsque les oiseaux consomment ces plantes et les expulsent dans leurs excréments (endozoochorie). Si les plantes conservent leur propriété de multiplication végétative en passant dans le tube digestif, la dispersion peut s’effectuer sur des distances bien plus importantes. Cette dernière possibilité a été démontrée pour la dispersion de Wolffia columbiana via des canards siffleurs et des cygnes au Brésil (Silva et al., 2018). Cependant, comme le suggèrent Frank et al. (2020), il faut noter qu’aucune espèce européenne d’oiseaux migrateurs n’a ses quartiers d’hiver dans les régions chaudes et tempérées de l’est ou du sud de l’Asie tropicale qui constituent l’aire de répartition d’origine de l’espèce. On peut donc a priori exclure que la première introduction en Europe s’est réalisée via la migration des oiseaux. Cependant, il est très probable que la dispersion par les Anatidés ait permis une expansion locale ou régionale post-introduction, ce qui expliquerait la présence de W. globosa dans trois bassins autour du lac du Salagou, peut-être à partir d’une seule introduction initiale. Comme décrit pour W. columbiana (Schmitz et al., 2014), W. globosa a aussi pu être introduit accidentellement avec l’importation de plantes aquatiques ornementales puis relâchée lors du nettoyage des aquariums. Cette hypothèse est plausible au Salagou où nous avions déjà trouvé dans un fossé, fin 2012, Salvinia molesta D.S. Mitch. (Salviniaceae) et Myriophyllum aquaticum (Vell.) Verdc. (Haloragaceae), deux exotiques prisées par les aquariophiles (Fried & Mandon-Dalger, 2013). Enfin, depuis plus de dix ans, Lagarosiphon major (Ridl.) Moss (Hydrocharitaceae), autre plante majeure des aquariums, a colonisé tout le pourtour du lac du Salagou. Preuve que les introductions de ce type ne sont pas rares.

3.6. Utilisations

W. globosa fait l’objet de différentes utilisations ou projet d’utilisations qui pourraient aussi jouer un rôle dans son introduction. Dans sa zone d’origine, notamment au Laos, en Birmanie (Myanmar) et en Thaïlande, elle est appelée Khaï Nam et constitue une culture légumière consommée sous forme de soupe, légume ou omelette. Son intérêt diététique – et donc sa culture – se répandent dans le monde, car elle contient au moins 30% de son poids sec en protéines (autant que le soja) et également de la vitamine B12 dont la carence est cause d’anémie chez les végétaliens (Sela et al., 2020). Les Wolffia ont également des capacités d’épuration des eaux avec une bonne absorption des nitrates et l’absorption des nutriments en excès en particulier azote (N) et phosphate (PO4). Cela aurait pu être une piste concernant son mode d’introduction dans les trois bassins d’épurations du Salagou. Toutefois, des spécialistes nous ont indiqué que ce système n’est plus utilisé dans les stations d’épuration car trop lent et coûteux en manipulations (A. Dutartre et C. Boutin, com. pers.). Enfin, il existe aussi des essais pour développer la culture de biomasse ; son taux de croissance élevé et sa forte teneur en amidon en font par exemple une excellente candidate pour la production d’éthanol (Soda et al., 2015).

4. Conclusions

Durant l’automne 2020, en quelques semaines, après la découverte de W. columbiana dans le Nord (Lecron, 2021) puis notre propre découverte dans l’Hérault, le genre Wolffia en France est passé subitement d’une à trois espèces connues. Il est très probable que leur présence soit passée inaperçue avant d’être découverte récemment. Cela implique aussi que ces deux espèces seront probablement bientôt découvertes ailleurs en France. À cet égard, les bassins d’épuration et autres pièces d’eaux calmes et plutôt eutrophes sont les milieux à viser en priorité. Revisiter les stations connues de Wolffia arrhiza peut également être une bonne stratégie comme cela a été démontré en Allemagne (Schmitz et al., 2014 ; Frank et al., 2020).

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Remerciements

Nous tenons à remercier Filip Verloove et Ulf Schmitz pour leur expertise dans l’identification des échantillons de Wolffia ainsi que Jean-Michel Lecron pour les échanges à propos de nos découvertes respectives.