Carnets botaniques

Jour 05 (11 mai 2023), à la découverte de Camps-sur-l’Agly, 11 km, 400 m D+, 260 m D-

Tout le monde range les affaires de bivouacs. Manon revient avec Blondin et Budy. On charge les ânes de nos affaires et de quelques produits locaux que nous avons achetés au marché nocturne. Au cinquième jour de marche, le groupe est bien rodé sur le timing et aucun d’entre nous ne souffre de la marche. Le corps trouve souvent son rythme de croisière. On lève les voiles en vérifiant toujours que le lieu est resté propre, c’est l’esprit de la randonnée en itinérance. La météo n’est pas au beau fixe, mais ne semble pas menaçante. En sortie de village, nous parcourons les prairies dont les talus nous régalent de nouveaux taxons avec Lychnis flos-cuculi, Orobanche minor, Onobrychis viciifolia, Lathyrus pratensis, L. aphaca et encore Serapias lingua et S. vomeracea.

Carte 1. Randonnée des hautes Corbières (82,5 km, 3 250 D+/-) ; B. Gilbert, CC-BY-NC-ND.

Un pont nous permet de passer sur l’autre berge du Verdouble. Nous découvrons Lysimachia ephemerum, déterminante ZNIEFF Occitanie, protection nationale et plante patrimoniale audoise, en feuilles, mais sa grande tige à feuilles verticillées est très reconnaissable bien qu’il nous ait fallu plusieurs minutes pour nous en assurer. Aucun d’entre nous n’avait encore rencontré cette rareté endémique de la péninsule Ibérique qui fait intrusion de manière marginale dans notre pays. Nous remontons le Verdouble dans une ambiance agréablement fraîche avec des Iris foetidissima, Daphne laureola, Lysimachia vulgaris, Equisetum telmateia et Eupatorium cannabinum subsp. cannabinum. Un passage à gué en eau nous oblige à retirer les chaussures pour traverser, mais dans l’actio, les ânes ont finalement raison de notre périlleuse stratégie en nous faisant rebrousser chemin pour trouver un accès plus à leur convenance. Bourriques !

L’itinéraire bis rattrape une piste qui traverse une colline. La terre rougeâtre est extrêmement boueuse et nous freine dans la pente. Les bordures en herbe nous aident un peu dans notre progression, mais le dernier de la file n’est pas exempté de difficulté. Il y a là encore des Cistus albidus, mais sans son parasite Cytinus hypocistis subsp. clusii, dommage ! Et C. salviifolius. On s’arrête deux minutes pour refaire un point phonétique devant Carex distachya pour ne pas le (re)confondre avec C. disticha. En surplomb du ruisseau de la Caïrolo, nous débarquons sur une vaste pelouse avec Barbarea sp., Veronica orsiniana, Gladiolus sp., Anacamptis pyramidalis, Orchis anthropophora, Genista hispanica subsp. hispanica et G. scorpius, Spartium junceum, Lotus hirsutus, Orobanche gracilis, Plantago media, Teucrium aureum et Lotus dorycnium, que nous observons très furtivement pour ne pas déranger les locataires du site qui occupent caravanes et pavillons rudimentaires.

Alors que nous débouchons sur une nouvelle route, une montagne isolée dans notre ligne de mire nous fait de l’œil comme jamais. Le pech de Bugarach, emblème des hautes Corbières, signera la fin de notre aventure par une ascension singulière. Son village a été notre point de départ et sera notre point de retour. Prendre la direction directe de la montagne nous rapproche pas à pas du terme de notre belle aventure, nous en prenons tous conscience maintenant. Nous herborisons le fossé droit de la route ainsi que le talus qui le surplombe, mélangeant de ce fait communautés messicoles, pelouses basiphiles et encore garrigues (planche 1), avec Orobanche gracilis, Lonicera etrusca, Ophrys lutea, Onobrychis supina, Santolina benthamiana, Pallenis spinosa, Potentilla reptans, Euphorbia helioscopia, Coriaria myrtifolia, Asperula cynanchica, Sinapis alba, Crepis sancta, C. vesicaria subsp. taraxacifolia, Genista scorpius, Rubus sp., Urospermum dalechampii, Teucrium aureum, T. chamaedrys, Poterium sanguisorba, Leucanthemum sp., Euphorbia exigua subsp. exigua, Poa bulbosa var. vivipara, Spartium junceum, Petrosedum sediforme, Thymus vulgaris, Picris hieracioides, Plantago lanceolata, Sonchus asper, Geranium molle, Cornus sanguinea, Lotus dorycnium, Ficus carica, Linum usitatissimum subsp. usitatissimum, Bromopsis erecta, Clematis flammula, Eryngium campestre, Galium maritimum, Hypericum perforatum, Blackstonia sp., Pilosella sp., Hippocrepis comosa, Orchis anthropophora, Centaurea calcitrapa, Draba verna, Chaenorhinum minus subsp. minus, Allium roseum, Lysimachia foemina, Reseda phyteuma, Ranunculus arvensis avec ses magnifiques fruits et enfin l’Adonis goutte-de-sang, Adonis annua, qui tient son nom de l’incroyable couleur de ses pétales, en deux points.

Planche 1. Adonis annua (1 et 2), Orobanche minor (3), Chaenorhinum minus subsp. minus (4), Ranunculus arvensis (5) ; B. Gilbert (3 et 5), F. Saboureau (2 et 4), S. Corre (1), CC-BY-NC-ND. 

Au bout de cette route qui nous mène directement à Cubières-sur-Cinoble, nous nous arrêtons sur les tables de pique-nique pour la collation du midi. La pause est vite abrégée par les nuages inquiétants et de lourdes gouttes qui tombent sur la nourriture. Nous nous abritons vite sous un arrêt de bus pendant une bonne demi-heure, le temps que les trombes d’eau se déchaînent sur le village. L’averse passe et les rayons du soleil percent le ciel en nous réchauffant la peau. Nous repartons en direction de Camps-sur-l’Agly en contournant le Sarrat de Calmet par le sud, rencontrons encore quelques plantes intéressantes, notamment Carthamus mitissimus et Stachys heraclea en feuilles, Ligustrum vulgare, Aphyllanthes monspeliensis, Osyris alba, Teucrium aureum, Linum narbonense, Ophrys scolopax, Genista scorpius, Gladiolus sp., Orobanche gracilis, Veronica orsiniana, Orchis militaris, Serapias lingua, S. vomeracea, Anacamptis pyramidalis, Carex humilis, Eryngium campestre.

Un petit ponton sur notre gauche et une prairie de fauche en face de nous regorge de plantes. À la volée, nous notons Ophrys funerea, Lotus corniculatus, Coronilla scorpioides, Trifolium campestre, Lotus maritimus, Carex flacca, Serapias vomeracea, Veronica orsiniana, Bellis perennis, Sherardia arvensis et, au plus proche du ruisseau, une végétation plus fraîche et forestière avec Ranunculus bulbosus, Mentha aquatica, Vicia sepium, Euphorbia amygdaloides subsp. amygdaloides, E. characias subsp. characias, Ilex aquifolium, Eupatorium cannabinum subsp. cannabinum, Melica uniflora, Hepatica nobilis, Ligustrum vulgare, Trifolium pratense. La carte dépliée, nous cherchons un moyen efficace pour traverser l’Agly avec Blondin et Budy. Il semblerait que la prairie ne nous mène nulle part. Obligation de rebrousser chemin pour tenter le passage du ponton.

Planche 2. Cephalanthera damasonium (1), Ophrys lutea (2), Ophrys funerea (3) ; F. Saboureau, CC-BY-NC-ND.

Le ponton de bois n’est large que d’un mètre tout au plus et surplombe le ruisseau qui débite franchement à deux mètres en dessous. On étudie un peu le lieu et notre stratégie, les ânes perçoivent notre inquiétude. Benjamin sort la botte de carottes et se positionne en tête devant Blondin, le plus fougueux, pendant que Boris et Manon retirent des vêtements pour imaginer une sorte d’œillère. Budy est escorté par Sarah et Flavien. Yvon ferme la formation pour user du bâton, on s’encourage. Tout le monde retient son souffle. Un, deux, trois. On y va ! On pousse des encouragements. Yvon frappe. Boris et Flavien donnent une impulsion et Blondin suit Benjamin (la carotte) d’assez près. Une patte sur la première planche en bois. La bête freine le rythme, hésite, mais ne perd pas pour autant son élan. Allez ! Budy suit. Blondin tourne le museau vers les eaux. Flavien manque de tomber à l’eau. Conscient du danger auquel il fait face, Blondin accélère d’un seul coup la cadence et se met en course. Il dépasse le ponton. Budy hennie de surprise, il braque net. Manon et Sarah encouragent comme jamais Allez ! Allez ! Elles tirent. Yvon pousse de toute ses forces sur l’arrière-train. Il ne bouge plus. La carotte n’a aucun effet. Il recule même et s’extrait de la plateforme, il a la frousse et court dans le sens inverse, s’échappant des mains des filles. Elles le retrouvent plus loin dans la prairie en train de se remettre de toutes ses émotions.

Le groupe est maintenant séparé en deux. Manon, Sarah et Yvon récupèrent les brides de Budy qui se met à braire à la vue de son ami maintenant inaccessible. Blondin répond immédiatement. Nous espérons pendant un instant que Blondin parvienne à motiver son compagnon de route, mais après plusieurs tentatives infructueuses, nous nous rendons à l’évidence que nous allons devoir poursuivre indépendamment. Nous nous donnons rendez-vous à Camps-sur-l’Agly dans environ deux heures. Manon, Sarah, Yvon et Budy empruntent le flanc ouest de la Sarrat de Calmet. Benjamin, Boris, Flavien et Blondin poursuivent à travers une crête forestière en direction de Laudié et du Sarrat Gros.

Sur la piste forestière, nous herborisons tout ce que nous trouvons. Cytisophyllum sessilifolium, Primula veris, Anthoxanthum odoratum, Hedera helix, Rubia peregrina subsp. peregrina, Festuca sp., Ligustrum vulgare, Galium aparine, Cephalanthera damasonium, C. longifolia, Lotus hirsutus, Brachypodium sylvaticum, Cardamine hirsuta, Daphne laureola, Ruscus aculeatus, Hepatica nobilis, Cornus sanguinea, Acer campestre, Ribes alpinum, Euphorbia amygdaloides subsp. amygdaloides, Rubus sp., Crataegus monogyna, Buxus sempervirens, Lapsana communis subsp. communis, Carex flacca, Bryonia dioica, Ficaria verna subsp. grandiflora, Ilex aquifolium, Aegonychon purpurocaeruleum, Aria edulis, Viburnum lantana. Le boisement s’ouvre sur un chemin d’exploitation forestière, plus ouvert, il y a là la patrimoniale Medicago hybrida, Abies alba, Quercus ilex, Juniperus communis subsp. communis, Pinus nigra, Quercus pubescens, Coriaria myrtifolia, Acer monspessulanum, Clematis vitalba, Ranunculus bulbosus, Aphyllanthes monspeliensis et Muscari comosum. Blondin ne cesse de braire.

La piste caillouteuse monte sur la Sarrat de Calmet. Les falaises des gorges de Lafargue dominent à l’ouest. Pendant la descente qui mène directement sur la D 14 à l’entrée du village de Cubières-sur-l’Agly, on entend une première fois un âne de très loin. Budy, qui suit habituellement le mouvement sans geindre, commence à braire dans une lamentation irrépressible. Blondin et Budy maintiennent le lien du groupe malgré les kilomètres qui nous séparent. La départementale est la voie la plus rapide pour se rendre à Camps-sur-l’Agly. Les voitures et bus passent vite. On reste sur le bas-côté pour ne pas prendre de risque. Nous marchons sur près de 3 km pour rejoindre le village. Nous continuons sur le chemin d’exploitation forestière en passant le Sarrat Gros pour rejoindre le Roc d’en Benoit qui nous fait de l’œil. On espère pouvoir faire des observations botaniques sur le massif qui surplombe. Nous trouvons bien Hormathophylla saxigena qui niche dans la falaise, mais le reste de la végétation est plus commun : Lotus corniculatus, Rhinanthus minor, Muscari comosum, Asplenium adiantum-nigrum, Ribes alpinum, Helleborus foetidus, Arum italicum, Asplenium trichomanes, A. ceterach, Polypodium sp., Cardamine impatiens, Cornus sanguinea, Geranium robertianum, G. nodosum, Quercus ilex, Melica uniflora, Galium maritimum, Ranunculus bulbosus, Melittis melissophyllum, Globularia repens, Hedera helix, Sesleria caerulea, Amelanchier ovalis. La piste se termine sur une route que nous empruntons pour remonter vers le village. Nous trouvons du crottin sur le bitume qui nous pousse à croire que le reste de la bande est déjà arrivé.

Tout le monde se retrouve en haut du village et les ânes arrêtent de braire. Flavien et Benjamin insistent pour herboriser sur les pavements et falaises du château de Camps-sur-l’Agly (planche 3). Nous laissons pendant un temps Blondin et Budy sur une pelouse. Nous trouvons des plantes très intéressantes dans les interstices des roches du château, Hormathophylla saxigena évidemment, mais surtout une vingtaine de Saxifraga fragilis, une sub-endémique espagnole qui déborde dans les hautes Corbières, répartie sur toute la zone, avec Lonicera pyrenaica, curieusement non donnée dans le village. On photographie aussi Dianthus pungens, formant de belles touffes, Centranthus ruber et Erysimum cheiri.

Planche 3. Herborisation depuis le château de Camps-sur-l'Agly ; B. Gilbert, CC-BY-NC-ND.

Une fine pluie nous invite à reprendre notre route. Le couvert nuageux nous donne l’impression que la journée est à son terme. Il est tout de même tard. Nous partons pour rejoindre le hameau de la Bastide où nous avons réservé un gîte pour notre dernière nuitée. Sur le plan botanique, nous touchons à la fin de nos inventaires. On note néanmoins Lathraea clandestina, Cardamine impatiens, Geranium nodosum et Allium ursinum au bord du ruisseau des Pastressis. Boris et Flavien se mettent en prospection du Calotriton des Pyrénées, Calotriton asper, entre les blocs rocheux, mais sans succès.

Il se met bien à pleuvoir lorsque nous arrivons. Les ânes trouvent place dans une prairie en attendant de passer la nuit. Le gîte nous accueille chaleureusement. Il fait bon. Les matériaux en pierre et bois de la bâtisse apportent leur lot de consolation, tandis que l’averse frappe dehors. La chambre est composée de couches individuelles qui invitent à une bonne nuit de repos. La soirée est très conviviale. La grande table en bois se transforme en un grand plateau festif sur lequel chacun d’entre nous dépose le restant de sa nourriture. On mange et boit au-delà du raisonnable. On profite de la dernière soirée de notre itinérance. Demain, c’est l’apogée, le pech de Bugarach.

Planche 4. Prospection depuis le château de Camps-sur-l'Agly, Saxifraga fragilis (1), Lonicera pyrenaica (2), Hormathophylla saxigena (3), Dianthus pungens (4) ; B. Gilbert (3 et 4), F. Saboureau (1 et 2), CC-BY-NC-ND.

Jour 06 (12 mai 2023), à la découverte du pech de Bugarach, 14 km, 960 m D+, 1040 m D-

Il est très tôt, il fait encore nuit. Manon et Benjamin se lèvent discrètement et quittent la chambre sur la pointe des pieds pour ne pas réveiller les autres. Dans le salon, le reste du groupe a préparé toutes les affaires qui ne nous seront pas utiles pour l’ascension du pech de Bugarach. On récupère les ânes, on leste le matériel. Nous partons pour un aller-retour jusqu’au col du Linas, environ 8 km, deux heures de marche, pour y déposer les animaux avec le matériel non nécessaire à la journée. Nous les récupérerons en groupe, après l’ascension, lors de notre descente vers le village du Bugarach. À notre retour au gîte, Boris, Sarah, Flavien, Yvon sont prêts pour le décollage. La journée semble prometteuse. Il fait bon dehors bien qu’un peu venteux ! Benji, présent lors de notre première journée en itinérance, qui nous avait accompagnés jusqu’après la présentation des fours verriers, nous a retrouvés pour vivre ce dernier moment de marche avec nous. Nous saluons nos hôtes et partons !

Il nous manque quelque chose. C’est bizarre, l’absence de Blondin et de Budy nous marque un peu. Le rythme de marche est plus rapide. On s’abstient d’herboriser le temps de prendre un peu d’altitude et de changer de milieu. On croise Schoenus nigricans, Lotus maritimus, Neotinea ustulata à la va-vite. Le chemin conduit dans un boisement. Cette fois-ci, on reprend le carnet de montagne : Pinus sylvestris, Globularia nudicaulis, Cruciata glabra, Acer opalus subsp. opalus, Ribes alpinum, Lapsana communis subsp. communis, Fagus sylvatica, Hedera helix, Daphne laureola, Ruscus aculeatus, Fraxinus angustifolia, Crataegus monogyna, Hepatica nobilis, Sanicula europaea, Carex sylvatica, Brachypodium sylvaticum, Poa bulbosa var. vivipara, Geum sylvaticum et Fritillaria pyrenaica qu’on connaît plutôt bien maintenant. Le sentier forestier bifurque sur notre droite. La pente est abrupte. Le sol humifère est glissant. La concentration est de mise. On relève tout de même les plantes. En collectif, on se donne les noms latins de manière organisée pour prendre note. C’est ainsi qu’on progresse sur notre liste.

On complète dans la foulée avec (planche 5) Melica uniflora, Lonicera xylosteum, Phyteuma spicatum, Galium odoratum, Lathyrus linifolius, Viburnum lantana, Mercurialis perennis, Cardamine impatiens, Pseudoturritis turrita, Ajuga reptans, Cardamine hirsuta, Euphorbia amygdaloides subsp. amygdaloides, Hippocrepis emerus, Polystichum sp., Clematis vitalba, Asplenium scolopendrium, Polypodium sp., Asplenium trichomanes, Cardamine heptaphylla, Silene dioica, Geranium robertianum, Galium aparine, Aria edulis, Senecio vulgaris subsp. vulgaris, Rubus sp., Bellis perennis, Campanula sp., Hypericum sp., Melittis melissophyllum, Asplenium adiantum-nigrum, Plantago media, Thymus vulgaris, Hieracium murorum, Vicia sepium.

Planche 5. Melica uniflora (1), Cardamine heptaphylla (2), Lonicera xylosteum (3), Pseudoturritis turrita (4), Hippocrepis emerus (5) et Mercurialis perennis (6) ; B. Gilbert, CC-BY-NC-ND.

NB. L’ascension du pech de Bugarach est possible en passant par trois grandes voies pédestres. Le GR 367, depuis le village de Bugarach, permet de monter par le GR 36 de La Fenêtre au sud (1) ou par la crête à l’est (2) avant de poursuivre vers La Bastide. Le col du Linas au nord-est ouvre la voie la moins engagée (3). Les spots botaniques peuvent être remarquables sur les sentiers hors-pistes (les falaises et éboulis de la Grosse Pique, la combe fraîche du Pech, la source de la Coume) mais il convient d’être vigilant quant aux dangers du terrain en montagne.

Nous arrivons au col de Péchines à 872 m d’altitude. Une décision s’impose au groupe. Il est possible de prendre la crête qui mène directement au pech de Bugarach ou bien de redescendre le contrefort sud vers la bergerie de la Couillade et la bergerie des Malquier puis remonter par la Fenêtre. Cette deuxième option est validée par le groupe. Nous avons la forme, le moral, la météo, allons par la Fenêtre !

NB. Les inventaires du 22 mai 2022 (Benjamin Gilbert & Société mycologique et botanique de Catalogne-Nord), 25 mai 2022 (Benjamin Gilbert) et 28 mai 2022 (Benjamin Gilbert & Christian Rapez) permettent de mettre en lumière quelques taxons depuis cette crête jusqu’en limite des mains courantes plus au nord-ouest. La crête alterne les milieux, souvent en mosaïque, entre pelouses montagnardes écorchées, vires rocheuses et sous-bois. Nous avions alors observé les espèces suivantes. Principalement en pelouse et vires rocheuses (planche 6) : Lotus corniculatus, Primula veris, Seseli montanum subsp. montanum, Trifolium sp., Helianthemum oelandicum var. canescens, Coronilla minima, Anthyllis vulneraria, Aster alpinus, Thymus pulegioides, Muscari neglectum, Geum sylvaticum, Erysimum duriaei subsp. pyrenaicum, Rhinanthus pumilus, Orchis anthropophora, Cyanus semidecurrens, Veronica orsiniana, Carex brevicollis, Genista hispanica subsp. hispanica, Abies alba, Aquilegia vulgaris, Petrosedum sediforme, Asphodelus cerasiferus, Neotinea ustulata, Lithodora fruticosa, Lilium pyrenaicum, Anthericum liliago, Androsace villosa, Asplenium fontanum, Chaenorhinum origanifolium, Iberis saxatilis, Cruciata glabra et surtout Narcissus bicolor, Medicago hybrida et Brimeura amethystina, plus rare, en populations restreintes trouvant place à l’ombre des arbustes. En sous-bois : Galium odoratum, Allium ursinum, Tractema lilio-hyacinthus, Lathraea clandestina, Sanicula europaea, Fagus sylvatica, Ilex aquifolium.

Planche 6. Brimeura amethystina (1), Carex brevicaulis (2) et Lathraea squamaria (3) ; B. Gilbert, CC-BY-NC-ND.

 La descente vers la bergerie de la Couillade est marquée d’une première mention étonnante. La conversation que nous engageons nous déconcentre de notre chemin et nous égare sur un autre sentier. Quelques minutes suffisent pour que nous nous en rendions compte. Alors qu’on consulte la carte pour retrouver notre chemin, Flavien pose les yeux sur une plante non mentionnée au pech de Bugarach et rare dans le reste du département, Lathraea squamaria, une Orobanchaceae parasite, avec des fleurs blanchâtres, qui ne peut être confondue avec aucune autre (planche 6). Nous en comptons vingt-trois pieds. Historiquement, la plante a été vue au col de Saint-Louis, pas très loin, en 2001 et 2005 par Dominique Barreau puis Jean-Marc Lewin, au nord d’Arques en 2004 toujours par Dominique et plus récemment sur la commune d’Escouloubre en 2015 par Evelyne Thys. Cette découverte au pied du pech de Bugarach nous remplit de joie. Comme quoi, il y a encore beaucoup à découvrir même dans les endroits que l’on pense être bien fréquentés par les naturalistes. Nous poursuivons dans le sous-bois avec Allium ursinum, Plagiomnium undulatum, Carex ornithopoda et arrivons au carrefour qui mène à la Fenêtre. Il est grand temps pour notre pause pique-nique.

NB. Le GR 367 qui mène au carrefour depuis la route à l’ouest n’est pas inintéressant. Un inventaire du 28 mai 2022 (Benjamin Gilbert & Christian Rapez) complète les connaissances du pech de Bugarach. On traverse d’abord un sous-bois avec Fagus sylvatica, Castanea sativa, Ilex aquifolium, Hedera helix, Daphne laureola, Buxus sempervirens, Hepatica nobilis, Fraxinus angustifolia, Geum urbanum, Euphorbia amygdaloides subsp. amygdaloides, Acer campestre, Ajuga reptans, Crataegus monogyna, Dioscorea communis, Viola alba, Helleborus foetidus, Melica uniflora, Ribes alpinum, Sanicula europaea, Betonica officinalis, Lapsana communis subsp. communis, Fragaria vesca, Rubia peregrina subsp. peregrina, Cornus sanguinea, Hippocrepis emerus, Corylus avellana, Coriaria myrtifolia, Ranunculus acris, Lotus corniculatus, Briza media, Carex flacca, Aria edulis, Erica scoparia, Polygala calcarea, Ruscus aculeatus, Quercus pubescens, Brachypodium sylvaticum, Lactuca muralis, Cardamine hirsuta, Asplenium trichomanes subsp. pachyrachis et Conopodium majus; et des prairies submontagnardes (qui nous immobiliseraient des heures entières !) avec Muscari comosum, Leucanthemum pallens, Blackstonia perfoliata subsp. perfoliata, Eryngium campestre, Anthyllis vulneraria, Thymus pulegioides, Galium corrudifolium, Coronilla minima, Teucrium aureum, T. chamaedrys, Petrosedum sediforme, Plantago lanceolata, P. media, Himantoglossum hircinum, Helichrysum stoechas, Clinopodium sp., Carex caryophyllea, Euphrasia sp., Bromopsis erecta, Thesium humifusum, Potentilla verna, Globularia bisnagarica, Briza media, Hieracium jaubertianum, Juniperus communis subsp. communis, Festuca occitanica, Carex humilis, Orchis anthropophora, O. militaris, Pilosella officinarum, Lavandula latifolia, Echium vulgare, Staehelina dubia, Poterium sp., Argyrolobium zanonii, Aphyllanthes monspeliensis, Anacamptis morio subsp. morio, Carthamus mitissimus, Genista scorpius, Linum catharticum, Trifolium pratense, T. campestre, Urospermum dalechampii, Poa bulbosa var. vivipara, Arabis sagittata, Bupleurum baldense, Sherardia arvensis, Cerastium pumilum, Anthoxanthum odoratum, Bellis perennis, Carlina acanthifolia, Helianthemum oelandicum var. canescens, H. apenninum, Anthyllis montana, Silene nutans subsp. nutans, Galium lucidum, Fragaria viridis, Ranunculus bulbosus, Cuscuta sp., Veronica sp., Phleum pratense, Seseli montanum subsp. montanum, Koeleria vallesiana subsp. vallesiana, Anacamptis pyramidalis, Platanthera bifolia, Lotus hirsutus, Ophrys scolopax, Potentilla hirta, Aquilegia vulgaris, Asplenium fontanum, Epipactis helleborine, Euphorbia dulcis subsp. purpurata et Lathyrus linifolius.

 Le soleil est encore avec nous, le paysage est dégagé, le vent souffle. Nous repartons en direction de la Fenêtre, croisons Carthamus mitissimus, Ophrys lutea, Trinia glauca, Alyssum alyssoides et Coronilla minima avant d’entreprendre la montée à travers bois. Nous restons vigilants. Le groupe se concentre dans un effort physique. Nous pensons voir Stachys heraclea, en feuilles, mais sans garantie. La plante n’a jamais été notée sur le pech de Bugarach, la donnée sera vérifiée en 2024. Plus sûr, c’est (encore et encore) Medicago hybrida que nous observons. Au point 960, nous filons tout droit dans les éboulis. Un festival floristique commence avec Erysimum duriaei subsp. pyrenaicum, Lithodora fruticosa, Iberis saxatilis, Gentiana occidentalis, vicariante pyrénéenne de G. angustifolia dans les Alpes (Carnets botaniques 104), et plus haut, au pied des vertigineuses falaises, Androsace villosa, dont le changement des couleurs de ses corolles, selon l’état de sa fécondation, interpelle toujours autant les botanistes qui n’ont pas l’habitude de la croiser, Chaenorhinum origanifolium, Arenaria grandiflora et Campanula speciosa, en feuilles, mais qui émoustille tout de même Flavien et en fait sa coche du jour.

NB. Toujours dans le même inventaire du 28 mai 2022 (Benjamin Gilbert & Christian Rapez), nous avions noté Gymnadenia conopsea, Rhinanthus pumilus, Aster alpinus, Anthyllis montana, A. vulneraria, Helianthemum oelandicum var. canescens, Globularia repens et surtout Lonicera pyrenaica, donnée déclarée en 1996 par Dominique Barreau au nord du pech de Bugarach et en 2010 par Oliver Argagnon sur la Grosse Pique. La plante a fait l’objet d’un pointage et comptage en 2022 et 2023.

 C’est un chemin devenue minéral qui nous conduit au plus proche de ce qu’on appelle la Fenêtre, cette trouée circulaire qui perce la falaise. Elle se dresse un peu plus haut. Autour de nous, nous trouvons (planche 7) Hornungia alpina subsp. alpina, H. petraea, Arenaria grandiflora, encore Campanula speciosa en feuilles, Reseda luteola, Teucrium pyrenaicum, Fritillaria pyrenaica, Thalictrum minus subsp. saxatile et surtout Brassica montana, magnifiquement érigée, sans la moindre concurrence, seule au bord de la piste. La plante est photographiée. C’est la première fois que Benjamin la rencontre sur le pech de Bugarach, alors on vérifie la donnée. Il s’avère qu’aucune mention de B. montana n’a été donnée sur la montagne, belle trouvaille !

Planche 7. Arenaria grandiflora (1), Brassica montana (2), Erysimum duriaei subsp. pyrenaicum (3) et Medicago hybrida (4) ; B. Gilbert, CC-BY-NC-ND. 

NB. Nous complétons la palette végétale avec l’inventaire du 28 mai 2022 (Benjamin Gilbert & Christian Rapez) qui nous avait conduit en hors-piste plus à l’est dans les falaises. Sans cordée, nous avions herborisé raisonnablement en dehors des sentiers battus et avions noté les plantes suivantes : Aquilegia vulgaris, Dethawia splendens subsp. splendens, Carex ornithopoda subsp. ornithopoda, Gentiana occidentalis, Euphorbia duvalii, Iberis saxatilis, Androsace villosa, Globularia repens, Anthyllis vulneraria, Asplenium fontanum, Rhamnus pumila, Trinia glauca, Biscutella lima, Erysimum duriaei subsp. pyrenaicum, Coronilla minima, Aster alpinus, Helianthemum oelandicum var. canescens et Hieracium sp.

Nous atteignons la Fenêtre, le vent souffle encore plus fort. On reste à couvert quelques minutes. Nous poursuivons pour la dernière ligne droite sur le flanc nord-ouest. Le sommet est dans notre ligne de mire. Le groupe recherche un peu partout une plante non revue, Ranunculus thora, qui est donnée dans le coin depuis 1996. Cette espèce est réputée pour être la plus toxique de notre flore. C’est la coche du pech de Bugarach que recherche Benjamin depuis trois ans. Encore une fois, la plante ne montre pas, c’est le jeu.

NB. En prospectant pour Ranunculus thora, nous avions parcouru cet éboulis exposé ouest juste après la Fenêtre, sans succès, hormis pour Fritillaria pyrenaica, Globularia nudicaulis, Cruciata glabra, Buxus sempervirens, Erysimum duriaei subsp. pyrenaicum, Viburnum lantana, Dethawia splendens subsp. splendens, Iberis saxatilis, Helianthemum nummularium, Anacamptis morio subsp. morio, Sesleria caerulea, Gymnadenia conopsea, Gentiana occidentalis, Anthyllis vulneraria, A. montana, Linum appressum, Euphorbia duvalii, Coronilla minima (inventaire du 28 mai 2022 ; Benjamin Gilbert & Christian Rapez).

Nous parvenons au carrefour, en dessous du sommet, qui relie justement le sentier des crêtes que nous n’avons pas emprunté. Il vente beaucoup. Le groupe recherche toujours Ranunculus thora, surtout sur la rocaille au sud du sommet, et trouve refuge sous des affleurements. Yvon fait un clin d’œil à Benjamin en lui montrant une Campanula speciosa dans toute sa splendeur, une belle panicule en fleur, la seule. Il appelle Flavien, il arrive. « T’es un bon Yvon ! » lui hurle-t-il de joie avec une tape amicale. En effet cette campanule à grandes fleurs de moyenne altitude, qui s’apparente à sa cousine alpine C. medium, est loin d’être courante. Elle se répartit de part et d’autre de la chaîne pyrénéenne, mais peut être rencontrée jusque dans le sud des Grands Causses en France (planche 8).

Planche 8. Campanula speciosa (1), Gentiana occidentalis (2), Anthyllis montana (3), Aster alpinus (4), Helianthemum oelandicum (5) et Dethawia splendens (6) ; B. Gilbert, CC-BY-NC-ND.

NB. En direction de la crête depuis le carrefour, cette rocaille est très intéressante. Lors des inventaires du 22 mai 2022 (Benjamin Gilbert & Société mycologique et botanique de Catalogne-Nord) et du 28 mai 2022 (Benjamin Gilbert & Christian Rapez), nous avions herborisé (planche 9) Linum appressum, Coronilla minima, Anthyllis montana, Globularia repens, Gentiana occidentalis, Trinia glauca, Helianthemum oelandicum var. canescens, Aster alpinus, Euphorbia duvalii, Teucrium aureum, Fritillaria pyrenaica, Juniperus communis subsp. communis, Sesleria caerulea, Leucanthemopsis alpina subsp. alpina, Biscutella lima, Buxus sempervirens, Orchis anthropophora, Viburnum lantana, Rhamnus pumila, Ranunculus gramineus, Hormathophylla saxigena, Rhinanthus pumilus. Plus en dessous, en limite avec les premières mains courantes qui mènent à la crête, nous avions noté Thymus vulgaris, Geum sylvaticum, Teucrium chamaedrys, T. pyrenaicum, Campanula speciosa, Narcissus bicolor, Erysimum duriaei subsp. pyrenaicum, Reseda luteola, Patzkea paniculata, Chaenorhinum origanifolium, Arabis scabra, Polygonatum odoratum, Coincya monensis subsp. cheiranthos, Euphorbia seguieriana. Ce second inventaire a aussi été l’occasion de faire un point sur les plantes présentes dans la combe fraîche exposée est, au pied du sommet, très pentue ! La prudence est de mise. La descente commence avec Helianthemum nummularium, Fritillaria pyrenaica, Arabis scabra, Aster alpinus, Reseda luteola, Orchis anthropophora, Lactuca perennis, Primula sp., Lonicera xylosteum, Juniperus communis subsp. communis, Buxus sempervirens, Polygala calcarea, Globularia nudicaulis, Asperula cynanchica, Erinus alpinus, Hornungia petraea, Thymus pulegioides, Amelanchier ovalis, Betonica officinalis, Conopodium majus, Silene vulgaris, Origanum vulgare subsp. vulgare, Coincya monensis subsp. cheiranthos, Fraxinus angustifolia, Cruciata glabra, Silene nutans subsp. nutans, Euphorbia duvalii, Narcissus bicolor et ce qui nous semble être un Pinus mugo subsp. uncinata isolé. Plus en dessous, une ambiance toujours fraîche mais en sous-bois accueille Tractema lilio-hyacinthus, Mercurialis perennis, Daphne laureola, Lapsana communis subsp. communis, Festuca sp., Fagus sylvatica, Pseudoturritis turrita, Thalictrum minus subsp. saxatile, Valeriana montana, Convallaria majalis, Phyteuma spicatum, Hepatica nobilis, Erysimum duriaei subsp. pyrenaicum, Carex ornithopoda subsp. ornithopoda, Androsace villosa.

Planche 9. Vue depuis le sommet du pech du Bugarach (1), Linum appressum (2), Rhamnus pumila (3), Globularia repens (4), Ranunculus gramineus (5), Androsace villosa (6) et Narcissus bicolor (7) ; B. Gilbert (2 à 7), F. Saboureau (1), CC-BY-NC-ND. 

Le pech du Bugarach, sommet culminant à 1 230 m d’altitude, un symbole des hautes Corbières, un lieu mythique, mystique, un incontournable des sentiers cathares. En face de nous, la chaîne des Pyrénées s’étend depuis les Pyrénées-Orientales avec le pic du Canigou (2 784 m), l’Aude avec le pic du Madrès (2 469m) et l’Ariège avec le pic du Saint-Barthélemy (2 348 m), et se perd vers l’ouest dans un lointain imperceptible, une envie de poursuivre les carnets de montagne. On devine, depuis le sommet, la boucle des hautes Corbières que nous avons commencée il y a six jours. On se remémore déjà chaque jour de marche dans ce beau pays.

NB. Au sommet du pech de Bugarach, le 28 mai 2022 (Benjamin Gilbert & Christian Rapez), nous avions inventorié ce cortège récurrent avec Ranunculus gramineus, Coronilla minima, Sesleria caerulea, Anthyllis vulneraria, A. montana, Laserpitium siler, Linum appressum, Rhinanthus pumilus, Fritillaria pyrenaica, Helichrysum stoechas, Leucanthemopsis alpina subsp. alpina, Biscutella lima, Teucrium pyrenaicum, Gentiana occidentalis, Muscari neglectum, Helianthemum oelandicum var. canescens, Galium corrudifolium, Asplenium ruta-muraria subsp. ruta-muraria, A. trichomanes, Patzkea paniculata, Thymus vulgaris, Festuca sp., Globularia repens et Orchis pallens.

Désormais, c’est la descente jusqu’au village. On reste tout d’abord exposé en rejoignant la crête au nord, il est encore tôt. Les plantes ne sont pas à l’optimum de floraison. Nous voyons une belle population de Narcissus bicolor, encore Fritillaria pyrenaica, Tractema lilio-hyacinthus, Lonicera pyrenaica que l’on repointe, Hormathophylla saxigena, Euphorbia duvalii, plante des Causses et des Pyrénées endémique du sud de la France, pour rester dans la thématique des patrimoniales, Coincya monensis subsp. cheiranthos, Ranunculus gramineus et Dethawia splendens subsp. splendens, une pyrénéo-cantabrique ici en limite d’aire orientale. Nous cherchons encore des pieds de Campanula speciosa, mais aucune n’est en fleurs. Nous avons eu notre chance un peu plus tôt. La route est encore longue et nous devons presser le pas pour arriver au village de Bugarach car la météo vire. Il est grand temps pour notre grande descente.

NB. Une liste non exhaustive, suite à plusieurs passages en 2021 et 2022, est dressée ici. Elle reprend une base de données photographiques des visites du 22 mai 2021 (Benjamin Gilbert & Robin Duborget), du 25 mai 2021 (Benjamin Gilbert, Laurie Beaufils, Bruno de Foucault & Cathie Lépagnole), du 30 mai 2021, du 01 juin 2021 et du 05 juin 2021 (Benjamin Gilbert). Elle concerne le sentier pédestre entre le col du Linas et le sommet du pech de Bugarach, qui traverse des prairie de fauche, de sous-bois, des buxaies, de la pelouse subalpine écorchée, des affleurements rocheux et falaises. La liste mentionne Aconitum lycoctonum, Ajuga reptans, Allium ursinum, Anacamptis morio subsp. morio, Androsace villosa, Anthyllis montana, A. vulneraria subsp. rubriflora, Aquilegia vulgaris, Arabis alpina, A. hirsuta, Arum maculatum, Aster alpinus, Campanula speciosa, Cardamine heptaphylla, Carex ornithopoda, Cephalanthera longifolia, Chaenorhinum origanifolium, Coeloglossum viride, Coincya monensis subsp. cheiranthos, Conopodium majus, Cytisophyllum sessilifolium, Dactylorhiza fuchsii, Erinus alpinus, Erysimum duriaei subsp. pyrenaicum, Euphorbia duvalii, Festuca ovina, Fritillaria pyrenaica, Galium odoratum, Gentiana occidentalis, Geranium nodosum, Globularia nudicaulis, G. repens, Helianthemum oelandicum var. canescens, Hieracium sp., Hippocrepis comosa, Hormathophylla saxigena, Hypericum montanum, Iberis saxatilis, Kernera saxatilis, Lamium galeobdolon, Laserpitium siler, Leucanthemum graminifolium, Linaria supina, Linum appressum, Lonicera xylosteum, Lotus maritimus, Melica uniflora, Moehringia muscosa, Narcissus assoanus, N. bicolor, Neotinea ustulata, Neottia ovata, N. nidus-avis, Ophrys funerea, O. scolopax, Orchis anthropophora, O. mascula, O. militaris, O. pallens, O. provincialis, Platanthera bifolia, Polygala calcarea, Polygonatum odoratum, Primula veris, Prunella hastifolia, Ranunculus gramineus, Reseda lutea, Rhamnus alpina, Rhinanthus minor, Ribes alpinum, Sanicula europaea, Saxifraga tridactylites, Serapias lingua, Sesleria caerulea, Tephroseris helenitis, Teucrium pyrenaicum, Thalictrum minus, Trinia glauca, Valeriana tuberosa, Veronica chamaedrys, Viburnum lantana.

Nous pénétrons avec une fatigue mesurée entre les rocailles, la grande buxaie et la prairie qui nous séparent du col de Linas. Cette dernière est, chaque année, visitée par beaucoup de monde car elle accueille un cortège d’orchidées très important. Il est possible de se mettre à genoux toute une journée pour apprendre et comparer sur place de nombreux genres (planche 10) : Anacamptis, Cephalanthera, Dactylorhiza, Neotinea, Ophrys, Orchis, Platanthera, Serapias. Manon et Benji nous ont devancés pour récupérer les ânes et les déposer à leur propriétaire au village de Sougraigne. Ils nous ramèneront le reste des affaires au parking. Nous n’aurons malheureusement pas d’adieux avec les ânes ! Quand on y pense, les animaux ont été deux compagnons de route assez formidables. Vaillantes bêtes ! Vivre une expérience de marche avec des animaux est quelque chose de très sympathique.

Planche 10. Les genres Anacamptis (1), Cephalanthera (2), Dactylorhiza (3), Neotinea (4), Ophrys gpe aranifera (5), Ophrys gpe fusca (6), Orchis (7), Platanthera (8), Serapias (9), présents sur le Pech de Bugarach ; S. Corre, CC-BY-NC-ND. 

Le ciel s’obscurcit depuis le col du Linas. Benjamin et Yvon retrouvent la piste qu’ils avaient prise, il y a quelques jours maintenant, et recollent les morceaux du paysage. Les hautes Corbières nous sont désormais un peu plus familières. C’est une expérience hors du commun, sincère, que de traverser toute une région à pied. Cette randonnée en itinérance, ouverte au grand public suite à cette phase de test, est un pari qui semble de bon augure. L’immersion est telle que les jours sont intenses, se confondent, se perdent dans le temps et la géographie. Il faut faire un effort pour se remémorer toutes les aventures d’un tel voyage. C’est normal. Au parking, on retrouve les voitures avec ce sentiment bizarre de devoir conduire. Bof, on n’a pas trop envie, c’est comme ça. Tout le monde s’embrasse, on se remercie. On se remémore les incroyables découvertes botaniques, les rires, les passages les plus complexes, les passages les plus poignants, la beauté du pays. Nous partons. Ailleurs. La boucle des hautes Corbières est bouclée.

Planche 11. Photo du groupe à la fenêtre du pech du Bugarach ; F. Saboureau, CC-BY-NC-ND.

Annexe

Le tableau suivant dresse la liste des taxons que nous avons identifiés. B1, B2 et B3 font référence à des herborisations en amont, sur le pech de Bugarach, les 22, 25, 28/05/2022 ; J1 à J6 font référence au séjour dans les hautes Corbières qui fait l’objet des trois articles dans les carnets botaniques, du 7 au 12/05/2023 ; M1 et M2 font référence à des visites ultérieures sur la station de Maianthemum bifolium et Milium montianum, les 23 et 26/05/2023.