Observation de plusieurs populations de Lycopsis orientalis L., 1753 dans le Puy-de-Dôme

Title

Observation of several populations of Lycopsis orientalis L., 1753 in Puy-de-Dôme

Résumé

Plusieurs populations de Lycopsis orientalis L., 1753 ont été observées dans le Puy-de-Dôme en mai 2020. La présente note reprend la nomenclature et les critères d’identification de l’espèce, sa répartition actuelle, ainsi que la description des stations découvertes.

Abstract

Several populations of Lycopsis orientalis L., 1753 were observed in the Puy-de-Dôme in May 2020. This note sets out the nomenclature and identification criteria for the species, its current distribution and a description of the sites discovered.

1. Nomenclature

Lycopsis orientalis L., 1753 est une plante de la famille des Boraginaceae. Ses anciens noms Anchusa orientalis (L.) Rchb. f., 1858, A. arvensis subsp. orientalis (L.) Nordh., 1940 ou encore A. ovata Lehm., 1818 indiquent la proximité de ce genre avec Anchusa. Dans Flora Gallica (Tison & de Foucault, 2014), le critère permettant de différencier ces deux genres concerne le tube de la corolle : courbé en « S » pour Lycopsis et (sub)droit pour Anchusa.

 

2. Description et critères d’identification

Lycopsis orientalis L. 1753 est une plante annuelle de 20 à 50 cm, hérissée de soies raides très étalées, à tiges dressées ou ascendantes. Les fleurs sont bleuâtres, petites, à tube courbé en S. Elles sont groupées en grappes plus ou moins compactes dès l’anthèse. Les feuilles caulinaires médianes sont ovales, sessiles et peu ondulées. Les fruits sont des tétrakènes.

Il existe une autre espèce de Lycopsis en France, Lycopsis arvensis L., 1753. La différenciation des deux espèces se fait par l’observation de plusieurs critères. Le calice fructifère dépasse généralement 12 mm chez L. orientalis alors qu’il dépasse rarement 10 mm chez L. arvensis. L’inflorescence est plus lâche dès l’anthèse chez L. orientalis (photo 1). Le tube de la corolle est également différent chez les deux taxons : la courbure est située à la base du tube chez L. orientalis alors que chez L. arvensis elle est située vers le milieu (photo 2). Les feuilles caulinaires médianes sont plus larges et moins ondulées chez L orientalis (photo 3). Lorsque les deux espèces poussent en mélange, comme c’est le cas dans les stations découvertes dans le Puy-de-Dôme, les differences sont plus faciles à apprécier (photo 4).

Photo 1. Lycopsis orientalis, inflorescence ; L. Giardi, CC-BY-NC-ND. 
Photo 2. Lycopsis orientalis, tube de la corolle ; F. Le Driant, CC-BY-NC-ND. 
Photo 3. Lycopsis orientalis, feuille caulinaire ; L. Giardi, CC-BY-NC-ND. 
Photo 4. Lycopsis arvensis (à droite) et L. orientalis (à gauche) ; L. Giardi, CC-BY-NC-ND.

3. Répartition

Lycopsis orientalis est une espèce indigène du sud-est de l’Europe jusqu’à l’ouest de l’Asie (carte 1). On la retrouve également à l’état spontané jusqu’en Éthiopie. En France, il a été récemment découvert dans l’Aube et dans la région d’Amiens (Wattez & Reveillard, 2020), et est connu du Massif central, du Languedoc-Roussillon et du Alpes du Sud (carte 2).

En Auvergne, cette espèce est citée à Montaigut-le-Blanc, à proximité d’un jardin (Frain & Billy, 1996), et à Aurillac par Jean Sapaly en 1967 (comm. pers. CBNMC). Elle est notée comme « très rare » par l’Université de Clermont-Ferrand. La répartition mentionnée pour le département est « Très localisée, vallées des Couzes, dans le Puy-de-Dôme » (https://e-flore-puydedome.herbiers.uca.fr/items/show/39526, consulté le 28/12/2023). Cette vallée se situe à proximité des stations observées en 2020.

Carte 1. Répartition mondiale de Lycopsis orientalis ; World Checklist of Vascular Plants, 2023. 
Carte 2. Répartition française de Lycopsis orientalis avant la découverte de Wattez & Reveillard ; FCBN, 2016. 

4. Description des stations découvertes

Lycopsis orientalis a été observé en mai 2020 à plusieurs endroits entre Issoire et Clermont-Ferrand, dans le Puy-de-Dôme (63). L’originalité de cette zone est sa géologie : la plaine de Limagne est un bassin sédimentaire qui s’est formé suite à la fracturation du socle continental ancien il y a environ 35 MA. Les Limagnes sont principalement composées de formations marno-calcaires et d’arkoses (photo 5) avec des sols enrichis par les cendres volcaniques qui sont parmi les plus fertiles de France.

Photo 5. Arkoses ; L. Giardi, CC-BY-NC-ND.  

La plus grande station de Lycopsis orientalis se situe dans une culture fourragère (photo 6), en compagnie d’autres espèces messicoles rares dans la région comme Adonis annua, A. flammea, Caucalis platycarpos, etc. Le milieu dans lequel se développent les individus observés semble se rattacher à l’alliance du Caucalidion platycarpi Tüxen ex von Rochow 1951. En effet, il s’agit d’un ensemble d’espèces annuelles commensales de cultures basiphiles mésophiles. Lycopsis orientalis est considéré ici comme une espèce naturalisée, et non accidentelle. Les populations sont dispersées en différentes parcelles agricoles dans la vallée et les individus forment des populations fructifiant normalement et regroupant jusqu’à plusieurs centaines d’individus. Il s’agit donc de populations autonomes

Photo 6. Culture fourragère ; L. Giardi, CC-BY-NC-ND.

5. Remarques

Il est possible de trouver des individus dont les critères morphologiques se situent entre les deux taxons décrits. Selon Flora Gallica, « Hybride (possible) : au moins 1 population à morphologie intermédiaire existe dans les Hautes-Alpes ; à rechercher et à étudier ». Sur les différentes parcelles inventoriées trois types d’individus ont en effet été observés : des Lycopsis orientalis et des L. arvensis bien types, mais également certaines formes dont les critères morphologiques semblaient intermédiaires.

Selon Jean-Marc Tison (comm. pers.) cette espèce serait en fait plus commune qu’il ne semble et se trouverait fréquemment dans le Midi. Il serait donc judicieux à l’avenir d’ouvrir les yeux sur les Lycopsis que l’on rencontre, afin d’affiner les connaissances de ce taxon en France.

Bibliographie

Frain M. & Billy F., 1996. Complément floristique : région Auvergne. Revue des sciences naturelles d’Auvergne 60 : 59-61.

Tison J.-M. & de Foucault B., 2014. Flora Gallica, Flore de France. Biotope, Mèze, xx + 1 196 p.

Wattez J.-R. & Reveillard C., 2020. La présence méconnue de Lycopsis orientalis L. dans la France septentrionale (Champagne et Picardie). Bulletin de la Société de botanique du nord de la France 73 (1-4) : 9-14.

Remerciements

L’auteur tient à remercier Aurélien Labroche pour la transmission des données, Jean-Marc Tison pour les échanges et Franck Le Driant pour les photographies.