Molènes hybrides de France, 5 - Verbascum ×murbeckii Teyber (V. phlomoides L. × V. pulverulentum Vill.)

Title

Hybrid mulleins of France, 5 - Verbascum ×murbeckii Teyber (V. phlomoides L. × V. pulverulentum Vill.)

Résumé

Verbascum ×murbeckii a été observé dans trois localités héraultaises. Cet hybride connu d’Europe moyenne et méditerranéenne n’avait pas été revu depuis l’année 1934. Un lectotype est désigné. La morphologie de cet hybride est comparée à celle de ses parents sous forme de tableau illustré et commenté. Les données disponibles sont compilées et illustrées par des cartes de répartition connue et potentielle.

Abstract

Verbascum ×murbeckii was observed in three localities in the Hérault department (France). This hybrid known from Central and Mediterranean Europe had not been seen since 1934. A lectotype is designated. The morphology of this hybrid is compared with that of its parents in an illustrated and commented table. The available data are compiled and illustrated by maps of known and potential distribution.

1. Préambule

Il est assez frappant d’observer sur le terrain des zones rudérales particulièrement favorables au genre Verbascum. Dans ces stations, facilement repérables en période de floraison (juin-juillet), se côtoient fréquemment non seulement plusieurs espèces du genre, mais aussi plusieurs hybrides.

Début juin 2022, dans une telle station abritant plusieurs espèces et hybrides de Verbascum, un individu très élancé et irrégulièrement ramifié en partie supérieure sortait du lot (photo 1). Ses feuilles basales entières, verdâtres et pétiolées évoquaient une proximité avec V. phlomoides, tandis que ses feuilles caulinaires blanchâtres et brusquement resserrées en pointe rappelaient les V. pulverulentum également très présents dans cette zone rudérale de talus de route. Après vérification à l’aide d’ouvrages historiques avec description morphologique des hybrides du genre (Murbeck, 1891 ; Rouy, 1909 ; Fournier, 1928), nous avons conclu qu’il devrait en effet s’agir de l’hybride Verbascum phlomoides L. × V. pulverulentum Vill.

Photo 1. Verbascum ×murbeckii en fleurs (Lattes, 30 juin 2022) ; cet individu dépassait les 180 cm de hauteur ; M. Klesczewski (image sous licence CC-BY-NC-ND).

2. Présentation de l’hybride

2.1. Historique

La première mention de l’hybride Verbascum phlomoides × V. pulverulentum date de 1887 : ce nothotaxon est récolté en 1885 par Haussknecht en Thessalie (Grèce). L’année d’après, Haussknecht présente sa récolte lors d’une réunion de l’association botanique de Thuringe. Le compte-rendu de cette réunion, paru en 1887, évoque l’hybride avec la formule V. floccosum × V. phlomoides sous le nom « V. subphlomoides Hskn. » (Botanischer Verein für Gesamtthüringen 1887 : 71 ; photo 2). À ce stade, le nom est publié sans description, à considérer comme nomen nudum non validement publié (Turland et al., 2019, art. 38.1).

Photo 2. Mention de l’hybride V. floccosum × V. phlomoides présenté par Haussknecht (Botanischer Verein für Gesamtthüringen, 1887).

Quatre années plus tard, Murbeck (1891) publie une description détaillée de l’hybride V. phlomoides × V. pulverulentum avec mention « Nov. hybr. ». Depuis, Verbascum floccosum est considéré comme synonyme de V. pulverulentum, la description de Murbeck concerne donc possiblement le même hybride que celui récolté par Haussknecht en Grèce. Murbeck omet toutefois de proposer une épithète pour cet hybride dont la description reste de ce fait invalide.

Photo 3. Description de l’hybride V. phlomoides × V. pulverulentum par Murbeck (1891).

Afin de rendre la description de l’hybride compréhensible, nous en proposons la traduction suivante :

V. phlomoides L. × V. pulverulentum Vill. – Nov. hybr. –

Plante à trichome gris blanchâtre, plus clair, plus fin et plus appliqué que chez V. phlom., mais plus sombre, moins fin et moins dense que chez V. pulv., plus facile à enlever en grattant que chez la première espèce, mais moins floconneux que chez la dernière.

Tige arrondie, fortement ramifiée en partie supérieure, mais à rameaux moins nombreux et moins fins que chez cette espèce [V. pulv.].

Feuilles non ou à peine décurrentes, moins nettement crénelées que chez V. phlom., mais à crénelures moins fines (voire presque absentes) comme chez V. pulv., les caulinaires et supérieures brusquement acuminées, presque comme chez V. pulv.

Calice long de 3-5 mm (chez V. phlom. 6-8 mm, chez V. pulv. 2-3 mm).

Corolle : extérieur à poils étoilés moins denses que chez V. phlom., mais ces poils ne sont pas confinés à la base des pétales comme chez V. pulv. Diamètre étalé 25-27 mm (chez V. phlom. 32-45 mm, chez V. pulv. 17-33 mm).

Filets d’étamines à poils blanc jaunâtre comme chez les deux espèces parentes ; les deux anthères inférieures décurrentes, quoique pas aussi loin que chez V. phlom. (chez V. pulv. toutes sont réniformes). Aucun ovaire développé. Pollen atrophié. Chez les espèces parentes, la production de pollen est parfaitement normale.

Origine : deux individus entre les parents autour de Seliste près de Nevesinje.

 

La même année, Borbás (1891 : 355) propose une épithète pour l’hybride V. floccosum × V. phlomoides en hommage à Murbeck (photo 4). Toutefois, il ne fait pas référence à la description du nothotaxon fournie par Murbeck (1891), le nom Verbascum ×murbeckii Borbás 1891 est de ce fait également à considérer comme nomen nudum non validement publié (Turland et al., 2019, art. 38.1).

Photo 4. Mention de l’hybride V. floccosum × V. phlomoides avec l’épithète « Murbeckii » par Borbás (1891 : 355).

Quelques années plus tard, Haussknecht (1897) fournit une description détaillée de V. ×subphlomoides, mais, par rapport à la publication de Botanischer Verein für Gesamtthüringen (1887), il remplace V. phlomoides comme second parent par V. sartorii en référence à Nyman (1890 : 230). V. sartorii Boiss. & Heldr. est aujourd’hui traité comme synonyme de V. samniticum (POWO, 2023). Même si V. sartorii sensu Hausskn. (1886) est placé en synonymie de V. phlomoides par Davis (1978 : 514), Dimopoulos et al. (2013 : 303) retiennent Verbascum ×subphlomoides Hausskn. comme hybride [« méconnu »] de V. pulverulentum × V. samniticum. Quatre planches (JE 00020754 à JE 00020757), récoltées par Haussknecht en Thessalie au cours de l’année 1885, sont conservées à l’ « Herbarium Haussknecht der Friedrich-Schiller-Universität Jena » (https://www.herbarium.uni-jena.de/). Cet ensemble d’échantillons nous paraît en effet morphologiquement éloigné des plantes supposées hybrides V. phlomoides × V. pulverulentum observées autour de Montpellier : par exemple, aucun des autres échantillons de Haussknecht ne montre une feuille basale ou caulinaire basse nettement pétiolée comme cela devrait être le cas chez les hybrides de V. phlomoides. Sur la base de ces observations, nous suivons l’avis de Dimopoulos et al. (2013 : 303) et POWO (2023a) pour considérer le nothotaxon Verbascum ×subphlomoides Hausskn. comme hybride de V. pulverulentum × V. samniticum.

Finalement, Teyber (1907) reprend l’épithète proposée par Borbás (1891), mais l’associe précisément à la description publiée par Murbeck (1891 [« 1892 »]) et devient ainsi descripteur du nothotaxon Verbascum ×murbeckii.

En conclusion, le nom valide pour l’hybride V. phlomoides × V. pulverulentum est Verbascum ×murbeckii Teyber 1907, comme retenu par Fournier (1928) et Plants of the World online (POWO, 2023b).

Photo 5. Publication de l’épithète V.×Murbeckii par Teyber (1907 : 19), avec citation explicite de la description fournie par Murbeck (1891).

2.2. Recherche d’un échantillon type

La description de l’hybride V. phlomoides × V. pulverulentum est basée sur deux individus recensés lors d’un voyage d’études réalisé entre mai 1889 et décembre 1890 en Bosnie-Herzégovine, près de la ville de Nevesinje (Murbeck, 1891 : 79). Les résultats scientifiques de ce voyage ont été publiés sous forme de thèse doctorale à l’Université de Lund (Suède) où Murbeck avait fait ses études. Il paraissait donc probable que les échantillons récoltés lors de ce voyage fussent conservés dans l’herbier de l’Université de Lund (LD). En effet, Arne Thell, le responsable de l’herbier LD, a pu rapidement confirmer l’existence d’un échantillon de « Verbascum phlomoides × pulverulentum, nov. hybrid. », collecté par Murbeck à Nevesinje le 20/07/1889 (spécimen LD-2109569 ; photo 6).

Photo 6. Lectotype (désigné ici) de Verbascum ×murbeckii Teyber, spécimen LD-2109569 ; Botanical Museum (LD), Lund University (Sweden).

2.3. Synthèse des données taxonomiques

Nom valide : Verbascum ×murbeckii Teyber 1907

Formule hybride : V. phlomoides L. × V. pulverulentum Vill.

Synonymes : Verbascum ×murbeckii Borbás 1891 (Hartl, 1965 ; Ferguson, 1975 ; Schubert & Vent (éd.), 1990 ; Stace & Easy, 2015), nomen nudum.

Verbascum subphlomoides Hausskn. sensu Rouy (1909), Chateau & Chassignol (1927-1936), Fournier (1928), POWO (2023a).

V. floccosum × V. phlomoides (Rouy, 1909 ; Gelmi d’après Festi & Prosser, 2008).

V. pulverulento × V. phlomoides (Gelmi d’après Béguinot, 1900-1902).

Lectotype (désigné ici) : LD-2109569

Nom vernaculaire (proposé ici) : Molène de Murbeck. Une biographie synthétique de ce botaniste suédois se trouve en annexe 1.

Ce lectotype en parfait état de conservation permet l’observation des critères morphologiques distinctifs suivants :

  • une feuille basale de taille notable, courtement pétiolée, de forme oblongue, à pointe obtuse ;
  • des feuilles caulinaires non décurrentes, les supérieures brusquement acuminées ;
  • une inflorescence à degré de ramification moyen, avec une dizaine de rameaux ;
  • des rameaux d’épaisseur moyenne et à glomérules de fleurs nettement espacés ;
  • des corolles de taille moyenne, à diamètre d’environ 2 cm ;
  • aucune capsule formée.

 

2.4. Comparaison morphologique illustrée

Ci-dessous, les critères morphologiques distinctifs sont présentés sous forme de tableau illustré, avec comparaison des deux taxons parents (tableaux 1a à 1g).

À signaler par ailleurs que la hauteur de V. ×murbeckii peut dépasser les deux mètres, tout comme celle de V. phlomoides.

En résumé, V. ×murbeckii est caractérisé par ses grandes feuilles basales courtement pétiolées, ses feuilles caulinaires ovales-acuminées blanchâtres, son inflorescence ramifiée, à rameaux dressés, peu épais et très allongés en fin de floraison, ses corolles de taille moyenne, ses poils des filets staminaux tous blancs et ses capsules avortées.

Tableau 1a. Comparaison des critères morphologiques majeurs de Verbascum ×murbeckii et de ses parents ; a - Aspect général ; M. Klesczewski (image sous licence CC-BY-NC-ND).
Tableau 1b. Comparaison des critères morphologiques majeurs de Verbascum ×murbeckii et de ses parents ; b - Feuilles basales adultes ; M. Klesczewski (image sous licence CC-BY-NC-ND).
Tableau 1c. Comparaison des critères morphologiques majeurs de Verbascum ×murbeckii et de ses parents ; c - Feuilles caulinaires ; M. Klesczewski (image sous licence CC-BY-NC-ND).
Tableau 1d. Comparaison des critères morphologiques majeurs de Verbascum ×murbeckii et de ses parents ; d - Inflorescences ; M. Klesczewski (image sous licence CC-BY-NC-ND).
Tableau 1e. Comparaison des critères morphologiques majeurs de Verbascum ×murbeckii et de ses parents ; e - Fleurs, photo prise in situ, Lattes, le 18/06/2023 ; M. Klesczewski (image sous licence CC-BY-NC-ND).
Tableau 1f. Comparaison des critères morphologiques majeurs de Verbascum ×murbeckii et de ses parents ; f - Filets staminaux ; M. Klesczewski (image sous licence CC-BY-NC-ND).
Tableau 1g. Comparaison des critères morphologiques majeurs de Verbascum ×murbeckii et de ses parents ; g - Fruits ; M. Klesczewski (image sous licence CC-BY-NC-ND).

3. Stations historiques avérées

Cet hybride aux parents pourtant largement répandus n’a été que peu recensé de manière générale. Ainsi, le Système mondial d’information sur la biodiversité (GBIF Secretariat, 2023) n’affiche que les quelques données de l’Inventaire national du patrimoine naturel (MNHN & OFB, 2003-2023), toutes situées au centre de la France à l’exception des stations identifiées autour de Montpellier dans le cadre du présent travail (carte 1).

Carte 1. Données de Verbascum ×murbeckii disponibles dans le GBIF ; © GBIF Secretariat (2022).

Une recherche approfondie à l’aide les bases de données en ligne Recolnat, GBIF et Jacq (JACQ consortium, 2004 ff.) n’a donné que très peu de résultats (tableau 2). Avec seulement deux localités historiques avérées, Verbascum ×murbeckii apparaît comme un nothotaxon extrêmement méconnu.

Tableau 2. Données historiques avérées de Verbascum ×murbeckii recensées via les bases de données en ligne.

4. Stations actuelles

Après la découverte, en 2022, d’un premier individu près de Montpellier (commune de Lattes, photo 1), la prospection aléatoire d’autres secteurs propices au cours de la saison 2023 a permis de recenser huit autres individus répartis sur trois stations, toutes sur la commune de Lattes (Hérault ; tableau 3).

Comme d’autres hybrides de molènes (voir p. ex. Klesczewski & Rossi, 2023a) Verbascum ×murbeckii apparaît sous forme de pieds isolés ou par petits groupes (voir aussi Tison, 2014a, b). Trois échantillons en provenance de la commune de Lattes ont été intégrés à l’herbier général de l’Herbier de l’Université de Montpellier (MPU).

Tableau 3. Données de Verbascum ×murbeckii recensées en 2022 et 2023. Les coordonnées géographiques sont indiquées en projection WGS84.

5. Autres confusions possibles

Si d’autres Verbascum hybrides ont un port singulier et très apparent (p. ex. V. ×flagriforme, Klesczewski et al., 2023), la molène de Murbeck passe plus facilement inaperçue. Typiquement, nous l’avons trouvée dans des stations où non seulement ses espèces parentes étaient fréquentes voire abondantes, mais aussi un autre hybride au port très ramifié, à savoir V. ×hybridum (Klesczewski & Rossi, 2023b). Dans ces stations, même l’oeil de naturaliste averti mettra un certain temps à distinguer les différents nothotaxons présents. Les populations mélangées dans la parcelle évoquée permettent de constater que les molènes de Murbeck sont bien plus élancées que V. ×hybridum et ses espèces parentes. La présence de poils en partie violets sur les filets d’étamines chez l’hybride de V. pulverulentum avec V. sinuatum peut être vérifiée pour écarter les éventuels doutes.

 

6. Répartition : synthèse

Dans les flores locales françaises, les seules mentions de l’hybride Verbascum phlomoides ×V. pulverulentum proviennent de la région Bourgogne-France-Comté. Ainsi, Gillot (1892) le signale dans les monts du Morvan et Chateau et Chassignol (1927-1936) indiquent trois stations en Saône-et-Loire. Bugnon et al. (1993) détaillent les Verbascum hybrides dans leur Nouvelle Flore de Bourgogne, mais malheureusement ces auteurs traitent Verbascum ×subphlomoides Hausskn. comme synonyme de V. ×nothum Koch, hybride de V. densiflorum et V. pulverulentum. Leurs données concernent donc ces deux nothotaxons et ne peuvent être attribuées à l’un ou l’autre d’entre eux. La donnée récente de « Verbascum ×subphlomoides » affichée dans OpenObs (MNHN & OFB , 2003-2023) doit donc être considérée avec prudence.

Rouy (1909) n’indique aucune localité, et Fournier (1928) seulement celles déjà connues en Saône-et-Loire. Finalement, Murbeck (1933) propose une synthèse des connaissances pour son époque. il énumère la France, l’Italie, la Bosnie-Herzégovine et le Monténégro comme pays avec présence avérée. Comme évoqué plus haut, les spécimens de Grèce par Haussknecht doivent être révisées, et ce d’autant plus que Dimopoulos et al. (2013) ne mentionnent pas Verbascum ×murbeckii.

Stace et Easy (2015) font état de plusieurs observations en Angleterre. La présence de l’hybride en Italie semble également avérée, avec plusieurs récoltes par Gelmi signalées par Béguinot (1900-1902) ainsi que Festi & Prosser (2008). Teyber (1907) l’avait trouvé en Autriche et Boros (1947) mentionne des stations en Hongrie. Reste à signaler que les flores de l’Espagne (Benedi, 2009), de la Turquie (Huber-Morath, 1978), les bases de données sur la flore d’Allemagne (FloraWeb, 2023) et de la Tchéquie (Pladias, 2014-2023) ne le mentionnent pas.

En conclusion, les pays avec présence avérée de Verbascum ×murbeckii sont la France, la Bosnie-Herzégovine, l’Angleterre, l’Italie, l’Autriche, la Hongrie et peut-être le Monténégro. Sur cette base, la carte des pays avec présence de l’hybride proposée par POWO (2023) mériterait d’être actualisée (carte 2).

Carte 2. Répartition de Verbascum ×murbeckii, à l’échelle des pays, d’après Plants of the world online ; © POWO (2023).

Un recoupement des zones de présence des deux espèces parentes suggère que V. ×murbeckii pourrait être trouvé depuis le Portugal jusqu’en Grande-Bretagne, l’Allemagne, la Grèce et la Turquie, avec la France comme centre de répartition évident (carte 3). La présence de l’hybride en péninsule Ibérique paraît toutefois hypothétique dans la mesure où son parent V. phlomoides est considéré comme probablement absent de cette zone par Murbeck (1933 : 53) et Benedi (2009 : 51).

Des prospections ciblées à l’aide des critères de reconnaissance mis en évidence ci-dessus pourraient permettre de détecter d’autres localités non seulement en France, mais aussi en Allemagne, Italie, Tchéquie et la Grèce.

Carte 3. Zones de présence simultanée des espèces parentes de Verbascum ×murbeckii ; source données : GBIF.org (01 & 04 July 2023) ; source fond cartographique : ESRI Satellite, mailles de 100 km * 100 km ; M. Klesczewski (image sous licence CC-BY-NC-ND).

7. Fertilité et mode de vie de l’hybride

Dans l’objectif d’étudier l’éventuelle fertilité de l’hybride, nous avons récolté plusieurs rameaux fructifiés en fin d’été. Peu après, le matériel ainsi obtenu a été semé en conditions contrôlées et observé pendant plusieurs mois. Aucune germination n’a été constatée.

En parallèle, nous avons visité plusieurs populations en fin d’été 2022 et 2023. L’individu détecté en 2022 avait complètement séché et ceux de 2023 n’ont produit aucun rejet au niveau de leur rosette. Nous en déduisons que le mode de vie de Verbascum ×murbeckii est bisannuel, à l’image de celui de ses deux espèces parentes.

 

8. Perspectives

En premier lieu, nous espérons que les informations fournies permettront un recensement plus large de cet hybride encore si mal connu.

Ensuite, il est satisfaisant de constater que le travail sur la description des hybrides de molènes présents en France semble bien engagé : débuté en 2022, il a d’ores-et-déjà permis l’identification d’une dizaine de nothotaxons et la description détaillée de cinq d’entre eux, recensés en France méridionale. Le concours de botanistes menant des prospections dans les autres régions françaises devrait à terme permettre de compléter ces inventaires. Ainsi, la publication d’un outil actualisé de détermination des Verbascum de France incluant les hybrides pourrait être envisagé d’ici cinq ans environ.

Photo 7. Groupe de Verbascum ×murbeckii (Lattes, 12/07/2023), au milieu de centaines de V. pulverulentum ; quelques individus de V. phlomoides sont présents à proximité immédiate ; M. Klesczewski (image sous licence CC-BY-NC-ND).

Annexes : Svante Samuel Murbeck et le genre Verbascum

Source principale : Wikipédia, l’encyclopédie libre, 2023.

Né en 1859, Svante Samuel Murbeck effectue ses études à l’université de Lund (Suède) et les termine par un doctorat sur la flore de la Bosnie-Herzégovine où il avait effectué un voyage d’études de juin 1889 à décembre 1890. C’est dans cet ouvrage publié par l’Université de Lund en 1891 que Murbeck évoque plusieurs nothotaxons du genre. Il y décrit notamment l’hybride Verbascum phlomoides × V. pulverulentum que Borbás (1891) et Teyber (1907) lui ont dédié. Après des passages à Stockholm et Alnarp, Murbeck devient professeur de botanique à Lund et y reste vingt-deux ans. La majorité de ses travaux ont porté sur la flore d’Afrique du Nord et il a publié de nombreux ouvrages sur les plantes du désert. D’après Håkansson (1946) qui cite Murbeck lui-même, c’est une étude sur le genre Celsia, proche de Verbascum, qui l’a incité à s’intéresser de plus près à ce groupe. Ainsi, il publie en 1925 la monographie du genre Celsia et en 1933 celle, plus monumentale, du genre Verbascum qui reste jusqu’à présent l’ouvrage de référence du genre.

Reste à signaler que Murbeck a aussi travaillé sur d’autres genres présents en Scandinavie comme Agrostis, Cerastium et Rubus, et qu’il a découvert la parthénogénèse dans le genre Alchemilla. D’après IPNI (2023), Svante Samuel Murbeck est auteur de 298 noms de plantes, parmi lesquels 83 espèces et hybrides de Verbascum.

Photo 8. Svante Samuel Murbeck (1859-1946). Source : Håkansson (1946) ; domaine public.

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Remerciements

Nous remercions les personnes suivantes pour leur aide essentielle : Arne Thell, Ulf Arup et Patrik Frödén (Herbarium Lund ; recherche de spécimen, envoi de photo) ; Anna Sebelius, Håkan Håkansson (Lund University Library : envoi d’informations) ; Sofia Rossi (CEN Occitanie ; rédaction de tutoriel cartographique) ; Dr. Jochen Müller et Dr. Hermann Manitz (Herbarium Haussknecht, Friedrich Schiller Universität Jena ; échanges taxonomiques, envoi de bibliographie) ; Caroline Loup (Herbier de l’Université de Montpellier, MPU ; recherche et gestion de spécimen) ; Christophe Girod, Ghislain Huyghe, Eric Mosnier et Mathias Pires (envoi de bibliographie) ; Elodie Klesczewski (aide graphique sous GIMP et relecture). Merci aussi à Recolnat (ANR-11-INBS-0004, https://www.recolnat.org/fr/) qui a permis la recherche efficace de spécimens en ligne, ainsi qu’à la Biodiversity Heritage Library (BHL) at Smithsonian Libraries and Archives (Washington, D.C., USA) dont le site www.biodiversitylibrary.org rend les références bibliographiques anciennes si facilement et librement accessibles.