Contribution à l’étude phytosociologique de la végétation herbacée rivulaire des fleuves côtiers méditerranéens du Var et des Alpes-Maritimes
Title
Contribution to the phytosociological study of riparian herbaceous vegetation of the Mediterranean coastal rivers of Var and Alpes-Maritimes
Résumé
L’étude phytosociologique de la végétation herbacée rivulaire des petits fleuves côtiers méditerranéen dans les départements du Var et des Alpes-Maritimes a permis de décrire quatre nouvelles associations végétales : Spirantho aestivalis – Gratioletum officinalis (Molinio arundinaceae – Holoschoenion vulgaris), Radiolo linoidis – Polypogonetum maritimi (Cicendio filiformis – Solenopsion laurentiae), Lythro salicariae – Menthetum aquaticae (Dorycnio recti – Rumicion conglomerati) et Chelidonio majoris – Ranunculetum lanuginosi (Geo urbani – Alliarion petiolatae). De plus, l’association Carici pendulae – Equisetetum telmateiae est nouvellement signalée dans les Alpes-Maritimes.
Abstract
Contribution to the phytosociological study of riparian herbaceous vegetation of the Mediterranean coastal rivers of Var and Alpes-Maritimes. The phytosociological study of riparian herbaceous vegetation of small coastal Mediterranean rivers in the departments of Var and Alpes-Maritimes has led to the description of four new plant associations: Spirantho aestivalis – Gratioletum officinalis (Molinio arundinaceae – Holoschoenion vulgaris), Radiolo linoidis – Polypogonetum maritimi (Cicendio filiformis – Solenopsion laurentiae), Lythro salicariae – Menthetum aquaticae (Dorycnio recti – Rumicion conglomerati), and Chelidonio majoris – Ranunculetum lanuginosi (Geo urbani – Alliarion petiolatae). Additionally, the association Carici pendulae – Equisetetum telmateiae is newly reported in the Alpes-Maritimes.
1. Introduction
Dans la région méditerranéenne continentale française, les études phytosociologiques portant sur la végétation rivulaire sont peu nombreuses. Historiquement, les contributions les plus importantes sont celles de Tchou (1948) et de Braun-Blanquet et al. (1952), surtout centrées sur le Languedoc-Roussillon. Concernant la Provence et la région niçoise, il faut attendre les travaux de Loisel (1976) et de Lapraz (1979) sur l’ostryaie à Melica uniflora des Alpes-Maritimes. Plus récemment, on peut citer les contributions suivantes : Varèse (1994) sur les ripisylves de la Durance, Offerhaus (2013) sur l’ourlet à Symphytum bulbosum des Alpes-Maritimes, Choisnet et al. (2019) sur la végétation alluviale de l’Ardèche, de Foucault (2021) sur les ripisylves languedociennes. La présente contribution vise à présenter cinq associations végétales herbacées rivulaires observées dans le Var et les Alpes-Maritimes, se rencontrant dans le lit ou sur les berges de petits fleuves côtiers soumis à un régime hydrologique méditerranéen. Ces associations se répartissent dans quatre classes phytosociologiques : Agrostietea stoloniferae, Juncetea bufonii, Filipendulo ulmariae–Convolvuletea sepium et Galio aparines-Urticetea dioicae. Une grande partie des relevés de terrain a été réalisée dans le cadre d’un appel à projet Eau et biodiversité 2019 de l’Agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse, visant à élaborer un plan d’action pour la conservation et la restauration de la trame turquoise en Méditerranée, la trame turquoise étant un concept technique défini comme l’espace permettant le développement et la circulation des espèces végétales liées aux milieux aquatiques et humides.
2. Méthodes
Les relevés de végétation ont été réalisés selon la méthode phytosociologique sigmatiste (Royer, 2009). La nomenclature floristique suit le référentiel taxonomique de l’Inventaire national du patrimoine naturel TaxRef v. 15. Les relevés ont été triés selon la méthode manuelle et à l’aide d’analyses statistiques (analyse factorielle des correspondances et classification ascendante hiérarchique) effectuées avec le logiciel Ginkgo (http://biodiver.bio.ub.es/vegana/). Les associations mises en évidence sont décrites sur les plans de la physionomie, la composition floristique, la synsystématique, l’écologie, la répartition et les enjeux de conservation. Les caractéristiques écologiques des différentes communautés végétales présentées sont précisées pour les valeurs indicatrices suivantes, basées sur les indices d’Ellenberg harmonisés à l’échelle européenne (Tichý et al., 2023) : humidité édaphique (F), lumière (L), niveau trophique (N). À partir des valeurs renseignées pour chaque taxon, une valeur moyenne a été calculée pour chaque relevé, puis pour l’ensemble du tableau de relevés, par association. Pour la définition en français de ces classes de valences écologiques, nous avons consulté Julve (2011). La nomenclature phytosociologique utilisée suit quand c’est le cas les déclinaisons par classe du Prodrome des végétations de France (de Foucault, 2011, 2013, 2018a ; de Foucault & Catteau, 2012).
3. L’association à Spiranthes aestivalis et Gratiola officinalis
Spirantho aestivalis–Gratioletum officinalis ass. nov. hoc loco, typus nominis hoc loco : relevé 8 du tableau 1 hoc loco
Collobrières (Var), La Verne, gué de la piste de Capelude, micaschistes, alt. 98 m, 06 mai 2022, rec. 70 %, 24 taxons
Spiranthes aestivalis 1, Gratiola officinalis 4, Cyperus badius 1, Juncus articulatus 1, Mentha aquatica +, Agrostis stolonifera 2, Scirpoides holoschoenus 2, Dittrichia viscosa 1, Juncus effusus +, Mentha pulegium +, Rorippa sylvestris +, Lythrum salicaria 1, Brachypodium sylvaticum 1, Anthoxanthum odoratum +, Allium triquetrum +, Narcissus poeticus 1, Ficaria verna +, Cytisus villosus +, Hypericum australe +, Hypericum perforatum +, Fraxinus angustifolia 1, Vincetoxicum hirundinaria +, Plantago lanceolata +, Geranium columbinum +.
3.1. Position dans la classification phytosociologique
Agrostietea stoloniferae Oberd. 1983
Holoschoenetalia vulgaris Braun-Blanq. ex Tchou 1948
Molinio arundinaceae-Holoschoenion vulgaris Braun-Blanq. ex Tchou 1948
3.2. Physionomie
C’est une communauté herbacée vivace à optimum estival, au recouvrement moyen (60 % en moyenne), dominée par Gratiola officinalis, Cyperus badius, Mentha aquatica, Agrostis stolonifera, Scirpoides holoschoenus (photo 1). L’ouverture plus ou moins importante du tapis herbacé permet l’installation d’un certain nombre d’espèces annuelles qui se développent en mosaïque : Radiola linoides et Polypogon maritimus sont les plus fréquentes et abondantes.
3.3. Composition floristique et synsystématique
Cette association se reconnaît à la combinaison fidèle de Spiranthes aestivalis, Gratiola officinalis et Cyperus badius. Les éléments caractéristiques de la classe (Agrostietea stoloniferae), de l’ordre (Holoschoenetalia vulgaris) et de l’alliance (Molinio caeruleae–Holoschoenion vulgaris) sont représentés le plus fréquemment par Juncus articulatus, Mentha aquatica, Agrostis stolonifera, Scirpoides holoschoenus, Dittrichia viscosa, Juncus effusus, Mentha pulegium. Les espèces compagnes appartiennent principalement à la classe des Filipendulo ulmariae–Convolvuletea sepium : Lythrum salicaria, Lysimachia vulgaris et Eupatorium cannabinum. La richesse moyenne est de 19 espèces.
3.4. Écologie, communautés en contact
Le Spirantho aestivalis–Gratioletum officinalis est une communauté mésohygrophile à hygrophile courtement inondable, héliophile, méso-oligotrophile, de l’étage mésoméditerranéen à ombroclimat subhumide, de basse altitude, de 30 à 460 m (dans nos relevés). Elle se développe dans le lit de cours d’eau à régime hydrologique typiquement méditerranéen, présentant des étiages estivaux sévères, avec des secteurs en assec sur de longs linéaires. Sur un lit rocheux de nature siliceuse (gneiss et micaschistes), elle se développe sur des plaquages discontinus de sol limoneux déposé à la surface et dans les fissures de dalles rocheuses. L’association est très souvent en mosaïque avec le Radiolo linoidis–Polypogonetum maritimi, communauté d’annuelles hygrophiles.
3.5. Répartition
L’association a été étudiée dans le massif des Maures (Var), où elle est commune le long de la Giscle et de la Verne.
Localisation des relevés (tableau 1) – rel. 1 : Var, Collobrières, La Verne, La Croix d’Anselme, 31/05/2022, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; rel. 2 : Var, Collobrières, La Giscle, Roumaguoi, 02/07/2020, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; rel. 3 : Var, La Môle, la Giscle, 08/06/2021, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; rel. 4 : Var, Cogolin, la Giscle, La Chêneraie, 01/07/2020, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; rel. 5 : Var, Grimaud, La Giscle, 02/07/2020, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; rel. 6 : Var, Collobrières, La Giscle, Vaucaude, 23/07/2021, observateurs P. Bravet, L. Gilbertas ; rel. 7 : Var, Collobrières, La Giscle, Plan de Suvière, 07/07/2020, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; rel. 8 : Var, Collobrières, La Verne, gué de la piste de Capelude, 06/05/2022, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; rel. 9 : Var, Collobrières, La Verne, 06/05/2022, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; rel. 10 : Var, Collobrières, La Verne, 31/05/2022, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; rel. 11. Var, Collobrières, La Giscle, Vaucaude, 22/06/2021, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus, L. Gilbertas ; rel. 12. Var, Collobrières, La Giscle, Vaucaude, 22/06/2021, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus, L. Gilbertas.
3.6. Intérêt écologique
Le Spirantho aestivalis–Gratioletum officinalis constitue un habitat d’intérêt communautaire 6420 Prairies humides méditerranéennes à grandes herbes du Molinio-Holoschoenion. Il abrite aussi plusieurs espèces végétales protégées : Spiranthes aestivalis (protection nationale), Gratiola officinalis (protection nationale), Carex punctata (protection régionale PACA), Ophioglossum azoricum (protection nationale).
4. L’association à Radiola linoides et Polypogon maritimus
Radiolo linoidis–Polypogonetum maritimi ass. nov. hoc loco, typus nominis hoc loco : relevé 5 du tableau 2 hoc loco
Collobrières (Var), La Verne, Boulin, gneiss, alt. 294 m, 31 mai 2022, rec. 40 %, 24 taxons
Radiola linoides 2, Polypogon maritimus 1, Cicendia filiformis 1, Solenopsis laurentia 2, Juncus capitatus 1, Lotus angustissimus +, Juncus bufonius +, Briza minor +, Briza maxima 1, Vulpia muralis 1, Moenchia erecta 1, Tolpis umbellata 1, Aira elegantissima 1, Trifolium campestre +, Knautia integrifolia +, Lysimachia arvensis 2, Geranium columbinum +, Spiranthes aestivalis 1, Mentha pulegium 1, Cyperus badius +, Holcus lanatus +, Selaginella denticulata +, Erica scoparia 1, Isoetes durieui 1.
4.1. Position dans la classification phytosociologique
Juncetea bufonii B. Foucault 1988
Nanocyperetalia flavescentis Klika 1935
Cicendio filiformis-Solenopsion laurentiae Brullo & Minissale 1998
4.2. Physionomie
C’est une association de petites plantes annuelles à l’optimum en fin de printemps, au recouvrement moyen de 50 %, dominée par Radiola linoides, Polypogon maritimus, Trifolium ligusticum, Solenopsis laurentia, Juncus capitatus, Juncus bufonius, Lotus angustissimus, Briza maxima, Trifolium campestre, Lysimachia arvensis. Elle se développe seule ou en mosaïque de l’association Spirantho aestivalis–Gratioletum officinalis, au sein de laquelle elle s’implante dans les trouées du tapis de vivaces.
4.3. Composition floristique et synsystématique
La combinaison de Radiola linoides, Polypogon maritimus, Trifolium ligusticum, Cicendia filiformis, Solenopsis laurentia permet de reconnaître l’association, qui se rattache aisément à la classe des Juncetea bufonii et l’ordre des Nanocyperetalia flavescentis, avec les espèces suivantes : Juncus capitatus, Lotus angustissimus, Juncus bufonius, Radiola linoides, Briza minor, Isolepis setacea, Blackstonia perfoliata subsp. perfoliata. La présence de Solenopsis laurentia et Cicendia filiformis permet de rattacher l’association à l’alliance du Cicendio filiformis–Solenopsion laurentiae. La richesse moyenne est de 23 espèces.
4.4. Écologie, communautés en contact
Le Radiolo linoidis–Polypogonetum maritimi est une communauté mésohydrique, héliophile, oligotrophile, de l’étage mésoméditerranéen à ombroclimat subhumide, de basse altitude, de 20 à 480 m (dans nos relevés). Elle se rencontre dans les mêmes milieux que le Spirantho aestivalis–Gratioletum officinalis, se développant à la faveur de plages de sol nu ouvertes dans le tapis herbacé de vivaces, sur des plaquages discontinus de sol limoneux déposé à la surface et dans les fissures de dalles rocheuses siliceuses des cours d’eau, parfois sur des petites plages d’alluvions sableuses sur berge.
4.5. Répartition
Elle coincide avec celle du Spirantho aestivalis–Gratioletum officinalis : massif des Maures (Var), dans le cours de la Giscle et de la Verne.
Localisation des relevés (tableau 2) – rel. 1 : Var, Collobrières, La Verne, La Croix d’Anselme, 31/05/2022, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; rel. 2 ; Var, Collobrières, La Verne, La Croix d’Anselme, 31/05/2022, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; rel. 3 : Var, Collobrières, La Verne, La Croix d’Anselme, 31/05/2022, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; rel. 4. Var, Collobrières, La Verne, Boulin, 31/05/2022, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; rel. 5 : Var, Collobrières, La Verne, Boulin, 31/05/2022, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; rel. 6 : Var, Collobrières, La Giscle, Roumaguoi, 08/06/2021, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; rel. 7 : Var, Grimaud, la Giscle, La Chêneraie, 01/06/2021, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; rel. 8 : Var, Collobrières, La Giscle, Roumaguoi, 08/06/2021, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; rel. 9 : Var, Collobrières, La Giscle, Vaucaude, 22/06/2021, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus, L. Gilbertas ; rel. 10. Var, Grimaud, La Giscle, Pré Garnoux, 30/06/2021, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus, L. Gilbertas.
4.6. Intérêt écologique
L’association du Radiolo linoidis–Polypogonetum maritimi peut être attribuée à l’habitat d’intérêt communautaire 3130 Eaux stagnantes, oligotrophes à mésotrophes avec végétation des Littorelletea uniflorae et/ou des Isoeto-Nanojuncetea. Elle abrite plusieurs espèces protégées au niveau régional et rares comme Solenopsis laurentia, Cicendia filiformis, Trifolium bocconei, Geranium lanuginosum.
5. L’association à Lythrum salicaria et Mentha aquatica
Lythro salicariae-Menthetum aquaticae ass. nov. hoc loco, typus nominis hoc loco : relevé 12 du tableau 3 hoc loco (relevés 9 à 25)
Valbonne (Alpes-Maritimes), la Brague, alt. 151 m, 16 juillet 2015, rec. 100 %, 32 taxons
Lycopus europaeus +, Urtica dioica 1, Helosciadium nodiflorum +, Eupatorium cannabinum subsp. cannabinum 3, Mentha aquatica 2, Lythrum salicaria 3, Scrophularia auriculata 1, Rumex conglomeratus +, Convolvulus sepium 1, Humulus lupulus +, Agrostis stolonifera 2, Ranunculus repens +, Rorippa sylvestris +, Carex pendula 3, Brachypodium sylvaticum +, Arctium minus +, Fraxinus angustifolia +, Alnus glutinosa 1, Acer negundo 1, Corylus avellana +, Poa trivialis +, Dactylis glomerata +, Ranunculus acris +, Trifolium pratense +, Equisetum arvense +, Helianthus tuberosus +, Chenopodium album +, Solanum lycopersicum +, Campanula trachelium 1, Cornus sanguinea +, Ficus carica +, Sambucus nigra +.
5.1. Position dans la classification phytosociologique
Filipendulo ulmariae-Convolvuletea sepium Géhu & Géhu-Franck 1987
Loto pedunculati-Filipenduletalia ulmariae H. Passarge (1975) 1978
Dorycnio recti-Rumicion conglomerati Gradstein & Smittenberg 1977
5.2. Physionomie
C’est une mégaphorbiaie, au recouvrement important (plus de 80 % en moyenne), à l’optimum en début d’été, dominée par Lythrum salicaria, Mentha aquatica, Eupatorium cannabinum, Carex pendula, Scrophularia auriculata, Agrostis stolonifera, Lycopus europaeus, Urtica dioica, Cyperus badius.
5.3. Composition floristique et synsystématique
L’association est composée de nombreuses espèces caractérisant la classe des Filipendulo ulmariae–Convolvuletea sepium : Eupatorium cannabinum, Mentha aquatica, Scrophularia auriculata, Rumex conglomeratus, Lycopus europaeus, parmi les plus fréquentes. La présence de Lotus rectus, Scirpoides holoschoenus, Epilobium hirsutum, Eupatorium cannabinum permet de rattacher l’association au Dorycnio recti-Rumicion conglomerati, qui rassemble les mégaphorbiaies méditerranéennes. Deux variations peuvent être distinguées :
– typicum (relevés 9 à 18), différenciée par la présence de Lycopus europaeus, Urtica dioica, Helosciadium nodiflorum, Scrophularia auriculata (photo 3) ;
– cyperetosum badii subass. nov. hoc loco (relevés 19 à 25), typus nominis hoc loco : relevé 21 du tableau 3 hoc loco, différencié essentiellement par Cyperus badius (photo 4)
Cogolin (Var), la Giscle, la Boulangerie, alt. 14 m, 30/06/2021. rec. 80 %, 19 taxons
Cyperus badius 1, Mentha aquatica 2, Lythrum salicaria 3, Rumex conglomeratus +, Agrostis stolonifera 3, Cyperus eragrostis +, Plantago major subsp. pleiosperma +, Brachypodium sylvaticum +, Galium aparine +, Ranunculus lanuginosus +, Phytolacca americana +, Fraxinus angustifolia 2, Populus nigra subsp. neapolitana 1, Platanus ×hispanica 2, Hedera helix +, Xanthium orientale subsp. italicum 1, Persicaria maculosa 1, Bidens frondosa +, Salix alba +.
Parmi les espèces relevant d’autres classes, on relève surtout Agrostis stolonifera, Ranunculus repens, Carex pendula, Cyperus eragrostis, Polypogon viridis (Agrostietea stoloniferae), Carex pendula, Brachypodium sylvaticum, Arctium minus (Galio aparines-Urticetea dioicae), Fraxinus angustifolia, Alnus glutinosa (Carpino betuli-Fagetea sylvaticae), Xanthium orientale subsp. italicum, Persicaria maculosa, Bidens frondosa (Bidentetea tripartitae). La richesse spécifique moyenne est de 27 pour la sous-association typicum et de 22 pour la sous-association cyperetosum badii.
Le Lythro salicariae-Menthetum aquaticae est proche du Loto recti-Lythretum salicariae (B. Foucault 2018) B. Foucault 2023 (de Foucault, 2018b, 2023), décrit de l’Aude. Il s’en différencie par la présence de Carex pendula, Helosciadium nodiflorum, Rumex conglomeratus, Cyperus badius, Ranunculus repens, Polypogon viridis, Rorippa sylvestris, l’absence de Phragmites australis, Equisetum telmateia, Lysimachia vulgaris, Cyperus longus et la rareté de Lotus rectus et Convolvulus sepium. Le Lythro salicariae-Menthetum aquaticae est également à rapprocher de l’association du Carici pendulae-Equisetetum telmateiae, qui est différente sur le plan écologique. Cette dernière s’en distingue principalement par la constance d’Equisetum telmateia, la fréquence plus grande de Lotus rectus, la rareté de Lythrum salicaria, Lycopus europaea, Urtica dioica, l’absence de Lycopus europaeus, Helosciadium nodiflorum, Cyperus badius.
5.4. Écologie, communautés en contact
Le Lythro salicariae-Menthetum aquaticae est une communauté mésohygrophile à hygrophile courtement inondable, héliophile, mésotrophile (sous-association cyperetum badii) à mésoeutrophile (sous-association typicum), de l’étage mésoméditerranéen à ombroclimat subhumide à humide, de basse altitude, du niveau de la mer à 173 m (dans nos relevés). Elle se rencontre sur des dépôts d’alluvions dans le lit et les berges de cours d’eau à régime hydrologique typiquement méditerranéen, pouvant présenter des étiages estivaux sévères, avec des secteurs en assec sur de longs linéaires. Elle se développe sur un sol alluvial limoneux ou riche en galets, plus rarement sur des banquettes de travertins formant des barrages dans les cours d’eau.
5.5. Répartition
La sous-association typicum a été observée principalement dans les Alpes-Maritimes, dans le cours de la Brague et de la Valmasque, la basse vallée du Var (réseau des « vallons obscurs »), la plaine des Maures (Var). La sous-association cyperetum badii a été relevée dans le massif des Maures, dans la Giscle et le Pansard (Var) et à l’embouchure de la Cagne (Alpes-Maritimes).
Localisation des relevés (tableau 3) – rel. 9 : Var, Le Cannet-des-Maures, Le Portal, 25/05/2022, observateurs V. Noble, M. Girardier ; rel. 10 : A.-M., La Roquette-sur-Var, vallon de Rieu, 7/7/2021, observateurs B. Offerhaus, P. Bravet ; rel. 11 : A.-M., Biot, la Brague, 25/05/2015, observateur B. Offerhaus ; rel. 12 : A.-M., Valbonne, la Brague, 16/07/2015, observateur B. Offerhaus ; rel. 13 : A.-M., Valbonne, la Brague, 16/07/2015, observateur B. Offerhaus ; rel. 14 : A.-M., Valbonne, la Brague, 16/07/2015, observateur B. Offerhaus ; rel. 15 : A.-M., Biot, la Valmasque, 06/06/2018, observateurs B. Offerhaus, P. Bravet ; rel. 16 : A.-M., Biot, la Bouillide, 29/06/2018, observateurs B. Offerhaus, P. Bravet ; rel. 17. A.-M., Biot, la Brague, 29/06/2018, observateurs B. Offerhaus, P. Bravet ; rel. 18 : A.-M., Valbonne, le Fugueiret, 26/06/2018, observateurs B. Offerhaus, M. Le Berre ; rel. 19 : Var, Grimaud, La Giscle, Pont de Bois, 30/06/2021, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus, L. Gilbertas ; rel. 20. Var, Grimaud, La Giscle, L’Amirauté, 30/06/2021 ; observateurs P. Bravet, B. Offerhaus, L. Gilbertas ; rel. 21 : Var, Cogolin, La Giscle, La Boulangerie, 30/06/2021, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus, L. Gilbertas ; rel. 22 : A.-M., Cagnes-sur-Mer, la Cagne, 29/06/2021, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus, L. Gilbertas ; rel. 23. Var, Grimaud, La Giscle, 30/06/2021, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus, L. Gilbertas ; rel. 24 : Var, La-Londe-Maures, Le Pansard, 06/09/2018, observateurs V. Noble, A. Carrouée ; rel. 25. Var, La-Londe-Maures, Le Pansard, 06/09/2018, observateurs V. Noble, A. Carrouée.
5.6. Intérêt écologique
Le Lythro salicariae-Menthetum aquaticae se rattache à l’habitat d’intérêt communautaire 6430 Mégaphorbiaies d’ourlets planitiaires à alpins. Cette communauté n’héberge pas d’espèce végétale particulièrement rare ou menacée. Néanmoins elle constitue un habitat important pour l’entomofaune, notamment le groupe des Lépidoptères et des Odonates.
6. L’association à Carex pendula et Equisetum telmateia
Carici pendulae-Equisetetum telmateiae B. Foucault 2021, tableau 3 (de Foucault, 2021)
6.1. Position dans la classification phytosociologique
Filipendulo ulmariae-Convolvuletea sepium Géhu & Géhu-Franck 1987
Loto pedunculati-Filipenduletalia ulmariae H. Passarge (1975) 1978
Dorycnio recti-Rumicion conglomerati Gradstein & Smittenberg 1977
6.2. Physionomie
C’est une mégaphorbiaie au recouvrement important (autour de 100 %), à l’optimum en début d’été, dominée par Carex pendula, Equisetum telmateia, Mentha aquatica, Scrophularia auriculata, Rubus caesius (photo 6).
6.3. Composition floristique et synsystématique
Cette association se définit par la combinaison de Carex pendula et Equisetum telmateia, accompagnés de taxons caractéristiques de l’alliance Dorycnio recti–Rumicion conglomerati et de la classe des Filipendulo ulmariae–Convolvuletea sepium : Eupatorium cannabinum, Mentha aquatica, Scrophularia auriculata, Rumex conglomeratus, Scirpoides holoschoenus, Epilobium hirsutum, Lotus rectus. Parmi les espèces relevant d’autres classes, on note la présence d’Agrostis stolonifera, Brachypodium sylvaticum, Rubus caesius, Equisetum arvense, Clematis vitalba, Rubus ulmifolius. La richesse moyenne est de 24 espèces.
6.4. Écologie, communautés en contact
Le Carici pendulae-Equisetetum telmateiae est une association mésohygrophile, hémihéliophile, mésoeutrophile, des étages mésoméditerranéen à supraméditerranéen à ombroclimat humide, de basse altitude (entre 17 et 219 m dans nos relevés). Elle se rencontre le long de petits ruisseaux aux berges argileuses (de Foucault, 2021), sur terrasse alluviale bordant des cours d’eau, ainsi qu’au niveau de sources dans des clairières forestières.
6.5. Répartition
Décrit du département de l’Aude (de Foucault, 2021), Le Carici pendulae-Equisetetum telmateiae est également présent dans les Alpes-Maritimes où il a été observé dans la basse vallée du Var (réseau des « vallons obscurs »), ainsi que dans la basse vallée du Loup et de l’Estéron.
Localisation des relevés (tableau 3) – rel. 1 : A.-M., Saint-Blaise, vallon de Saint-Blaise, 15/06/2005, observateurs B. Offerhaus, C. Frachon ; rel. 2 : A.-M., Castagniers, vallon de Donaréo, 10/06/2005, observateurs B. Offerhaus, C. Frachon ; rel. 3 : A.-M., Castagniers, vallon de Donaréo, 10/06/2005, observateurs B. Offerhaus, C. Frachon ; rel. 4 : A.-M., Nice, vallon de Lingostière, 08/06/2005, observateurs B. Offerhaus, C. Frachon ; rel. 5. A.-M., Saint-Blaise, vallon de Saint-Blaise, 07/07/2021, observateurs B. Offerhaus, P. Bravet ; rel. 6 : A.-M., Nice, vallon de Saint-Sauveur, 18/05/2021, observateurs B. Offerhaus, L. Gilbertas ; rel. 7 : A.-M., Villeneuve-Loubet, la Serre Vieille, le long du Loup, 27/05/2002, observateurs B. Offerhaus, C. Frachon ; rel. 8. A.-M., Colomars, ravin des Vallières, 23/06/2005, observateurs B. Offerhaus, C. Frachon.
6.6. Intérêt écologique
Le Carici pendulae-Equisetetum telmateiae est assimilable à l’habitat d’intérêt communautaire 6430 Mégaphorbiaies d’ourlets planitiaires à alpins. Cette association n’abrite pas d’espèce végétale particulièrement rare ou menacée. Néanmoins elle constitue certainement un habitat important pour l’entomofaune, notamment le groupe des Lépidoptères et des Odonates.
7. L’association à Chelidonium majus et Ranunculus lanuginosus
Chelidonio majoris-Ranunculetum lanuginosi ass. nov. hoc loco, typus nominis hoc loco : relevé 4 du tableau 4 hoc loco
Cogolin (Var), la Giscle, zone d’activités Font-Mourier, alt. 5 m, 12 mai 2021, rec. 100 %, 23 taxons
Ranunculus lanuginosus 2, Chelidonium majus 3, Symphytum tuberosum +, Galium aparine 2, Lamium maculatum 2, Brachypodium sylvaticum 1, Anthriscus sylvestris subsp. sylvestris 2, Urtica dioica 3, Lunaria annua +, Arum italicum +, Geum urbanum +, Cirsium vulgare +, Fumaria capreolata 2, Geranium purpureum 1, Stellaria ruderalis +, Galactites tomentosus +, Rubus caesius 2, Hedera helix 2, Euonymus europaeus 1, Galium mollugo +, Arundo donax 1, Laurus nobilis +, Araujia sericifera 2.
7.1. Position dans la classification phytosociologique
Galio aparines-Urticetea dioicae H. Passarge ex Kopecký 1969
Galio aparines–Alliarietalia Oberd. in Görs & T. Müll. 1969
Geo urbani-Alliarion petiolatae W. Lohmeyer & Oberd. ex Görs & T. Müll. 1969
7.2. Physionomie
Cette association d’ourlet vivace à développement vernal est dominée par Ranunculus lanuginosus et Chelidonium majus, accompagnés des espèces suivantes, au recouvrement significatif : Alliaria petiolata, Galium aparine, Lamium maculatum, Brachypodium sylvaticum, Allium triquetrum, Fumaria capreolata (photos 6 et 7). Des espèces forestières peuvent aussi tapisser le sol comme Hedera helix, Rubus caesius et R. ×uncinellus. Le recouvrement de la végétation est toujours important, entre 90 et 100 % dans nos relevés.
7.3. Composition floristique et synsystématique
La combinaison caractéristique est formée par Ranunculus lanuginosus, Chelidonium majus, Alliaria petiolata, Symphytum tuberosum. L’association appartient à la classe des Galio aparines-Urticetea dioicae, à l’ordre des Galio aparines-Alliarietalia petiolatae et à l’alliance du Geo urbani-Alliarion petiolatae, dont elle possède de nombreuses caractéristiques : Galium aparine, Lamium maculatum, Brachypodium sylvaticum, Allium triquetrum, Anthriscus sylvestris subsp. sylvestris, Ballota nigra subsp. foetida, Carex pendula, Urtica dioica, Lunaria annua, Arum italicum. Parmi les espèces compagnes, on relève Rubus caesius, Hedera helix, Rubus ×uncinellus, Poa trivialis, Rumex conglomeratus, Saponaria officinalis, et de nombreuses espèces annuelles présentes en mosaïque de la classe des Cardaminetea hirsutae Géhu 2000 : Fumaria capreolata, Geranium purpureum, Stellaria ruderalis, Anisantha sterilis, Rhagadiolus edulis, Calepina irregularis, Geranium rotundifolium, et des espèces de la classe des Sisymbrietea officinalis Korneck 1974, indicatrices de sols perturbés : Anisantha diandra, Knautia integrifolia, Erigeron floribundus, Raphanus raphanistrum, Galactites tomentosus. La richesse moyenne de l’association est de 28 espèces. Le Chelidonio majoris-Ranunculetum lanuginosi est proche d’une association comparable écologiquement et floristiquement, le Lamio maculati–Symphytetum bulbosi Offerhaus 2013, présent dans la région littorale des Alpes-Maritimes (Offerhaus, 2013). Cette dernière s’en distingue par la constance et l’abondance de Symphytum bulbosum, la constance de Arum italicum, la fréquence élevée de Carex pendula, Ficaria verna, Geum urbanum et la rareté de Chelidonium majus.
7.4. Écologie, communautés en contact
Le Chelidonio majoris–Ranunculetum lanuginosi est un ourlet mésohydrique, hémi-héliophile, méso-eutrophile, se développant à l’étage mésoméditerranéen à ombroclimat subhumide, à basse altitude, de 4 à 52 m (dans nos relevés). Cette association occupe des sols alluvionnaires frais à texture limoneuse ou sableuse. Le substrat géologique sous-jacent est de nature siliceuse : gneiss et micaschistes. Elle se rencontre sur des berges de cours d’eau, des terrasses alluviales, bordant des ripisylves à Fraxinus angustifolia et Ulmus minor (Carici remotae–Fraxinetum angustifoliae Pedrotti 1970 corr. 1992), des canniers à Arundo donax (Clematido vitalbae–Arundinetum donacis Biondi & Allegrezza 2004) et parfois sous peuplement clairiéré de Robinia pseudoacacia et Platanus ×hispanica. La pente est nulle sur les terrasses alluviales et est comprise entre 10 et 50° sur les talus de berges.
7.5. Répartition
Le Chelidonio majoris–Ranunculetum lanuginosi a été observé en Provence cristalline, dans le département du Var, dans les vallées de la Môle, la Giscle et la Siagne, cette dernière constituant sa limite orientale. Plus à l’est dans les Alpes-Maritimes, il est remplacé dans les milieux similaires par le Lamio maculati–Symphytetum bulbosi.
Localisation des relevés (tableau 4) – rel. 1 : Var, Grimaud, La Giscle, L’Amirauté, 07/04/2021, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; Rel. 2 : Var, Grimaud, La Giscle, confluence du vallon de la Tour, 17/05/2021, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus, L. Gilbertas ; rel. 3 : Var, Cogolin, La Môle, les Faïsses, 06/05/2022, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; rel. 4 : Var, Cogolin, la Giscle, zone d’activités Font-Mourier, 12/05/2021, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; rel. 5 : Var, Tanneron, La Siagne, Le Darboussier, 05/05/2021, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; rel. 6 : Var, Cogolin, la Giscle, zone d’activités, 12/05/2021, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; Rel. 7 : Var, La Môle, La Môle, Gontier, 06/05/2022, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus ; rel. 8 : Var, Cogolin, La Môle, Grande Bastide, 06/05/2022, observateurs P. Bravet, B. Offerhaus.
7.6. Intérêt écologique
Le Chelidonio majoris–Ranunculetum lanuginosi, comme les autres associations de l’alliance du Geo urbani–Alliarion petiolatae, relève de l’habitat d’intérêt communautaire 6430 Mégaphorbiaies d’ourlets planitiaires à alpins. Cette association contribue de plus à la richesse et à l’originalité des complexes riverains du littoral varois, dont les zones humides régressent toujours plus devant la pression de l’urbanisation et des aménagements.
8. Conclusion
L’étude phytosociologique de la végétation herbacée rivulaire des fleuves côtiers méditerranéens du Var et des Alpes-Maritimes a permis de définir quatre nouvelles associations végétales : le Spirantho aestivalis–Gratioletum officinalis, le Radiolo linoidis–Polypogonetum maritimi, le Lythro salicariae-Menthetum aquaticae et le Chelidonio majoris-Ranunculetum lanuginosi et d’étendre l’aire de répartition du Carici pendulae-Equisetetum telmateiae, initialement décrit de l’Aude. À l’heure où la ressource en eau s’amenuise de façon préoccupante dans le bassin méditerranéen dans le contexte du changement climatique en cours, couplé à un aménagement et une artificialisation toujours croissants des espaces naturels côtiers, entraînant un déclin du nombre et de la qualité des zones humides, il apparaît primordial de protéger strictement ces milieux humides d’intérêt communautaire, hébergeant une faune et une flore du plus haut intérêt.
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