Compléments aux synthèses des Juncetea bufonii et Crypsietea aculeatae ; essai sur les Oryzetea sativae

Title

Complements to the overview of Juncetea bufonii and Crypsietea aculeatae; essay of an overview of Oryzetea sativae

Résumé

Cet article apporte des compléments aux synthèses antérieures des Juncetea bufonii et des Crypsietea aculatae (données d’Espagne, Maroc, Sicile, Grèce, Kazakhstan), avec pour la première classe un ordre nouveau, les Lythretalia borysthenici, et une alliance nouvelle, le Limosellion tenellae ; on propose aussi une synthèse de la végétation commensale des rizières (Oryzetea sativae), avec une alliance nouvelle japonaise, le Ludwigio prostratae-Echinochloion hispidulae.

Abstract

This article complements previous overviews of Juncetea bufonii and Crypsietea aculatae (data from Spain, Morocco, Sicily, Greece, Kazakhstan), with for the first class a new order, Lythretalia borysthenici, and a new alliance, Limosellion tenellae; an overview of the commensal vegetation of rice fields (Oryzetea sativae) is also proposed, with a new Japanese alliance, Ludwigio prostratae-Echinochloion hispidulae.

La classe des Juncetea bufonii constitue une version moderne d’une partie de la classe plus traditionnellement dénommée comme Isoeto-Nanojuncetea bufonii ; elle a fait l’objet de réflexions et de synthèses dans deux publications (de Foucault, 1988, 2013). De nouveaux éléments justifient un retour sur cette classe et sur celle, voisine, des Crypsietea aculeatae ; on en profitera pour aborder à la suite les Oryzetea sativae, syntaxon faisant l’objet d’assez peu nombreux travaux.

La nomenclature suit Flora Gallica pour les taxons présents en France (Tison & de Foucault, 2014, à l’exception de Neoschischkinia pourretii nommé ici Agrostis pourretii), Euro+Med Plantbase pour les taxons méditerranéens absents de France et Catalogue of life (www.catalogueoflige.org) pour les autres.

1. Les Juncetea bufonii

1.1. Des végétations d’Espagne

Le syntaxon n° 90 de la synthèse des Juncetea bufonii de 2013 issu du « Junco pygmaei-Isoetetum velatae Rivas Goday 1956 » est resté sans interprétation définitive, malgré une documentation significative (Rivas Goday, 1956, tableau III et cuadro 18, sur 17 relevés) :

  • JUNCETEA BUFONII: Juncus pygmaeus V, Lythrum borysthenicum V, Ranunculus longipes IV, lateriflorus III, Isolepis setacea III, Cicendia filiformis III, Juncus tenageia III, J. bufonius III, J. capitatus II, Lotus angustissimus II, Agrostis pourretii II, Illecebrum verticillatum II, Pulicaria « uliginosa » (P. vulgaris ou P. arabica *hispanica ?) II, Centaurium maritimum I, Sisymbrella aspera *a. I, Eryngium galioides I,
  • autres taxons : Briza minor II, Ornithopus perpusillus I, Hypochaeris glabra I, Anthoxanthum aristatum I, Trifolium micranthum I, Moenchia erecta I, Molineriella laevis I ;

on peut le définir ici sous le nom de Ranunculo longipedis-Lythretum borysthenici ass. nov. hoc loco, typus nominis hoc loco : composante thérophytique du relevé 8 du tableau III in Rivas Goday (1956, Anales del Jardín Botánico de Madrid 13 hors texte). Le cuadro 19 de la même publication semble décrire une végétation un peu différente de ce Ranunculo-Lythretum (sur 8 relevés) qui mérite aussi le rang d’association :

  • JUNCETEA BUFONII: Juncus pygmaeus V, bufonius V, Lythrum borysthenicum V, L. thymifolia V, Pulicaria « uliginosa » (P. vulgaris ou P. arabica *hispanica ?) V, Myosurus minimus V, Eryngium galioides IV, Agrostis pourretii IV, Ranunculus lateriflorus IV, R. longipes II, Sisymbrella aspera *a. II,
  • autre taxon : Polypogon maritimus III,

Eryngio galioidis-Lythretum borysthenici ass. nov. hoc loco, typus nominis hoc loco : composante thérophytique du relevé 1 du cuadro 19 in Rivas Goday (1956, Anales del Jardín Botánico de Madrid 13 : 384). D’un autre côté, la composante vivace de ce même « Junco pygmaei-Isoetetum velatae Rivas Goday 1956 » n’a pas vraiment été isolée jusqu’à présent : Antinorio agrostideae-Isoetetum velatae ass. nov. hoc loco, typus nominis hoc loco : composante vivace du relevé 9 du tableau III in Rivas Goday (1956, Anales del Jardín Botánico de Madrid 13 hors texte).

Le syntaxon n° 127 (d’après Rivas Goday, 1964, tableau p. 126 et relevé 4 du tableau p. 127) est plus original qu’une simple race à Veronica anagalloides et Isolepis pseudosetacea du Stellario alsines-Isolepidetum setaceae W. Koch ex Libbert 1932, qui relève en outre d’une alliance différente (Nanocyperion flavescentis vs Radiolion linoidis) : Veronico anagalloidis-Isolepidetum pseudosetaceae ass. nov. hoc loco, typus nominis hoc loco : composante thérophytique du relevé 3 du tableau in Rivas Goday (1964, Vegetación y flórula de la cuenca estremeña del Guadiana : 216).

 

1.2. Une végétation du Maroc nord-occidental

Dans les années 1990, j’ai été en contact avec un enseignant du lycée français de Rabat, Dominique Titolet, qui préparait alors une thèse sur la végétation des dayas inondables de la Maâmora (entre Rabat et Kenitra), correspondant à des dépressions dans un massif dunaire ; il en avait rassemblé plus de cinquante relevés effectués entre le 15 mai et le 15 juin 1989. Par la suite, je n’ai plus eu de ses nouvelles, ne sachant même pas si cette thèse a été ou non soutenue. Estimant dommage que ces données ne soient pas mises à la disposition des phytosociologies méditerranéens, je propose de publier ici l’interprétation de ces végétations. Ces relevés sont synthétisés dans les tableaux 1 et 2 et leur interprétation est basée sur mes synthèses antérieures (de Foucault, 1988, 2013). Ils sont repris tels qu’ils sont présentés dans le manuscrit provisoire reçu en mai 1993 (intitulé des colonnes, les subdivisions éventuelles étant distinguées ici par les lettres a et b ; pas de localisation précise des relevés, ni recouvrement, ni surface relevée).

Si on commence par la végétation vivace (tableau 1), on peut surtout distinguer une végétation de niveau topographique moyen (colonnes C’3 et C3b), qui relève de l’Ophioglosso lusitanici-Isoetion histricis, dont la pauvreté floristique ne permet pas une définition en terme d’association, et une végétation de niveau topographique inférieur (colonne C2a), qui relève de l’Antinorio agrostideae-Isoetion velatae, dont le nombre plutôt faible de relevés ne permet pas non plus une définition en terme d’association, quoique Rhazi et al. (2001) complètent bien cette combinaison floristique en ajoutant Myriophyllum alterniflorum, Cynodon dactylon, Eleocharis palustris, Carex divisa, moins fréquemment Antinoria agrostidea à Isoetes velata et Baldellia ranunculoides.

La végétation thérophytique (tableau 2) est assez riche floristiquement, ce qui autorise des interprétations plus définitives. Tout d’abord, la colonne C4, rassemblant des relevés de contact avec la forêt de Quercus suber de la Maâmora, semble correspondre à ou affine de l’Ammochloo involucrataeCladanthetum mixti Braun-Blanq. 1940 (Braun-Blanquet, 1940 : 49, sub Ammochloo involucrataeAnthemidetum multicaulis), pelouse quasiment dépourvue de taxons hygrophiles.

Les colonnes C3a et C3b décrivent une pelouse des Tuberarietea guttatae dans laquelle un lot important de thérophytes xérophiles caractérisant cette classe est associé à un cortège hygrophile caractérisant plutôt les Juncetea bufonii : Lysimachia arvensis subsp. parviflora, Radiola linoides (photo 1), Cicendia filiformis, Illecebrum verticillatum (photo 2), Agrostis pourretii, tout particulièrement la colonne C3a qui s’enrichit en plus de Lythrum borysthenicum, Centaurium pulchellum, Juncus bufonius, J. capitatus. On propose d’interpréter cette belle pelouse mésohygrophile marocaine en Lysimachio parviflorae-Tuberarietum guttatae Titolet & B. Foucault ass. nov. hoc loco, qui varie ainsi :

  • typicum, surtout différencié par Cerastium glomeratum (colonne C3a), plus mésophile ; typus nominis hoc loco de l’association et du typicum (18 taxons) : Plantago coronopus *c. 4, Tuberaria guttata 1, Lysimachia arvensis *parviflora +, Logfia gallica +, Ornithopus pinnatus +, perpusillus +, Paronychia echinulata +, Rumex bucephalophorus +, Tolpis umbellata +, Trifolium cherleri +, Illecebrum verticillatum +, Isolepis pseudosetacea +, Agrostis pourretii +, Briza minor +, Carlina racemosa +, Lotus hispidus +, Cerastium glomeratum +, Anthoxanthum ovatum + ;

Photo 1. Radiola linoides ; © B. de Foucault.
Photo 2. Illecebrum verticillatum ; © B. de Foucault.

  • juncetosum capitati subass. nov. hoc loco (colonne C3b), plus hygrophile, différencié par le taxon éponyme, Lythrum borysthenicum, Centaurium pulchellum, Juncus bufonius, plus rarement Centaurium maritimum, Solenopsis laurentia ; typus nominis hoc loco de la sous-association (20 taxons) : Plantago coronopus *c. 2, Tolpis umbellata 2, Tuberaria guttata 1, Ornithopus pinnatus 1, Agrostis pourretii 1, Lysimachia arvensis *parviflora +, Logfia gallica +, Hypochaeris glabra +, Paronychia echinulata +, Rumex bucephalophorus +, Vulpia myuros +, Centaurium pulchellum +, Juncus bufonius +, capitatus +, Lythrum borysthenicum +, Illecebrum verticillatum +, Radiola linoides +, Briza minor +, Carlina racemosa +, Lotus hispidus +.

La colonne C’3 décrit une pelouse thérophytique « à petits trèfles » (avec huit représentants du genre Trifolium) homologue d’autres pelouses plus septentrionales possédant le même caractère synfloristique, par exemple le groupement à Aira praecox et petits Trèfles du nord de la France (Géhu & de Foucault, 1978, tableau III) et le Vulpio bromoidis-Trifolietum subterranei initialement décrit des buttons de la Brenne par Wattez et al. (1978, tableau 2), retrouvé ultérieurement en Limousin (Mady et al., 2018). Le caractère mésohygrophile de l’asociation marocaine est marqué par la présence de Juncus bufonius, J. capitatus (photo 3), Ranunculus muricatus, R. sardous, Lythrum hyssopifolia, Illecebrum verticillatum, Lysimachia arvensis subsp. parviflora, Radiola linoides, la balance floristique étant encore en faveur des Tuberarietea guttatae. On remarquera aussi la présence significative de Ranunculus parviflorus, taxon bien connu des ourlets thérophytiques vernaux (de Foucault, 2009), mais qui paraît trouver ici une de ses stations primaires (Tison & de Foucault, 2014 : 955 ; voir aussi infra, l’« Isoeto durieui-Ranunculetum parviflori Brullo, Di Martino & Marcenò 1977 »). On définit ici l’Anthoxantho ovati-Trifolietum tomentosi Titolet & B. Foucault ass. nov. hoc loco, typus nominis hoc loco (18 taxons) :

  • TUBERARIETEA GUTTATAE : Trifolium tomentosum 3, micranthum 2, T. nigrescens 2, Tolpis umbellata 1, Anthoxanthum ovatum 1, Carlina racemosa 1, Briza minor 1, Trifolium isthmocarpum +, T. cernuum +, T. glomeratum +,
  • JUNCETEA BUFONII : Juncus bufonius 3, Radiola linoides +, Lysimachia arvensis *parviflora +, Ranunculus muricatus +, sardous +,
  • autres taxons : Trifolium resupinatum 2, campestre 1, Plantago coronopus *c. 1.

Photo 3. Juncus capitatus ; © B. de Foucault.

La colonne C2 est bien plus riche en taxons hygrophiles qu’en taxons plutôt xérophiles ; à ce titre sa végétation relève plus des Juncetea bufonii. Elle est liée à des niveaux topographiques inférieurs (la composante vivace d’une partie des relevés correspond à l’Antinorio agrostideae-Isoetion velatae évoqué précédemment). Avec dix-sept relevés, sa valeur d’association originale s’impose : Lythro borysthenici-Agrostietum pourretii Titolet & B. Foucault ass. nov. hoc loco, typus nominis hoc loco (12 taxons) : Lythrum borysthenicum 3, Illecebrum verticillatum 1, Lotus hispidus 1, Polypogon maritimus 1, Crassula vaillantii 1, Agrostis pourretii +, Centaurium pulchellum +, Juncus tenageia +, J. pygmaeus +, Plantago coronopus *c. +, Ranunculus sardous +, Trifolium resupinatum +.

Où placer cette dernière association à Agrostis pourretii (= Agrostis salmantica) ? Ce taxon évoque assez clairement l’alliance ibérique décrite par Rivas Goday (1958) sous le nom d’Agrostion salmanticae, muté en Agrostion pourretii par Rivas-Martínez et al. (1986). Le tableau 3 actualise le tableau 8 publié précédemment (in de Foucault, 2013), les numéros des syntaxons sont ceux de ce tableau 8 (à l’exception du syntaxon 89 finalement guère à sa place dans cette alliance car plus proche du Cicendion filiformis), la colonne LAp reprenant la colonne C2 du tableau 2. La colonne 91 décrit une végétation corse des environs de Porto-Vecchio ; on en a rapproché la colonne 91bis qui synthétise une autre végétation corse (des environs et nord-ouest de Bonifacio ; d’après Paradis et al., 2002, tableaux 8 et 9 ; Paradis et al., 2008, tableau 3 : relevés 1 à 4) qui n’avait été qu’évoquée ou citée sous le syntaxon n° 104 dans la synthèse de 2013. Alors que la colonne 91 synthétise des relevés provenant d’un seul site, ceux de la colonne 91bis proviennent de deux sites assez distants et, à ce titre, mérite le rang d’association : Junco pygmaei-Bellidetum annuae B. Foucault, Paradis, Lorenzoni & Pozzo di Borgo ass. nov. hoc loco, typus nominis hoc loco : composante thérophytique du relevé 5 du tableau 8 in Paradis et al. (2002, Bull. Soc. Bot. Centre-Ouest, NS, 33 : 170).

Dans la synthèse de 2013 (repris dans le tableau 4 : colonnes A.2.1 et A.2.2), l’Agrostion pourretii et le Crassulo vaillantii-Lythrion borysthenici, deux alliances de végétation oligotrophile amphibie de bas niveau topographique, sont rapprochés, notamment par la présence partagée de Lythrum borysthenicum et l’absence ou la rareté de taxons eutrophiles des Elatino-Cyperetalia fusci et de taxons oligotrophiles des Nanocyperetalia flavescentis ; on peut se demander alors s’il ne faudrait pas introduire un troisième ordre pour distinguer cette végétation oligotrophile de bas niveau topographique caractérisée par Lythrum borysthenicum, Lotus angustissimus et différenciée par Polypogon maritimus, ainsi que par la rareté des taxons caractérisant les deux autres ordres : Lythretalia borysthenici ord. nov. hoc loco, typus nominis hoc loco : Crassulo vaillantii-Lythrion borysthenici B. Foucault 1988 (Diss. Bot. 121 : 86). L’introduction de ce nouvel ordre permet de résoudre plus élégamment la difficulté, déjà évoquée dans la synthèse de 1988 (en p. 90), du placement du Crassulo-Lythrion borysthenici en évitant d’avoir recours au terme oscillant (ibid. : 92) pour qualifier cette dernière alliance « hésitant » entre les deux ordres alors connus. Finalement il semble bien que cette alliance et l’Agrostion pourretii soient deux unités vicariantes.

Plus globalement, le tableau 4 actualise jusqu’au niveau alliance la synthèse de la classe des JUNCETEA BUFONII :

  • Elatino triandrae-Cyperetalia fusci Foucault 1988, avec Eleocharition ovatae G. Phil. 1968 nom. mut. hoc loco (colonne A.1.1), Crypsion schoenoidis Braun-Blanq. ex Rivas Goday 1956 nom. mut. hoc loco (A.1.2), Lythrion tribracteati Rivas Goday & Rivas Mart. ex Rivas Goday 1970 (A.1.3), Elatino triandrae-Damasonion alismatis B. Foucault 1988 (A.1.4)
  • Lythretalia borysthenici Foucault nov., avec Crassulo vaillantii-Lythrion borysthenici B. Foucault 1988 (A.2.1), Agrostion pourretii Rivas Goday 1958 (A.2.2)
  • Nanocyperetalia flavescentis Klika 1935, avec Cicendio filiformis-Solenopsion laurentiae Brullo & Minissale 1998 (A.3.1), Cicendion filiformis (Rivas Goday 1961) Braun-Blanq. 1967 (A.3.2), Radiolion linoidis Pietsch 1973 (A.3.3), Nanocyperion flavescentis Libbert 1932 (A.3.4), Centaurio pulchelli-Blackstonion perfoliatae B. Foucault 1988 (A.3.5).

1.3. Des végétations de Sicile

Brullo et al. (2022) viennent de publier une importante synthèse sur la végétation de mares temporairers de Sicile, malheureusement selon le paradigme classique associé au concept d’Isoeto-Nanojuncetea. Notamment le schéma synsystématique suivi par ces auteurs masque complètement les facteurs topographiques et trophiques mis en évidence dans les études systémiques de 1988. Plusieurs de ces syntaxons sont définis à partir de relevés provenant d’un site unique ; d’autres sont définis à partir de sites distincts, mais montrent un fort effet de parenté (de Foucault, 2020). Dans la suite de cette revue, tout en respectant le choix des auteurs, on analysera quelques-uns des syntaxons cités dans cette synthèse sicilienne ; les unités syntaxonomiques supérieures citées sont celles du paragraphe précédent.

Le Pulicario graecae-Isolepidetum cernuae Brullo & Di Martino 1974 (Brullo et al., 2022, tableau A3, onze relevés) apparaît comme un intermédiaire entre Elatino-Damasonion alismatis (par Damasonium polyspermum) et Cicendio-Solenopsion laurentiae (Isolepis cernua, Centaurium maritimum).

L’Isoeto durieui-Ranunculetum parviflori Brullo, Di Martino & Marcenò 1977 (Brullo et al., 2022, tableau A4, neuf relevés), outre le fait qu’il présente un nouveau cas de mare temporaire méditerranéenne à Ranunculus parviflorus (cf. supra, § Une végétation du Maroc nord-occidental, Anthoxantho ovati-Trifolietum tomentosi), montre une végétation vivace à Isoetes duriei V, Mentha pulegium III, Carex distachya III, Allium subhirsutum II à rapprocher de l’OphioglossoIsoetion histricis.

Les Lythro hyssopifoliae-Elatinetum macropodae Brullo, Sciandrello, Tavilla & Minissale in Brullo et al. 2022 (Brullo et al., 2022, tableau A6, vingt-cinq relevés) et Bulliardio-Elatinetum campylospermae Brullo, Sciandrello, Minissale, Cambria, Ilardi & Giusso in Brullo et al. 2022 (Brullo et al., 2022, tableau A7, quinze relevés) sont intermédiaires entre le Lythro-Damasonion alismatis (par Elatine macropoda = E. campylosperma) et Crassulo-Lythrion borysthenici (Crassula vaillantii) ; on peut d’ailleurs considérer que la seconde association n’est qu’une variation à Juncus capitatus et J. hybridus de la première.

Avec Eleocharis palustris, l’Isoetetum todareanae Brullo & Ilardi in Brullo et al. 2022 (tableau A8), décrit d’un site unique, se place assez bien dans l’Antinorio agrostideae-Isoetion velatae ; la composante thérophytique se réduit à quatre thérophytes, dont Blackstonia acuminata.

La composante vivace du Ranunculo lateriflori-Antinorietum insularis Brullo, Grillo & Terrasi 1976 (Brullo et al., 2022, tableau A10, neuf relevés) est caractérisée par Mentha pulegium V, Eryngium pusillum IV, Isoetes sicula IV, I. velata III ; elle est donc bien plus originale que ne le reflète son nom basé sur des thérophytes et se rattache à l’Antinorio agrostideae-Isoetetum velatae. La composante thérophytique se place bien dans le Crassulo-Lythrion borysthenici.

Le Myosuro minimi-Ranunculetum lateriflori Raimondo 1980 (Brullo et al., 2022, tableau A11, onze relevés) entre plutôt bien dans le Crassulo-Lythrion borysthenici.

La composante thérophytique du Ranunculetum pratensi-lateriflori Brullo, C. Brullo & Giusso in Brullo et al. 2022 (Brullo et al., 2022, tableau A12, onze relevés) se place très bien dans le Crassulo-Lythrion borysthenici, alors que la composante vivace, à Ranunculus pratensis, Oenanthe fistulosa, Barbarea bracteosa…, décrit une prairie inondable des Deschampsietalia cespitosae (Oenanthion fistulosae ?).

Le Ranunculo lateriflori-Callitrichetum brutiae Brullo & Minissale 1998 (Brullo et al., 2022, tableau A13, sept relevés) relève clairement du Crassulo-Lythrion borysthenici.

La composante vivace du Junco pygmaei-Pilularietum minutae Minissale, Molina & Sciandrello 2017 (Brullo et al., 2022, tableau A15, quatorze relevés) est plutôt homotone : Pilularia minuta V, Mentha pulegium V, Isoetes velata IV, Eryngium pusillum II, Eleocharis palustris II, Isoetes duriei +, et se place bien dans l’Antinorio agrostideae-Isoetion velatae. Au contraire, la composante thérophytique est plutôt hétérotone, on peut opposer

  • les relevés 1 à 9 : Crassula vaillantii V, Callitriche brutia V, Juncus pygmaeus V, Lythrum hyssopifolia V, Juncus hybridus IV, Poa infirma IV, Ranunculus lateriflorus II, Polypogon subspathaceus II, Pulicaria vulgaris II, Anthemis cotula II, Plantago lagopus I, Cerastium glomeratum I ; syntaxon à rapprocher du Crassulo-Lythrion borysthenici;
  • les relevés 10 à 14 : Solenopsis laurentia *hyblea V, Cicendia filiformis V, Ranunculus lateriflorus V, Lotus angustissimus V, Juncus pygmaeus V, Lythrum hyssopifolia V, Juncus hybridus V ; à rapprocher plutôt du Cicendio-Solenopsion laurentiae.

Le Pilulario minutae-Mysotidetum siculae Brullo, Cambria, Ilardi & Minissale in Brullo et al. 2022 (Brullo et al., 2022, tableau A16, deux relevés d’un site unique) combine une composante vivace (Pilularia minuta 2, Isoetes velata 2, Romulea ramiflora 2, Eleocharis palustris 2, Alisma lanceolatum 2, Carex divisa 2, Glyceria notata 2, plus Ranunculus ophioglossifolius 2), à rattacher à l’Antinorio agrostideae-Isoetion velatae, et une composante thérophytique paucispécifique (Myosotis sicula 2, Lotus parviflorus 2, Elatine macropoda 2, Polypogon subspathaceus 2).

L’Anagallido parviflorae-Molinerielletum minutae Brullo, Scelsi, Siracusa & Tomaselli 1998 (Brullo et al., 2022, tableau A18, vingt-quatre relevés provenant d’un seul site) combine une composante vivace à Isoetes duriei V, Romulea ramiflora V, Allium obtusiflorum IV, Ranunculus paludosus III, Poa bulbosa III, Linum usitatissimum *angustifolium III, Moraea sisyrinchium II (Ophioglosso-Isoetion histricis) et une composante thérophytique à taxons hygrophiles (Molineriella minuta V, Lysimachia arvensis *parviflora V, Lythrum hyssopifolia V, Polypogon subspathaceus V, Bellis annua V, Juncus bufonius V, J. capitatus V, J. pygmaeus IV, Lotus angustissimus IV, L. conimbricensis IV, Crassula vaillantii IV, Centaurium maritimum III, Juncus hybridus I) et taxons plus mésophiles à mésoxérophiles de diverses affinités (Coleostephus myconis V, Poa infirma V, Euphorbia exigua IV, Medicago turbinata IV, Plantago lagopus IV, Scorpiurus muricatus IV, Moenchia erecta III, Sagina apetala III, Logfia gallica III, Paronychia echinulata III, Anthemis arvensis III, Crassula tillaea II, Hypochaeris achyrophorus II, Parentucellia latifolia I, Saxifraga tridactylites r, Silene gallica r) relevant du Cicendio-Solenopsion laurentiae.

Le Kickxio cirrhosae-Solenopsietum gasparrini Brullo & Minissale 1998 (Brullo et al., 2022, tableau A19, douze relevés) peut se différencier en une composante vivace de l’OphioglossoIsoetion histricis et une riche composante thérophytique relevant clairement du Cicendio-Solenopsion laurentiae.

Le Solenopsietum mothianae Brullo, Giusso, Minissale & Sciandrello in Brullo et al. 2022 (Brullo et al., 2022, tableau A20, cinq relevés d’un site unique) est une association surtout thérophytique relevant du Cicendio-Solenopsion laurentiae.

Le Solenopsio gasparrinii-Isoetetum siculae Brullo, Cambria, Ilardi & Minissale in Brullo et al. 2022 (Brullo et al., 2022, tableau A21, vingt-et-un relevés) révèle une composante vivace à Isoetes sicula V, Romulea ramiflora V, Mentha pulegium V, Linum usitatissimum *angustifolium V, Ophioglossum lusitanicum III, Carex divisa II, Serapias lingua II, Ranunculus paludosus II, Triglochin laxiflora I, relevant de l’OphioglossoIsoetion histricis, et une composante thérophytique relevant du Cicendio-Solenopsion laurentiae.

Le Trifolio micheliani-Agrostietum pourretii Cambria & Brullo in Brullo et al. 2022 (Brullo et al., 2022, tableau A23, six relevés) est bien placé dans l’Agrostion pourretii.

Comme proposé dans notre synthèse de 2013, l’Heliotropio supini-Heleochloetum schoenoidis Rivas Goday 1956 et le Glino lotoidis-Verbenetum supinae Rivas Goday 1964 (Brullo et al., 2022, tableaux A26 et A27) relèvent clairement du Crypsion schoenoidis.

Enfin le Damasonio bourgaei-Crypsietum aculeatae Rivas Mart. & M.J. Costa in Rivas Mart. et al. 1980 (Brullo et al., 2022, tableau A23, trente-et-un relevés), le Ranunculo trilobi-Lythretum tribracteati Brullo & Sciandrello 2022 (Brullo et al., 2022, tableau A32, six relevés) et le Pulicario graecae-Damasonietum bourgaei Minissale, Santo & Sciandrello 2011 (Brullo et al., 2022, tableau A33, six relevés) trouvent mieux leur place dans les Crypsietea aculeatae.

1.4. Une végétation du Kazakhstan

Parmi les associations citées pour le Crypsion schoenoidis dans le cadre de la synthèse des Juncetea bufonii (de Foucault, 1988, 2013), il manque notamment le Marisco hamulosi-Crypsietum schoenoidis Taran 1993 décrit du Black Irtysh (Kazakhstan oriental ; Taran, 1993), nom muté ici en Cypero hamulosi-Crypsietum schoenoidis et ainsi caractérisé (sur dix relevés) :

  • association et unités supérieures : Crypsis schoenoides V, Lindernia palustris V, Cyperus hamulosus V, michelianus V, C. fuscus IV, Spergula diandra IV, Schoenoplectus supinus III, Potentilla supina III, Lythrum borysthenicum II, Limosella aquatica II, Juncus sphaerocarpus II, Gnaphalium rossicum II, Herniaria polygama II, Cyperus glomeratus I, Juncus ranarius I, Crypsis aculeata I, Mollugo cerviana I, Lythrum linifolium +,
  • BIDENTETEA TRIPARTITAE : Echinochloa crus-gallii V, Eragrostis suaveolens IV, Rorippa palustris IV, Bidens tripartita II, Oxybasis glauca II, Persicaria lapathifolia +, Rumex maritimus +.

L’auteur rattachait son association à l’ElatinoEleocharition ovatae W. Pietsch 1973, nom illégitime postérieur à l’Eleocharition ovatae G. Phil. 1968, mais est finalement mieux placé dans le Crypsion schoenoidis. La végétation vivace associée est caractérisée par Eleocharis palustris, Alisma plantago-aquatica, Calamagrostis pseudophragmites, Mentha arvensis, Inula britannica, Gratiola officinalis… et paraît relever du Mentho arvensis-Eleocharition palustris B. Foucault in B. Foucault & Catteau 2012 (de Foucault & Catteau, 2012) ; elle peut être décrite ici sous le nom d’Eleocharito palustris-Inuletum britannicae B. Foucault & Taran ass. nov. hoc loco, typus nominis hoc loco : composante vivace du relevé 7 du tableau in Taran (1993, Sibirsk. Biol. Zhurn. 5 : 80), soit (30 %, 2,5 m², 7 taxons) : Inula britannica 1, Plantago major *pleiosperma +, Eleocharis palustris r, Gratiola officinalis r, Mentha arvensis r, Calamagrostis pseudophragmites r, Salix alba j r.

1.5. Des végétations orophiles

La classe des Juncetea bufonii s’appauvrit considérablement en haute altitude ; parmi les thérophytes hygrophiles orophiles, on peut citer Rorippa islandica (à ne pas confondre avec R. palustris) qui a fait l’objet d’un rattachement phytosociologique de la part de Béguin (2011) à une association dénommée « Veronico tenellae-Rorippetum islandicae » ; cette définition n’est guère satisfaisante car Veronica tenella est un taxon vivace (inclus actuellement dans V. bellidioides). Malheureusement, aucune autre thérophyte n’accompagne le Rorippa caractéristique dans le tableau de l’auteur suisse ; il en est de même des relevés provenant du Queyras et de Maurienne (de Foucault, 2018a). Pourtant, il peut en exister comme le montre la note floristique de Terrisse (1996), qui cite Gnaphalium uliginosum, mais sans relevé précis qui permettrait de valider un nom plus satisfaisant. Il faudrait poursuivre les investigations sur les berges des lacs et barrages de montagne ou suivre leur mise en assec.

Dans cet ordre d’idée de végétation thérophytique hygrophile orophile, on peut aussi évoquer la végétation à Limosella aquatica décrite par Quézel (1967 : 213 ; aucune donnée sur l’altitude des relevés) du Gamila (un sommet du massif grec du Pinde, culminant à 2 497 m), réduite à L. aquatica 4 (sur quatre relevés), L. tenella (endémique du Gamila) 3, Juncus bufonius 3, taxons accompagnés de Poa annua 4 et Polygonum aviculare s. l. 4, la végétation vivace associée paraissant correspondre à une forme déstructurée du Veronico humifusae-Blysmetum compressi Quézel 1967 (sub association à Blysmus compressus et Veronica balcanica) ; cette association thérophytique ne paraît pas avoir été définie par Quézel lui-même : Limoselletum tenello-aquaticae Quézel & B. Foucault ass. nov. hoc loco, typus nominis hoc loco : relevé 2 du tableau in Quézel (1967, Vegetatio XIV : 213), à placer dans les Elatino-Cyperetalia fusci dont Limosella aquatica est caractéristique et dans une alliance originale, le Limosellion tenellae all. nov. hoc loco, caractérisée par Limosella tenella et L. aquatica, avec absence de nombreux thérophytes de plus basse altitude, typus nominis hoc loco : Limoselletum tenello-aquaticae Quézel & B. Foucault nov.

 

Pour achever cette première partie, on peut enfin évoquer la végétation française à Lythrum thesioides, taxon protégé au niveau national et coté EN (en danger) sur les listes rouges européenne et nationale. Si les stations actuelles françaises en sont assez bien connues (Gazaix, 2019 ; Gazaix et al., 2019), ses affinités phytosociologiques ne sont toujours pas éclaircies. D’après des données historiques et d’autres consécutives à des études de la banque de semences, ce taxon semble associé à Damasonium polyspermum, Elatine macropoda, Lythrum hyssopifolia, L. tribracteatum, Juncus sphaerocarpus, J. pygmaeus, Schoenoplectus supinus (Gazaix, 2019 ; Fontès, in Collectif, 2022 : 19) ; cette flore est confirmée par les données récentes de « Campuget » (commune de Manduel, Gard) rapportées par M. Klesczewski (courriel du 9 mai 2022), avec en plus Cyperus fuscus et Ranunculus sardous, ce qui oriente vers les Elatino-Cyperetalia fusci et l’Elatino triandrae-Damasonion alismatis.

 

2. Les Crypsietea aculeatae

Enfin, toujours dans la synthèse de 2013 des Juncetea bufonii, le syntaxon n° 45 (groupement à Crypsis-Heleochoa Oberd. 1952 et non « Crypsio aculeatae-Heleochloetum schoenoidis » comme indiqué par Pietsch, 1973) est mieux placé dans les Crypsietea aculeatae (de Foucault, 2021) ; il correspond à la liste suivante (d’après Oberdorfer, 1952, tableau 10, 5 relevés/liste) :

  • CRYPSIETEA ACULEATAE: Crypsis aculeata V, schoenoides III, Schenkia spicata (photo 4) III, Polypogon monspeliensis III, Pholiurus pannonicus II, Hordeum marinum I, Spergula marina I,
  • autres taxons : Crypsis alopecuroides II, Echinochloa crus-galli II, Lythrum hyssopifolia II, Heliotropium supinum II, Eragrostis minor II, Portulaca oleracea II, Polygonum aviculare s. l. II, Pulicaria vulgaris I, Glinus lotoides

Photo 4. Schenkia spicata ; © B. de Foucault.

Il peut être ainsi validé : Schenkio spicatae-Crypsietum aculeatae Oberd. ex B. Foucault ass. nov. hoc loco, typus nominis hoc loco : composante thérophytique du relevé 440 du tableau 10 in Oberdorfer (1952, Vegetatio III : 345).

 

3. Les Oryzetea sativae

La végétation thérophytique subhydrophile des rizières est classiquement rangée dans les Oryzetea sativae et ne comprend qu’un petit nombre d’associations, certaines nommées à partir d’Oryza sativa (photo 5). L’intégration d’un taxon cultivé dans la nomenclature phytosociologique d’une association commensale de la culture n’est pas très satisfaisante dans une perspective phytosociologique moderne, comme si on utilisait Triticum aestivum dans la nomenclature de la végétation commensale d’une culture de blé tendre ; toutefois on ne reviendra pas ici sur ce nom.

Photo 5. Oryza sativa ; © B. de Foucault.

On peut décliner ainsi les syntaxons connus de cette classe, sur la base du tableau synthétique 5.

 

ORYZETEA SATIVAE A. Miyaw. 1960 (Vegetatio IX : 393)

Typus classis : Cypero difformis-Echinochloetalia oryzoidis O. Bolòs & Masclans 1955 (Collect. Bot. IV : 426).

À part le taxon cultivé Oryza sativa, la classe est caractérisée par Cyperus difformis, Echinochloa hispidula, Rotala indica (taxon absent des rizières de France métropolitaine).

 

Ordre unique. Cypero difformis-Echinochloetalia oryzoidis O. Bolòs & Masclans 1955 (Collect. Bot. IV : 426)

Typus ordinis : Oryzo sativae-Echinochloion oryzoidis O. Bolòs & Masclans 1955 (Collect. Bot. IV : 426).

 

Alliance OEo. Oryzo sativae-Echinochloion oryzoidis O. Bolòs & Masclans 1955 (Collect. Bot. IV : 426)

Typus allianciae : Cypero difformis-Ammannietum coccineae O. Bolòs & Masclans 1955 (Collect. Bot. IV : 417).

Alliance de rizières euroméditerranéennes caractérisée ou différenciée de la suivante par Echinochloa oryzoides, Lindernia dubia, Schoenoplectus mucronatus (photo 6), Polypogon monspeliensis, Ammannia coccinea.

OEo1. Cypero difformis-Ammannietum coccineae O. Bolòs & Masclans 1955 ; a – de Catalogne (de Bolòs & Masclans, 1955, tableau I) ; b – de l’Aude (de Foucault, 2018b, tableau 6) ; c – de Camargue (liste d’après Tallon, 1950 et 1960).

OEo2. Oryzo sativae-Cyperetum difformis W. Koch 1954 ; a – d’après Pignatti (1957, repris in de Foucault, 2013, tableau 3 : colonne 19) ; b – d’après Koch (1954, tableau 5) ; c – d’après Piccoli & Gerdol (1981, tableau III).

Photo 6. Schoenoplectus mucronatus ; © B. de Foucault.

Depuis Carretero (1989), on a actuellement tendance à synonymiser l’association de Catalogne et de France méditerranéene avec l’Oryzo sativae-Echinochloetum cruris-galli Soó ex Ubrizsý 1948 ; pourtant le placement du tableau d’Ubrizsý (1948 : 26) en colonne OEc du tableau 5 montre que cette synonymie devrait être évitée, ce syntaxon étant mieux placé dans les Juncetea bufonii (au sein des Elatino-Cyperetalia fusci ; alliance ?). On peut d’ailleurs s’interroger sur la valeur du tableau 1 de Carretero quand on voit que, par exemple dans la colonne 2, Ammannia coccinea est indiqué R (au lieu de V dans le tableau de de Bolòs & Masclans, 1955), Cyperus difformis indiqué I (au lieu de V), Lindernia dubia indiqué R (au lieu de II), que le tableau 5 d’Ubrizsý (1948) n’y est pas reporté, ou avec des erreurs (si c’est la onzième colonne du tableau 1 de Carretero, Cyperus difformis et Echinochloa oryzoidis sont indiqués III alors que ces taxons manquent dans ce tableau de Hongrie)…

 

Alliance LEh. Ludwigio prostratae-Echinochloion hispidulae all. nov. hoc loco

Typus nominis hoc loco : Blyxo coreanae-Pontederietum plantagineae A. Miyaw. 1960 (Vegetatio IX : 376, sub Blyxo coreanae-Monochorietum plantagineae).

Initialement la classe des Oryzetea sativae a été décrite des rizières du Japon (Miyawaki, 1960) et les associations correspondantes paraissent relever d’une alliance différente de la précédente et non distinguée par le phytosociologue japonais ; la synthèse des quatre syntaxons connus du Japon mène effectivement à isoler une alliance originale caractérisée ou différenciée de l’alliance précédente par Ludwigia prostrata, Lindernia palustris, Elatine triandra, Pontederia plantaginea, Dopatrium junceum.

LEh1. Elatino triandrae-Echinochloetum hispidulae B. Foucault & A. Miyaw. ass. nov. hoc loco (Miyawaki, 1960, tableau 4, sub Alismetum canaliculati), typus nominis hoc loco : composante thérophytique du relevé 129 du tableau 4 in Miyawaki (1960, Vegetatio IX : 370) ; nord à sud-est d’Hokkaido.

LEh2. Echinochloo hispidulae-Eriocauletum robusti B. Foucault & A. Miyaw. ass. nov. hoc loco (Miyawaki, 1960, tableau 5, sub Alismetum orientalis), typus nominis hoc loco : composante thérophytique du relevé 117 du tableau 5 in Miyawaki (1960, Vegetatio IX : 372) ; centre d’Hokkaido à nord de Honshu.

LEh3. Dopatrio juncei-Pontederietum plantagineae B. Foucault & A. Miyaw. ass. nov. hoc loco (Miyawaki, 1960, tableau 6, sub Sagittario-Monochorietum plantagineae), typus nominis hoc loco : composante thérophytique du relevé 25 du tableau 6 in Miyawaki (1960, Vegetatio IX hors texte) ; de Honshu à Kyushu.

LEh4. Blyxo coreanae-Pontederietum plantagineae A. Miyaw. 1960 (Miyawaki, 1960, tableau 7, sub Blyxo coreanae-Monochorietum plantagineae), du sud d’Okinawa, association reliée à un gazon amphibie à Eleocharis acicularis (présence III sur 41 relevés), Marsilea crenata (II), Bolboschoenus planiculmis (II), Isachne globosa (II), Hydrocotyle ramiflora (I)… (homologue de la végétation des Littorelletea uniflorae ?).

Il est étrange que la végétation des rizières sud-coréennes décrite par Sung-Yeol Kim et al. (2019) n’ait guère de liens synfloristiques avec les Oryzetea sativae alors qu’elles sont situées approximativement à la même latitude (peut-être un effet de l’altitude, les rizières étudiées en Corée s’étendant sur un plateau à plus de 500 m).

 

4. Conclusion

Cette contribution a donc permis de décrire cinq associations, l’alliance du Limosellion tenellae et l’ordre des Lythretalia borysthenici au sein des Juncetea bufonii, une association au sein des Isoetetea velatae, une au sein du Mentho arvensis-Eleocharition palustris (Deschampsietalia cespitosae, Agrostietea stoloniferae), une au sein des Crypsietea aculeatae, deux au sein des Tuberarietea guttatae, trois associations et l’alliance du Ludwigio prostratae-Echinochloion hispidulae (pour le Japon) au sein des Oryzetea sativae.

Dans cet ordre d’idées, il faut enfin signaler une petite correction à faire à propos du Bunio corydalini-Morisietum monanthi (de Foucault, 2019) : ce n’est pas la thérophyte Solenopsis laurentia qui participe à la phytocénose amphibie corse, mais la vivace S. corsica qui entre donc bien dans la combinaison floristique caractéristique du Bunio-Morisietum.

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Remerciements

Un grand merci à la Bibliothèque botanique et phytosociologique de France localisée au Conservatoire botanique national de Bailleul pour l’aide à la recherche de documents.