Mise à jour des listes des Trachéophytes de Martinique (Petites Antilles)

Title

Update of the lists of Tracheophytes of Martinique (Lesser Antilles)

Résumé

Cette nouvelle mise à jour de la liste floristique (Trachéophytes) pour la Martinique (Petites Antilles) présente quinze nouvelles mentions d’espèces indigènes et quatorze espèces exotiques naturalisées. Ces nouvelles mentions viennent compléter les différents travaux d’inventaires floristiques effectués sur l’île.

Abstract

This new update of the floristic list (Tracheophytes) for Martinique (Lesser Antilles), presents fifteen new native species and fourteen naturalized alien species. These new mentions complement the various floristic inventory work carried out on the island.

1. Introduction

Cette mise à jour fait suite à la mise à jour des Trachéophytes de Martinique et Guadeloupe (Ferlay et al., 2023). Durant la fin de l’année 2023 et l’année 2024, de nouvelles espèces ont été répertoriées en Martinique, s’ajoutant à la liste actuelle présentant environ 2 950 espèces. Au total, quinze nouvelles espèces indigènes et quatorze espèces exotiques et naturalisées sont présentées ici. Parmi les espèces indigènes, certaines sont endémiques des Petites Antilles ou à répartition très restreinte, ce qui amène de nouveaux éléments intéressants d’un point de vue biogéographique. L’article s’intéresse aussi à quelques espèces signalées par certains botanistes (Fournet, 2002 ; Rollet, 2010), mais une étude approfondie a permis d’éclaircir certaines ambiguïtés. De la même manière, certains taxons concernés par des récoltes historiques, notamment celles du R.P. Antoine Duss, n’étaient pas prises en compte dans les index taxonomiques. Ces taxons ont été retrouvées et récoltées, attestant ainsi leur présence en Martinique.

La nomenclature utilisée pour les nouvelles mentions est conforme au COL (Catalogue of Life, version 2024-08-29) et à POWO (Plants of the World Online, 2024). Ces nouvelles mentions ont comme référence pour la grande majorité des prélèvements d’herbiers consultables à l’Herbier de Martinique MTK, Herbier enregistré à l’Index Herbariorum, et des doubles vont être déposés dans différents herbiers internationaux (P, NY, UPRRP).

L’annexe 1 de cet article synthétise les nouvelles observations pour la Martinique, ainsi que les statuts pour les différentes espèces.

 

2. Les nouveaux taxons indigènes

 

Asplenium dentatum subsp. barbadense (Jenman) Christenh. (Aspleniaceae) ; photos 1 et 2

Voucher : MTK6890.

Sainte-Anne, morne Caritan, forêt semi-xérophile sur blocs calcaires, 138 m (B. Ferlay & J. Mbangue Ekoko, 20.03.2024).

Cette petite fougère calcicole a été découverte dans l’une des rares zones calcaires de Martinique, sur la commune de Sainte-Anne. La station comporte peu d’individus, qui se développent dans les microcavités des rochers. L’espèce ne semble pas être menacée, et le morne Caritan fait l’objet d’un arrêté préfectoral de protection de biotope (APPB). Des prospections complémentaires et des actions de conservation sont préconisées afin de compléter les connaissances sur cette espèce en Martinique et assurer son maintien dans le milieu naturel. Alors que l’espèce est répartie sur l’ensemble de la Caraïbe et sur le continent (Amérique centrale et nord de l’Amérique du Sud), la sous-espèce barbadense est endémique des Petites Antilles.

Répartition : endémique des Petites Antilles (Guadeloupe, Marie-Galante, Martinique !, Barbade).

Photo 1. Asplenium dentatum subsp. barbadensis ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND.
Photo 2. Asplenium dentatum subsp. barbadensis ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND

Chamaecrista serpens (L.) Greene var. serpens (Fabaceae) ; photos 3 et 4

Voucher : MTK7083.

Sainte-Anne, Vierge des marins, 12 m (A. Arnaud & S. Marie-Louise, 02.10.2024)

Cette herbacée de la sous-famille des Caesalpinioideae a été observée en prairie semi-xérophile sous influence littorale. Elle se différencie des autres espèces du même genre présentes en Martinique par des pédoncules relativement longs, égalant parfois la taille de la feuille adjacente. Cette seule population connue pour le moment est de belle taille avec plusieurs dizaines d’individus, qui fleurissent et fructifient. Néanmoins la station se situe en bordure de sentier, ce qui pourrait impacter la population. Il serait intéressant de mener des prospections ciblées dans des végétations équivalentes afin de détecter d’autres populations.

Répartition : Amérique du Nord, Amérique centrale, Amérique du Sud, Grandes Antilles (Cuba, Jamaïque), Petites Antilles (Martinique !).

Photo 3. Chamaecrista serpens var. serpens ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND.
Photo 4. Chamaecrista serpens var. serpens ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND

Cissus microcarpa Vahl (Vitaceae) ; photos 5 et 6

Voucher : NY1560620, MTK6787, MTK6795.

Grand’Rivière, habitation Potiche (R.P. Duss, 1901) ; Grand’Rivière, Beauséjour, forêt mésophile, 126 m (B. Ferlay, 17.11.2023) ; Fort-de-France, Floréal, forêt mésophile dégradée, 131 m (B. Ferlay, A. Thésée, J. de Reviers & H. Florance, 08.12.2023).

Cette liane a été récoltée par le R.P. Duss en 1901 sur la commune de Grand’Rivière (Duss 4648, NY1560620). Pour une raison inconnue, cette observation n’est mentionnée dans aucun document et n’est donc pas prise en compte dans les référentiels. Cette espèce a finalement été retrouvée en 2023 dans deux localités, attestant la présence de l’espèce en Martinique. La station de Grand’Rivière n’est pas menacée. En revanche, la station de Fort-de-France, située en milieu urbain, pourrait être menacée par la destruction de l’habitat.

Répartition : Amérique centrale, Amérique du Sud tropicale, Grandes Antilles, Petites Antilles (Dominique, Martinique !, Saint-Vincent).

Photo 5. Cissus microcarpa ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND
Photo 6. Cissus microcarpa ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND

Desmanthus leptophyllus Kunth (Fabaceae)

Voucher : NY1513063, MTK5903.

Saint-Pierre et Trois-Îlets (R.P. Duss, 1881) ; Case-Pilote, Vétiver, berge de rivière, 16 m (B. Ferlay & H. Florance, 06.12.2021).

Cette herbacée de la sous-famille des Mimosoideae semble affectionner les berges des rivières. Fournet (2002) ne signale qu’une seule espèce du genre Desmanthus pour les Antilles françaises, D. virgatus (L.) Willd. Pourtant, Melissa Luckow, dans sa monographie de ce genre (1993), signale déjà D. leptophyllus comme présent en Martinique (Duss 1150, NY). Depuis, Taxref considère cette espèce comme y étant douteuse. La découverte récente confirme la présence de cette espèce sur l’île. Elle semble néanmoins avoir été largement sous-prospectée ou confondue avec les autres espèces du même genre.

Répartition : Amérique centrale, Amérique du Sud tropicale, Grandes Antilles, Petites Antilles (Guadeloupe, Martinique !).

 

Desmanthus pernambucanus (L.) Thell. (Fabaceae) ; photos 7 et 8

Voucher : US2444394, MTK6796.

Fort-de-France, Hôpital colonial de Fort-de-France, 60 m (H. Stehlé & M. Stehlé, 23.12.1938) ; Le Robert, Pointe Savane, mangrove, 18 m (B. Ferlay & J. de Reviers, 12.12.2023) ; Les Trois-Îlets, îlets des Trois-Îlets, arrière-mangrove, 2 m (B. Ferlay & J. de Reviers, 13.01.2024).

Cette espèce semble affectionner les zones humides ou semi-humides proches du littoral. De la même manière que D. leptophyllus (voir supra), elle n’a pas été signalée par Fournet (2002). Cependant, Melissa Luckow, dans sa monographie du genre Desmanthus (1993), signale l’espèce comme présente en Martinique (Egler 89-47, NY, échantillon non retrouvé). Aussi, une récolte a été effectuée à Fort-de-France par H. Stehlé et M. Stehlé en 1938. Considérée comme ayant une présence douteuse en Martinique par Taxref, cette espèce est finalement bien présente sur le territoire martiniquais.

Répartition : Amérique du Sud tropicale (Brésil), Grande Antilles, Petites Antilles.

Photo 7. Desmanthus pernambucanus ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND.
Figure 8. Desmanthus pernambucanus ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND

Ctenodon viscidulus (Michx.) D.B.O.S. Cardoso & A. Delgado (Fabaceae) ; photos 9 et 10

Voucher : MTK6790.

Le Marin, morne Sulpice, ourlet semi-xérophile rocailleux sur crête, 235 m (B. Ferlay & A. Thésée, 21.11.2023).

Cette petite herbacée était signalée en Guadeloupe, connue seulement d’une récolte du Père Duss (Duss 3923) et non retrouvée depuis. Facilement reconnaissable avec son port prostré et ses tiges longuement rampantes, la station du morne Sulpice ne présente que quelques individus, qui se développent sur les roches affleurantes de la crête de ce morne. Des indices montrent la présence de caprins, pouvant porter atteinte au maintien de la population. Il serait intéressant de mettre en place des actions de conservation pour conserver l’espèce en pépinière ex situ et de réaliser des prospections complémentaires sur les crêtes rocheuses aux alentours.

Répartition : Amérique du Nord, Amérique centrale, Amérique du Sud tropicale, Grandes Antilles, Petites Antilles (Guadeloupe, Martinique !, Sainte-Lucie).

Photo 9. Ctenodon viscidulus ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND
Photo 10. Ctenodon viscidulus ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND

Hexasepalum apiculatum (Willd.) Delprete & J.H. Kirkbr. (Rubiaceae) ; photos 11 et 12

Voucher : MTK7082.

Sainte-Anne, Vierge des marins, 20 m (A. Arnaud & S. Marie-Louise, 02.10.2024)

Cette herbacée a été observée en prairie semi-xérophile sous influence littorale. Espèce à tempérament xérique, il est très probable qu’elle soit en phase de colonisation des milieux les plus secs des Petites Antilles depuis les Grandes Antilles et le nord des Petites Antilles. Bien que la population connue comporte de nombreux individus, elle est très restreinte dans l’espace, recouvrant moins de 10 m². Située à proximité d’un sentier de randonnée, la population est potentiellement menacée. Il paraît important de prospecter cette espèce dans d’autres habitats similaires afin de découvrir d’autres populations.

Répartition : Amérique du Nord, Amérique centrale, Amérique du Sud, Grandes Antilles, Petites Antilles (Anguilla, Saint-Eustache, Saint-Martin, Martinique !).

Photo 11. Hexasepalum apiculatum ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND.
Photo 12. Hexasepalum apiculatum ; A. Arnaud, CC-BY-NC-ND

Hirtella pendula Sol. ex Lam. (Chrysobalanaceae) ; photos 13 et 14

Voucher : MTK6668.

Rivière-Pilote, forêt de Lépinay, forêt méso-hygrophile, 341 m (B. Ferlay, A. Arnaud, J. Mbangue Ekoko & S. Montout, 05.01.2023 ; B. Ferlay & A. Thésée, 18.10.2023).

Cette espèce était déjà signalée comme étant présente en Martinique dans Taxref, sur la base de la flore de Fournet (2002), qui l’indique présente mais non récemment récoltée sur le territoire. Cette information est erronée. En effet, certaines récoltes ont apporté des confusions dans la répartition de l’espèce. Par exemple, la récolte du Père Duss (Duss 1904, NY1559822, US1021376), avec une étiquette imprimée précisant « Herbier de la Martinique », correspond à une récolte faite sur l’île de Sainte-Lucie, dans les alentours de Castries. Jusqu’alors, cette espèce était donc signalée par erreur en Martinique. Plus récemment, Rollet (2010) dans son guide sur les arbres des Petites Antilles, sans donner de précisions, n’indique pas H. pendula comme étant présente en Martinique. En janvier 2023, plusieurs individus ont été détectés à l’état végétatif. C’est plus tard que l’espèce a finalement été observée en fleurs et fruits, levant ainsi les doutes. Cette espèce endémique des Petites Antilles est finalement présente en Martinique. La station, située dans une forêt domaniale de l’ONF, présente quelques dizaines d’individus et ne semble pas être menacée.

Répartition : endémique des Petites Antilles (Guadeloupe, Martinique !, Sainte-Lucie).

Photo 13. Hirtella pendula ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND.
Photo 14. Hirtella pendula ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND

Mimosa diplotricha C. Wright (Fabaceae) ; photos 15 et 16

Voucher : MTK7165.

La Trinité, Desmarinières, bordure de champ de canne, alt. 86 m (B. Ferlay, S. Gonzalez, A. Lesimple & T. Hattermann, 19.11.2024).

Cette liane de la sous-famille des Mimosoideae est facilement reconnaissable par ses épines acérées. Caractéristique des milieux dégradés (Barneby, 1991), elle n’est aujourd’hui connue que d’une lisière de champ de canne à sucre. Cette découverte récente peut s’expliquer par les très faibles prospections menées dans ce type de milieu. Il serait donc pertinent de réaliser des inventaires ciblés sur cette espèce afin d’obtenir un aperçu plus précis de sa répartition en Martinique. Cette espèce mérite également d’être recherchée dans les autres îles des Petites Antilles.

Répartition : Amérique centrale, Amérique du Sud tropicale, Grandes Antilles, Petites Antilles (Martinique !).

Photo 15. Mimosa diplotricha ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND
Photo 16. Mimosa diplotricha ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND.

Panicum dichotomiflorum Michx. (Poaceae)

Voucher : MTK7034.

Le Morne-Rouge, morne Calebasse, prairie hygrophile, alt. 763 m (B. Ferlay & J. de Reviers, 12.07.2024).

Cette espèce herbacée est connue des Petites Antilles uniquement de la Guadeloupe. C’est Zuloaga qui, dans sa révision des Panicum Sect. Dichotomiflora (2022), précise qu’un échantillon de Duss, récolté en Guadeloupe (Duss 3180), correspond à cette espèce. Aucun échantillon de cette espèce n’a été détecté pour la Martinique. Ce taxon y a finalement été trouvé, connu aujourd’hui d’une seule station présentant plusieurs dizaines d’individus, dans une prairie hygrophile. La station ne semble pas être menacée. À rechercher dans les autres îles des Petites Antilles.

Répartition : Amérique du Nord, Amérique centrale, Amérique du Sud tropicale, Grandes Antilles, Petites Antilles (Guadeloupe, Martinique !).

 

Paullinia plumieri Triana & Planch. (Sapindaceae) ; photos 17 et 18

Voucher : US700059, NY1307958, L2315921, L2315922, BR124997, NY195711, NY195823, P114487, US700070, US700058, MTK7068.

Martinique (sans localisation) (Sieber, 1833) ; Prêcheur, habitation l’Hermitage, 50-130 m (R.P. Duss, 1883, 1899) ; Fort-de-France, Tivoli, forêt et taillis mésophytiques, 320 m (H. Stehlé & M. Stehlé, 12.12.1943) ; Le Vauclin, montagne du Vauclin, versant est, 500 m (Oldeman & Maurice, 09.04.1968) ; Saint-Esprit, Roussane, haie mésophile de bord de route, 83 m (A. Thésée & J. de Reviers, 01.08.2024) ; Le Vauclin, montagne du Vauclin, forêt mésophile, 400 m (B. Ferlay, J. de Reviers & M. Précart, 04.08.2024) ; Le Vauclin, morne Firmin, lisière de forêt mésophile, 383 m (B. Ferlay & J. De Reviers, 04.08.2024) ; Grand’Rivière, Beauséjour, lisière de forêt mésophile, 111 m (B. Ferlay, 12.09.2024), Malakoff, lisière de forêt mésophile, 203 m (B. Ferlay, 12.09.2024).

Malgré plusieurs récoltes, notamment depuis 1833 (Sieber 302), cette espèce n’a pas été reprise par les auteurs des différentes listes taxonomiques pour les Antilles comme présente en Martinique (Fournet, 2002 ; Acevedo-Rodriguez & Strong, 2012). Le Père Duss (Duss 1481, 4390) observe cette espèce seulement au Prêcheur et précise sur ses étiquettes que « cette plante ne doit plus exister à la Martinique », en faisant référence à la catastrophe de 1902 qui a impacté les secteurs où il avait observé l’espèce (commune du Prêcheur). D’autres récoltes ont été effectuées par H. et M. Stehlé (1943) puis par Oldeman et Maurice (1968), avant de retomber dans l’oubli jusqu’en 2024. Il est probable que, durant de nombreuses années, cette espèce fut confondue avec un autre genre de la famille des Sapindaceae, le genre Cardiospermum. Néanmoins, l’observation des inflorescences et des fruits lève tous les doutes (les capsules sont coriaces et les inflorescences en racème chez P. plumieri). Ces lacunes ne permettent pas d’établir un diagnostic sur l’état de conservation de cette espèce, sûrement sous-prospectée pour causes de confusions à l’état végétatif.

Répartition : Îles Vierges britanniques (Tortola), Petites Antilles (Antigua, Guadeloupe, Martinique !, Grenade).

Photo 17. Paullinia plumieri ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND
Photo 18. Paullinia plumieri ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND

Plukenetia volubilis L. (Euphorbiaceae) ; photos 19 et 20

Voucher : W177805, MTK6742, MTK6753.

Martinique (sans localisation) (Hahn, sans date) ; montagne du Vauclin, Calvaire début du chemin de croix n° 2 (C. Auguste, P. Rancelli, E. Etifier-Chalono & M. Delblond, 04.06.2021 ; P. Rancelli, 06.09.2023) ; Saint-Esprit, Peter Mailler, ripisylve mésophile, alt. 52 m (B. Ferlay, 07.07.2023) ; Le Vauclin, montagne du Vauclin, forêt mésophile dégradée, alt. 408 m (B. Ferlay & J. Mbangue Ekoko, 19.07.2023).

Cette liane relativement puissante a été observée pour la première fois en Martinique dans les années 1860-1870 par Hahn (Hahn 1278). Cet échantillon, ne précisant ni date ni localisation précise, a été oublié dans les différentes listes taxonomiques (Fournet, 2002 ; Acevedo-Rodriguez & Strong, 2012). Pourtant cette espèce a été retrouvée par C. Auguste et al. sur la montagne du Vauclin. Elle a ensuite été observée dans d’autres localités, confirmant la présence de ce taxon en Martinique.

Répartition : Amérique centrale, Amérique du Sud tropicale, Petites Antilles (Dominique, Martinique !, Sainte-Lucie).

Photo 19. Plukenetia volubilis ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND
Photo 20. Plukenetia volubilis ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND

Portulaca quadrifida L. (Portulacaceae) ; photos 21 et 22

Voucher : US2443874, US2443878, MTK7080.

La Trinité, Gros Morne, alt. 150 m (M. & H. Stehlé, 12.04.1939) ; Sainte-Anne, Salines, sables littoraux calcaires, alt. 5 m (M. & H. Stehlé, 02.09.1942) ; Saint-Anne, Les Anglais des Grottes, fourrés semi-xérophiles d’arrière-mangrove (A. Arnaud & A. Carolé, 12.09.2024).

Le statut de cette espèce est discutable. Certains auteurs comme Acevedo-Rodriguez & Strong (2012) considèrent cette espèce comme indigène de la Caraïbe ; Taxref conserve ce statut. Pourtant, la plupart des référentiels internationaux considèrent l’espèce indigène du continent africain et asiatique, et introduite dans la Caraïbe (POWO, 2024 ; CABI, 2024). En Guadeloupe, où l’espèce est présente, des récoltes attestent sa présence dès 1897 (Duss 3884). Nous considérons donc également cette espèce comme indigène des Petites Antilles. L’espèce a été récoltée dès 1939 en Martinique, sans être prise en compte dans les référentiels et bases de données. C’est grâce à une découverte de cette espèce en 2024, sur la commune de Sainte-Anne, qu’il a été possible de mettre en lumière la présence de cette espèce en Martinique. Cette espèce, bien que considérée comme exotique, ne semble pas avoir de caractère envahissant. Il serait intéressant de faire des recherches approfondies afin de clarifier le statut biogéographique de ce taxon.

Répartition : Afrique, Asie, Grandes Antilles et Petites Antilles (Anguilla, Saint-Martin, Saint-Barthélémy, Saint-Eustache, Saint-Kitts, Guadeloupe, Martinique !, Barbade).

Photo 21. Portulaca quadrifida ; A. Carolé, CC-BY-NC-ND.
Photo 22. Portulaca quadrifida ; A. Carolé, CC-BY-NC-ND.

Spermacoce latifolia Aubl. (Rubiaceae) ; photos 23 et 24

Voucher : MTK7011.

L’Ajoupa-Bouillon, Trianon, bordure de cultures maraîchères, alt. 695 m (B. Ferlay, 26.03.2024) ; L’Ajoupa-Bouillon, Dufailly, friche à rudérales, alt. 209 m (B. Ferlay, 28.03.2024) ; Saint-Pierre, Pécoul, cultures maraîchères, alt. 447 m (B. Ferlay, 20.06.2024).

Cette petite herbacée rudérale et arvale n’était jusqu’alors signalée que de la Guadeloupe pour les Petites Antilles. Fournet (2002) trouve d’ailleurs cette répartition « étrange pour une arvale ». On peut penser que l’espèce n’a pas été détectée à cause des inventaires floristiques principalement orientés vers des milieux naturels, plutôt que dans les milieux agricoles. L’espèce est sûrement plus largement répartie en Martinique et est à rechercher dans les autres îles des Petites Antilles.

Répartition : Amérique centrale, Amérique du Sud tropicale, Trinidad, Petites Antilles (Guadeloupe, Martinique !).

Photo 23. Spermacoce latifolia ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND
Photo 24. Spermacoce latifolia ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND.

Voyria tenella Guilding ex Hook. (Gentianaceae) ; photos 25 et 26

Voucher : MTK7159.

Sainte-Marie, forêt de Reculée, forêt mésohygrophile, alt. 370 m (B. Ferlay, S. Gonzalez, A. Lesimple & T. Hatterman, 20.11.2024).

Cette petite mycohétérotrophe est très discrète. Bien qu’elle puisse atteindre 20 cm de hauteur, sa détection reste difficile en raison de l’absence de feuilles et de son aspect très filiforme. De plus, sa saisonnalité la rend indétectable une partie de l’année. Ces facteurs expliquent en partie pourquoi elle n’a été identifiée en Martinique que tardivement. La population observée ne comptait que deux individus, mais il est très probable que d’autres petites populations soient disséminées dans les forêts mésohygrophiles. Des prospections complémentaires, réalisées à des périodes propices, permettraient d’affiner la connaissance de sa répartition. La seule station connue ne semble toutefois pas menacée.

Répartition : Amérique centrale, Amérique du Sud, Grandes Antilles, Petites Antilles (Montserrat, Guadeloupe, Martinique !, Sainte-Lucie, Saint-Vincent).

Photo 25. Voyria tenella ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND
Photo 26. Voyria tenella ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND.

3. Les nouveaux taxons exogènes, échappés ou naturalisés

 

Azadirachta indica A. Juss. (Meliaceae)

Voucher : MTK2407.

Le Marin (P. Couderc Murillo & C. Auguste, 04.07.2016) ; Sainte-Anne, quartier Belfond (E. Mitchel, 17.04.2028) ; Le Marin, domaine du Grand Macabou (C. Beyer, 23.03.2022) ; Le François, fondation Clément (L. Sénéchal, 26.03.2024).

Espèce introduite comme plante d’ornement et cultivée pour ses fruits et graines (source de l’huile de neem), elle a également été plantée sur le bord des routes, dans des lotissements et des zones industrielles ou commerciales. On retrouve cette espèce subspontanée de manière marginale. Elle est considérée exotique envahissante dans de nombreux pays comme à Hawaii, République dominicaine ou encore Sainte-Lucie. Bien qu’elle ne soit pas encore envahissante dans les milieux naturels en Martinique, il est important d’être attentif à son développement afin de mettre en place des actions de gestion adaptées.

Répartition : introduite dans tous les continents tropicaux. Originaire d’Inde et du sous-continent indien.

 

 Cajanus scarabaeoides (L.) Thouars (Fabaceae) ; photos 27 et 28

Voucher : MTK6690.

Le Carbet, belvédère de l’Anse Marigot, prairie semi-xérophile, alt. 42 m (B. Ferlay & G. Viscardi, 10.11.2023).

Cette herbacée lianescente n’est connue du bassin caribéen que de la Jamaïque et de la Martinique. L’aire d’occupation de l’espèce est relativement petite, mais présente de nombreux individus. Elle se développe dans une prairie secondaire, principalement composée d’une Poaceae exotique envahissante, Bothriochloa pertusa (L.) A. Camus. Néanmoins, elle semble être invasive dans certains territoires comme à Maurice, où elle a des impacts sur les parcelles agricoles, notamment les cultures de canne à sucre (Seeruttun et al., 2005). Il est donc important de suivre l’évolution de cette espèce et de mener des actions de gestion sur la seule station actuellement connue.

Répartition : Jamaïque, Brésil, Martinique !. Originaire d’Afrique et d’Asie tropicale.

Photo 27. Cajanus scarabaeoides ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND
Photo 28. Cajanus scarabaeoides ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND.

Chrysopogon aciculatus (Retz.) Trin. (Poaceae)

Voucher : MTK6924.

L’Ajoupa-Bouillon, place de l’Église dans le bourg, espace vert urbain, alt. 256 m (B. Ferlay, 28.03.2024).

Cette herbacée a sûrement été introduite pour la végétalisation des espaces verts. Pour l’instant connue uniquement du bourg de l’Ajoupa-Bouillon, elle a sans doute été introduite dans d’autres espaces verts urbains. Une étude récente met en évidence le potentiel phytotoxique de cette espèce (Islam et al., 2019). Très peu d’informations font référence à des impacts dans les zones d’introduction. Portères (1950) précise néanmoins qu’en Côte-d’Ivoire l’espèce se naturalise particulièrement dans les pâtures surexploitées et semble sans inconvénient dans les cultures, champs et jardins, sans parler de naturalisation dans les milieux naturels. Malgré tout, il est important d’effectuer une veille sur l’expansion potentielle de cette espèce.

Répartition : Amérique du Nord, Afrique tropicale, Petites Antilles (Martinique !). Originaire d’Asie et d’Océanie.

 

Digitaria violascens Link (Poaceae)

Voucher : MTK6929, MTK6939, MTK7029.

Fonds-Saint-Denis, Porte d’Enfer, talus de bord de route, alt. 340 m (B. Ferlay, 04.04.2024) ; Fonds-Saint-Denis, bourg, trottoirs urbains, alt. 371 m (B. Ferlay, G. Viscardi, M. Beatrix & M. Diony, 12.04.2024) ; Le Morne-Rouge, Lourdes, friche à rudérales, alt. 441 m (B. Ferlay, 16.07.2024).

Cette herbacée a été largement introduite dans de nombreux pays, qu’ils soient tropicaux ou tempérés. Il n’existe que très peu de synthèses concernant les impacts de cette espèce hors de sa répartition d’origine. En Martinique, elle semble finalement largement répandue, principalement dans les milieux ouverts et dégradés (zones agricoles et urbaines). Des efforts de prospection sont préconisés afin d’avoir un aperçu plus précis de sa répartition à l’échelle du territoire.

Répartition : Europe, Afrique, Amérique du Nord, Amérique du Sud tropical, Grandes Antilles, Petites Antilles (Guadeloupe, Dominique, Martinique !). Originaire d’Asie tropicale et d’Océanie.

 

Eriochloa acuminata (J. Presl) Kunth (Poaceae) ; photos 29 et 30

Voucher : MTK6898, MTK7032.

L’Ajoupa-Bouillon, Vierge de la Calebasse, bord de piste, alt. 723 (B. Ferlay, 26.03.2024) ; Le Morne-Rouge, savane Périnelle, friche hygrophile, alt. 416 m (B. Ferlay, 16.07.2024).

Cette herbacée est normalement connue des milieux subtropicaux. Les deux populations découvertes ne possèdent que très peu d’individus et se trouvent en marge de milieux agricoles. Il n’existe pas d’informations sur le caractère invasif de cette espèce. À surveiller.

Répartition : Martinique !. Originaire d’Amérique du Nord et d’Amérique du Sud.

Photo 29. Eriochloa acuminata ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND
Photo 30. Eriochloa acuminata ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND

Gymnanthemum amygdalinum (Delile) Sch. Bip. (Asteraceae) ; photos 31 et 32

Voucher : MTK6856.

Le Carbet, rivière du Carbet, bord de piste, alt. 35 m (B. Ferlay & J. Mbangue Ekoko, 20.02.2024).

L’origine de cette population est très certainement due aux dépôts de déchets verts sur les berges de la rivière du Carbet. Certains individus ont repoussé et on peut également observer plusieurs jeunes individus issus de régénération. Cette espèce n’est pas signalée comme étant envahissante, mais une attention particulière est à porter sur cette station, en milieu dégradé, qui pourrait potentiellement s’étendre sur les berges de la rivière. Une action de lutte précoce permettrait d’éviter le risque d’invasion.

Répartition : Martinique !. Originaire d’Amérique du Sud et d’Afrique.

Photo 31. Gymnanthemum amygdalinum ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND
Photo 32. Gymnanthemum amygdalinum ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND

Hewittia malabarica (L.) Suresh (Convolvulaceae) ; photos 33 et 34

Voucher : MTK6643.

La Trinité, cité du Bac, bord de route humide, alt. 24 m (B. Ferlay, 12.09.2023), Desmarinières, champs de canne, alt. 39 m (B. Ferlay, S. Gonzalez, A. Lesimple & T. Hatterman, 19.11.2024), Spoutourne, champs de canne, alt. 37 m (B. Ferlay, S. Gonzalez, A. Lesimple & T. Hatterman, 19.11.2024).

Cette espèce herbacée lianescente n’était signalée hors de son aire de répartition naturelle qu’à la Jamaïque. En Martinique, elle semble désormais largement naturalisée dans les plantations de canne à sucre, ainsi que sur certains bords de route de la commune de Trinité. Pour l’heure, l’espèce n’a pas été observée dans des milieux véritablement naturels. Toutefois, il est important de surveiller son développement afin de prévenir une éventuelle invasion des habitats naturels.

Répartition : Jamaïque, Martinique !. Originaire d’Afrique et d’Asie tropicale.

Photo 33. Hewittia malabarica ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND.
Photo 34. Hewittia malabarica ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND

Murdannia nudiflora (L.) Brenan (Commelinaceae)

Voucher : MTK4152, MTK6781.

Fonds-Saint-Denis, base du morne Patate, bord de route et bord de piste de friche mésophile, alt. 209 m (B. Ferlay & M. Tanguy, 02.08.2021) ; Le François, Trianon sud, pelouse hygrophile secondaire, alt. 3 m (B. Ferlay, 15.11.2023).

Une publication récente (Ferlay et al., 2023) fait référence d’une nouvelle mention pour la Martinique, Callisia filiformis (M. Martens & Galeotti) D.R. Hunt. En 2023, des prospections sur le terrain ont permis d’observer une belle population d’une espèce très proche, Murdannia nudiflora (L.) Brenan. Dans la Flora Mesoamerica (Davidse et al., 1994), il est précisé que « Callisia filiformis est fréquemment confondue avec Murdannia nudiflora ». La différence se fait notamment sur le type d’inflorescence, le nombre d’étamines et le nombre de graines. C. filiformis possède des inflorescences ombelliformes, six étamines et seulement trois graines (une graine par loge de la capsule), alors que M. nudiflora possède des inflorescences en cymes, deux étamines et six graines (deux graines par loge de la capsule). Après un examen de l’échantillon de l’espèce identifiée comme étant C. filiformis (MTK4152 ; photo 35), il s’avère qu’il correspond finalement à M. nudiflora (photos 36 et 37). Ainsi, C. filiformis est mentionné par erreur en Martinique, confondue avec M. nudiflora, une espèce exotique envahissante. En effet, elle est connue envahissante dans de nombreux pays néotropicaux (Oliveira Pellegrini et al., 2016) et est même considérée comme une des pires au monde par Holm et al. (1977). Elle semble avoir un impact important dans les milieux agricoles, notamment dans les rizières (Moody, 1989). Avec son tempérament hygrophytique, elle pourrait se développer dans les zones humides et avoir des impacts sur la biodiversité de ces milieux déjà très perturbés par les EEE. Il paraît donc indispensable de suivre l’évolution de cette espèce en Martinique.

Répartition : Amérique du Nord, Amérique centrale, Amérique du Sud tropicale, Afrique tropicale, Grandes Antilles, Petites Antilles (Martinique !). Originaire d’Asie du Sud-Est.

Photo 35. Échantillon MTK4152, initialement identifié en Callisia filiformis ; A. Carolé, CC-BY-NC-ND.
Photo 36. Murdannia nudiflora ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND.
Photo 37. Murdannia nudiflora ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND

Peltophorum pterocarpum (DC.) Backer ex K. Heyne (Fabaceae) ; photos 38 et 39

Voucher : pas de référence.

Le Carbet, anse Four à Chaux, arrière-plage de galet, alt. 4 m (B. Ferlay, 08.09.2021) ; Sainte-Anne, morne Belfond, forêt semi-xérophile en bordure de mangrove (A. Arnaud & A. Thésée, 06.07.2023) ; Rivière-Salée, rivière Salée, berges de rivière dégradée de très basse altitude en zone agricole (A. Thésée & J. de Reviers, 06.06.2024). Il existe des observations sur iNaturalist avec deux points de présence autour du bourg de Sainte-Anne.

Dans sa flore, Fournet (2002) indique la présence de cette espèce en Guadeloupe, comme cultivée pour l’ornement. Il précise également que l’espèce doit certainement être dans d’autres îles, « dont la Martinique (à rechercher) ». C’est chose faite, l’espèce est finalement largement répartie sur l’île, principalement dans les milieux urbains, mais aussi dans des milieux semi-naturels ou naturels, dans lesquels elle semble avoir un comportement envahissant. Par exemple sur la station du morne Belfond en arrière-mangrove, cette espèce à croissance rapide est très abondante, avec de nombreuses régénérations. Witt (2023) alerte également de la présence de cette plante confinée sur quelques îles, à haut potentiel d’invasion et problématique pour l’ensemble de la Caraïbe. Il y est précisé que les invasions sont localisées mais denses, induisant le déplacement des espèces indigènes, végétales comme animales. À Sainte-Lucie, l’espèce est considérée comme une menace potentielle pour la forêt marécageuse (Krauss, 2012). Il paraît intéressant de réaliser des inventaires ciblés et de mettre en place des actions de gestion avant que l’envahissement de ce taxon devienne difficilement gérable.

Répartition : Floride, Amérique centrale, nord de l’Amérique du Sud, Grandes Antilles, Petites Antilles (Guadeloupe, Martinique !, Sainte-Lucie, Barbade). Originaire du Sud-Est asiatique.

Photo 38. Peltophorum pterocarpum ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND.
Photo 39. Peltophorum pterocarpum ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND

Ruellia simplex C. Wright (Acanthaceae) ; photos 40 et 41

Voucher : MTK0007.

Fort-de-France, Châteauboeuf (M. Delblond, 15.05.2007). Plusieurs observations sur iNaturalist rapportent l’espèce à Sainte-Anne, au Marin, aux Trois-Îlets, aux Anses-d’Arlets et à Fort-de-France.

Cette espèce est considérée comme indigène de la région d’Amérique centrale, des Grandes Antilles et des Petites Antilles (Acevedo-Rodriguez & Strong, 2012). Néanmoins, c’est une espèce commercialisée pour l’ornement et on la trouve largement plantée dans les milieux urbains en Martinique (ronds-points, jardinières…). Les quelques observations faites en milieu semi-naturel correspondent à des individus issus de déchets verts le long de rivières. Taxref précise que cette espèce est introduite non établie (dont cultivée / domestique). En Martinique, nous avons observé un cas de naturalisation de cette espèce, le long d’une berge de cours d’eau, en aval d’un dépôt, avec de la régénération sur une banquette alluvionnaire. Fournet (2002) précise qu’elle « se ressème naturellement » et qu’elle « semble en voie de naturalisation ». À Hawaï, aux îles Cook, à la Réunion, en Polynésie française, aux îles Galapagos et en Australie, elle est considérée comme envahissante, se propageant dans les milieux perturbés et les milieux naturels. Elle peut former des populations monospécifiques très denses, bloquant la régénération et la croissance d’espèces indigènes (Randall, 2012). Espèce à surveiller.

Répartition : Petites Antilles (Guadeloupe, Martinique !). Originaire d’Amérique centrale et d’Amérique du Sud.

Photo 40. Ruellia simplex ; A. Arnaud, CC-BY-NC-ND
Photo 41. Ruellia simplex ; A. Arnaud, CC-BY-NC-ND

Setaria sphacelata (Schumach.) Stapf & C.E.Hubb. (Poaceae) ; photos 42 et 43

Voucher : P2168351, P2168476, MTK4156, MTK5764, MTK6946.

Le Morne-Vert, source Attila, friche humide pâturée, alt. 573 m (B. Ferlay & N. Servientis, 07.08.2021) ; Case-Pilote, morne Rose, haie de bord de route, alt. 626 m (B. Ferlay, 21.06.2022) ; Le Morne-Vert, José, prairie hygrophile améliorée, alt. 554 m (B. Ferlay & A. Thésée, 19.04.2024).

Cette herbacée originaire d’Afrique a certainement été introduite comme plante fourragère. Fournet (2002), signale cette espèce pour la Guadeloupe et la Martinique. Pourtant Taxref la signale absente en Martinique, peut-être à cause d’un manque d’informations apportées par Fournet. L’espèce est bien présente en Martinique, observée sur deux localités. Dans les deux cas, l’espèce se développe dans des prairies hygrophiles fréquemment pâturées. Bien qu’elle forme des populations relativement denses et parfois monospécifiques, elle semble se cantonner dans ces habitats ouverts et humides. Les actions de gestion pour cette espèce sont difficilement envisageables au vu des tailles importantes des populations. Il paraît néanmoins important de mener des actions pour éviter l’introduction de cette espèce dans d’autres prairies pâturées.

Répartition : Petites Antilles (Guadeloupe, Martinique !). Originaire d’Afrique.

Photo 42. Setaria sphacelata ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND
Photo 43. Setaria sphacelata ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND.

Smilax ornata Lem. (Smilacaceae) ; photos 44 et 45

Voucher : MTK6940.

Fonds-Saint-Denis, source Gabriel, forêt mésohygrophile, alt. 505 m (B. Ferlay, G. Viscardi, M. Béatrix & M. Diony, 12.04.2024).

Cette liane a été découverte en pleine floraison, ce qui a permis de l’identifier avec certitude grâce à la révision du genre de Ferrufino-Acosta (2010). La station découverte ne présente que quelques individus de grande taille, se développant en bordure des forêts dégradées à Bambusa vulgaris Schrad. ex J.C. Wendl. et plantées à Swietenia macrophylla King. L’espèce ne semble pas avoir de caractère envahissant. La raison de son introduction est inconnue.

Répartition : Jamaïque, Martinique !. Originaire d’Amérique centrale.

Photo 44. Smilax ornata ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND.
Photo 45. Smilax ornata ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND

Sorghum bicolor subsp. verticilliflorum (Steud.) De Wet ex Wiersema & J. Dahlb. (Poaceae)

Voucher : MTK3508.

Rivière-Salée, mangrove de Génipa, bord de piste humide (B. Ferlay, A. Arnaud & G. Viscardi, 24.06.2020) ; Fort-de-France, camp Balata, prairie herbacée hygrophile (A. Arnaud, B. Ferlay & G. Viscardi, 15.07.2021) ; Le Lamentin, bord des routes (B. Ferlay, 18.08.2022) ; Le François, rivière Desroses, berge de rivière, alt. 24 m (B. Ferlay & I. Loiseau, 18.08.2022) ; Saint-Esprit, morne Coco, lisière de forêt mésophile, alt. 132 m (B. Ferlay & J. de Reviers, 14.02.2023) ; L’Ajoupa-Bouillon, Dufailly, friche agricole, alt. 249 m (B. Ferlay, 28.03.2024) ; Basse-Pointe, friche agricole (B. Ferlay, 15.05.2024) ; Macouba, bord de route humide (B. Ferlay, 24.05.2024) ; Saint-Pierre, friche agricole humide (B. Ferlay, 20.06.2024) ; Le Prêcheur, friche agricole (B. Ferlay, 25.06.2024) ; Le Morne-Rouge, prairie hygrophile (B. Ferlay, 16.07.2024).

Ce taxon, autrefois connu sous l’épithète Sorghum arundinaceum (Willd.) Stapf (Fournet, 2002), n’était jusqu’alors connu que d’Antigua, de Saint-Martin et de la Guadeloupe pour les Petites Antilles. Fournet signale qu’en Guadeloupe l’espèce est en expansion depuis 1970. Même s’il n’existe pas d’échantillons anciens pour la Martinique, il est très probable que l’espèce y soit présente depuis plusieurs années. Ces lacunes sont potentiellement à rattacher aux problèmes taxonomiques concernant le genre Sorghum dans les tropiques, avec de nombreuses variétés et cultivars. Sorghum bicolor (L.) Moench est signalée pour la Martinique depuis 1880, à l’époque du R.P. Antoine Duss (Duss 788, 1327, 1886). Néanmoins, ces récoltes sont à rattacher à la sous-espèce bicolor, espèce cultivée, notamment pour ses usages alimentaires. La sous-espèce verticilliflorum s’en différencie notamment par la plus grande taille des épillets et la forme de la panicule. Si cette sous-espèce n’est pas reconnue par toutes les bases de données, Wiersema et Dahlberg (2007) ont établi cette nouvelle combinaison qui est aujourd’hui validée (POWO, 2024). Ce taxon est très largement réparti en Martinique, pouvant former des populations presque monospécifiques. Comme pour d’autres espèces de Poaceae envahissantes, il semble difficile de mettre en place des actions de gestion.    

Répartition : Amérique du Nord, Amérique centrale, Amérique du Sud, Grandes Antilles, Petites Antilles (Antigua, Saint-Martin, Guadeloupe, Martinique !). Originaire d’Afrique.

 

Tripsacum sp. (Poaceae) ; photos 46 et 47

Voucher : MTK7067.

Le Vauclin, montagne du Vauclin, friche mésophile, alt. 484 m (B. Ferlay, J. de Reviers & M. Précart, 04.08.2024).

Cette herbacée très robuste n’a pu être identifiée que jusqu’au genre. Même si l’identification du genre Tripsacum peut être délicate, il existe de la littérature avec plusieurs clés d’identifications (Brink & De Wet, 1983 ; De Wet et al., 1976, 1982, 1983 ; Davidse et al., 1994). Une station importante presque monospécifique a été découverte sur le sommet de la montagne du Vauclin, avec un seul individu fertile. Néanmoins, même s’il n’y a aucun doute sur le genre, l’inflorescence est bien différente, principalement sur la taille des différents épillets, plus précisément sur le nombre et la taille des différentes pièces florales, très inégales. De plus, les épillets terminaux sont vivipares, élément qui n’est pas documenté. Néanmoins, il existe de la littérature sur les hybrides concernant le genre Tripsacum, qui s’hybride également de manière intergénérique avec le genre Zea. Tripsacum andersonii J.R. Gray, introduite à Sainte-Lucie, semble être l’hybride naturel entre ces deux genres (de Wet et al., 1983). D’un autre côté, Taxref signale Tripsacum latifolium Hitchc. comme cultivé en Martinique, avec comme référence Fournet (2002), mais ce dernier ne précise pas la localisation de ce taxon à l’échelle insulaire. Nous pensons que l’individu échantillonné est potentiellement un hybride, avec une forme de dégénérescence des pièces florales. Dans tous les cas, c’est un genre connu pour avoir été largement introduit comme plante fourragère et considéré comme envahissant dans certains pays, comme à Cuba avec T. latifolium. Ainsi, il est préconisé de mener des actions de gestion afin de limiter son expansion et son introduction dans d’autres sites. En parallèle, des efforts seront effectués afin de lever les doutes sur l’identité de l’espèce.

Photo 46. Tripsacum sp. ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND.
Photo 47. Tripsacum sp. ; B. Ferlay, CC-BY-NC-ND.

Bibliographie

Acevedo-Rodríguez P. & Strong M.T., 2012. Catalogue of Seed Plants of the West Indies. Smithsonian Contributions to Botany 98 : 1-1192.

Bánki O., Roskov Y., Döring M., Ower G., Hernández Robles D.R., Plata Corredor C.A., Stjernegaard Jeppesen T., Örn A., Vandepitte L., Pape T., Hobern D., Garnett S., Little H., DeWalt R.E., Ma K., Miller J., Orrell T., Aalbu R., Abbott J., et al., 2024. Catalogue of Life, version 2024-08-29, https://doi.org/10.48580/dgdwl.

De Wet J.M.J., Harlan J.R. & Brink D.E., 1982. Systematics of Tripsacum dactyloides (Gramineae). American Journal of Botany 69 (8) : 1251-1257.

De Wet J.M.J., Fletcher G.B., Hilu K.W. & Harlan J.R., 1983. Origin of Tripsacum andersonii (Gramineae). American Journal of Botany 70 (5) : 706-711.

Ferlay B., Servientis N. & Viscardi G., 2023. Mise à jour des listes des Trachéophytes de Martinique et de Guadeloupe (Petites Antilles). Carnets botaniques 142 : 1-41, https://doi.org/10.34971/9XJ8-DG47.

Ferrufino-Acosta L., 2010. Taxonomic revision of the genus Smilax (Smilacaceae) in Central America and the Caribbean Islands. Willdenowia 40 (2) : 227-280.

Fournet J., 2002. Flore illustrée des phanérogames de Guadeloupe et de Martinique. CIRAD, Gondwana éditions, I : 1 324 p. et II : 1 214 p.

Moody K., 1989. Weeds reported in rice in South and Southeast Asia. International Rice Research Institut, 442 p.

POWO, 2024. Plants of the World Online. Facilitated by the Royal Botanic Gardens, Kew, published on the Internet; https://powo.science.kew.org/, retrieved 07 September 2024.

Randall R.P., 2012. A global compendium of weeds, second edition. Department of Agriculture and Food Western Australia, Perth, 1 124 p.

Rollet B., Howard R.A., Checkmahomed A., Fiard J.-P., Rousteau A., Mouton J., David J., Huc R., Jérémie J., Bernard J.-F., Barrier S., Jeanette J., Détienne P. & Jacquet P., 2010. Arbres des Petites Antilles, 2 – Description des espèces. Basse-Terre (Guadeloupe), Office national des forêts, direction régionale de Guadeloupe, 866 p.

Remerciements

Nous remercions toutes les personnes qui ont aidé à cette compilation, notamment en fournissant des indications sur des stations de certaines de ces nouvelles espèces mentionnées, afin de préciser leur répartition sur le territoire. Merci à Patrick Rancelli, Christophe Auguste, Elisabeth Etifier-Chalono et Michel Delblond. Merci à Solène Marie-Louise, Séverine Montout, Magali Précart, Melvin Beatrix, Mathias Diony, Iraïs Loiseau, Hugo Florance, Sophie Gonzalez, Antoine Lesimple et Tom Hatterman pour nous avoir accompagnés sur des terrains qui ont conduit à la découverte de certaines de ces espèces. Merci à Anthony Carolé pour le scan de l’Herbier, les extractions des numéros voucher et tout ce travail de montage et de gestion de l’Herbier MTK ! Merci enfin à tous les membres de la communauté iNaturalist qui, à travers leurs observations, participent activement à la surveillance de l’introduction d’espèces exotiques potentiellement envahissantes.